Maxime, tu t’es cassé la clavicule il y a six semaines en chutant au début de la trêve hivernale. Où en es-tu aujourd’hui ?
J’ai fait un bilan chez le chirurgien lundi dernier et je m’en remets bien, un peu plus vite que prévu. C’est plutôt bon signe. Grâce à Jacky Maillot, le médecin de l’équipe de France, j’ai tout de suite été mis entre de bonnes mains, chez un chirurgien spécialisé à Lyon. Quand on est suivi par les bonnes personnes, ça favorise un retour rapide. J’ai été bien opéré, la plaie cicatrise vite, et j’ai pu reprendre rapidement le vélo sans aucune douleur. Je suis tombé au début de ma reprise, après une coupure de quinze jours. Pendant un mois je n’ai pas fait grand-chose. Bien qu’il soit toujours mieux de ne pas tomber, c’était le meilleur moment pour le faire !
En quoi cette blessure intervenue au début du mois de novembre peut-elle impacter ta préparation 2016 ?
Le vélo, c’est ingrat, ça a été laborieux à la remise en route. C’est quand on remonte dessus que l’on mesure le boulot à fournir. Mais depuis une semaine je me sens progresser et j’ai retrouvé un niveau correct. Ça ne devrait pas trop retarder ma préparation. J’ai pris cette coupure prolongée de manière positive : le repos est forcément profitable, j’ai pu bien me régénérer. En revanche j’avais pris pour habitude de mettre les bouchées doubles l’hiver pour bien bosser ma technique. Ça a bien porté ses fruits ces deux dernières années au niveau du pilotage. Je n’aurai pas pu le travailler cette fois-ci. Il me faudra sans doute accentuer davantage sur la technique à ma reprise du VTT en janvier-février pour retrouver rapidement le feeling. Mais ce sont des choses qui reviennent vite.
Tu as conclu la saison mi-octobre sur une 2ème place au Test Event de Rio, qu’est-ce que ça signifie à tes yeux ?
Il était important de bien marquer les esprits en vue de la sélection : montrer qu’on est à l’aise sur le circuit, qu’on ne souffre pas de la chaleur. En VTT, la part de feeling est importante. Nous avons nos circuits favoris et ceux qu’on aime un peu moins. Terminer 2ème à Rio m’a conforté dans l’idée que ce parcours me convient bien. C’est un circuit rapide qui permet de mettre les watts dans des montées peu techniques, ça convient bien à mon pédalage. Contrairement à d’autres, je ne coupe pas ma saison après le Championnat du Monde. J’aime bien faire des saisons longues à VTT. J’avais fait du Test Event mon objectif de fin de saison, je me suis bien préparé pour cette épreuve, et j’y suis arrivé en forme, même si nous avons fait beaucoup de fatigue sur le circuit les deux jours précédant la course.
La délégation française s’est avant tout rendue au Brésil pour prendre des repères. Comment avez-vous travaillé sur place ?
Avant la course, nous avions un créneau de deux heures l’avant-veille puis un créneau de trois heures la veille pour reconnaître le circuit. Le timing était serré. Nous avons donc privilégié dans un premier temps une reco à pied car sur le vélo on voit un peu moins de choses. Ça nous a permis de ressentir le tracé, de discuter beaucoup également quant aux trajectoires. Au moment des recos à vélo, nous avons embarqué avec nous de nombreux capteurs, notamment notre capteur de puissance. Nous avons également placé des caméras sous différents angles pour être filmés de devant, de derrière, ce qui permet de se voir rouler sur le circuit et de corriger des erreurs qui ne sont pas toujours flagrantes à constater quand on est sur le vélo.
Aux quatre pilotes français qui ont fait le déplacement s’est greffée une grosse équipe technique, quel a été son rôle ?
Par rapport au nombre d’athlètes, il y avait en effet une grosse délégation. Le VTT est un sport spécifique qui nécessite de prendre en compte beaucoup de paramètres. Cyril Granier, appuyé par des photos, s’est chargé d’enregistrer un grand nombre de données intéressantes : la hauteur et la longueur des sauts, la distance entre deux obstacles… Ça permet à ceux qui n’y étaient pas d’avoir tous les détails du circuit. Jacky Maillot et le staff médical ont relevé avec nous de nombreuses mesures quant à l’hydratation, la réaction à l’effort de notre corps, le port de gilets de refroidissement… Les appareils de mesure médicale nous permettent de bénéficier de mesures très précises et extrêmement intéressantes. A Rio au mois d’août, il faut s’attendre à du 25°, mais il n’est pas impossible d’avoir 35° ou plus. Cela nécessitera une préparation en conséquence en amont. Il faudra s’entraîner au chaud pour être sûrs d’être performants le jour J dans de telles conditions.
Quel matériel te semble le plus approprié à ce circuit olympique ?
Au Test Event, nous avions quasiment tous fait le choix d’un semi-rigide, à l’exception de Nino Schurter, qui a su performer tout aussi bien sur un tout suspendu. A priori, je resterai sur un semi-rigide. Je considère qu’un tout suspendu n’est pas tellement justifié sur ce circuit, mais à voir quelles retouches lui seront apportées. Seuls le gros pierrier et la montée qui le précède se prêtent à l’utilisation d’un tout suspendu, le reste se fait sur du stabilisé, ce qui nécessite énormément de rendement. Les notions de trajectoire, d’adhérence, seront moindres. On pourrait même très bien rouler avec un vélo de cyclo-cross entre les portions techniques ! Mais pas dans les descentes ! Là, en faisant le forcing, j’ai réussi à un moment à mettre 3 secondes à Nino Schurter. Ça veut dire qu’on peut être rapide dans ce passage avec un semi-rigide.
Pour aller à Rio l’été prochain, quelles vont être tes grandes échéances au début de l’année 2016 ?
Depuis la Coupe du Monde de Lenzerheide début juillet, cinq épreuves internationales ont compté dans les critères de sélection. Il en restera trois l’an prochain pour se qualifier : Cairns les 23/24 avril, Albstadt les 21/22 mai et La Bresse les 28/29 mai. On sait que les performances de 2016 joueront plus dans la balance que celles de 2015. Même s’il n’y a pas photo quant à ce que j’ai réalisé sur 2015, il va me falloir confirmer l’an prochain. Comme beaucoup de pilotes, j’ai prévu d’avoir un gros pic de forme sur Albstadt et La Bresse pour entériner cette sélection.
La place de Julien Absalon étant quasi acquise, tu es en lice pour l’une des deux places restantes avec des pilotes comme Victor Koretzky, Jordan Sarrou et Stéphane Tempier, pour ne citer qu’eux. Comment anticipes-tu cette course à la sélection ?
Les années olympiques, c’est toujours un peu spécial. J’ai la chance, par rapport à d’autres, de l’avoir déjà vécu. Je sais comment ça se passe : il y a toujours un cran de pression supplémentaire. Nous avons tous les dents longues et envie d’y aller. Il va falloir gérer cela correctement mais je ne me fais pas trop de soucis. Avec mon expérience et ce que je suis capable de faire sur le vélo, ça devrait le faire.
L’équipe de France VTT honore depuis l’an passé une nouvelle tradition en se réunissant en novembre pour un stage de cohésion à Saint-Quentin-en-Yvelines. Quel est le bénéfice d’un tel rassemblement ?
Ce stage a été mis en place l’an dernier. L’expérience ayant été positive, nous l’avons poursuivie. Ça nous permet de bénéficier de belles infrastructures et de rencontrer les gens de la fédération. Nous avons fait un peu de piste et de BMX, c’est très intéressant. Ça nous a permis de débriefer de la saison 2015 et d’organiser la saison 2016 tout en mettant un peu de cohésion. Ce sont des stages où l’on est loin de nos objectifs, plus détendus. Personne n’est encore vraiment rentré dans sa saison, on n’a pas besoin d’être sérieux à 100 %, on peut aller se boire une bière le soir et sortir un peu du contexte vélo. Pour la cohésion de groupe c’est un moment important. Nous avons en outre porté le message de la candidature de Paris aux Jeux 2014 en nous rendant sur la Colline d’Elancourt. Ce sont des moments privilégiés dont il faut savoir profiter au maximum.
Quelle analyse fais-tu de ta saison 2015 et que te faudra-t-il corriger en 2016 ?
Il faudrait que j’arrive à me mettre un peu plus rapidement en route et que je sois plus régulier, ce qui me manque depuis quelques années sur une saison. Cela se justifiait jusque-là avec la réalisation en parallèle de mes études. En 2015 j’étais pour la première fois branché vélo à 100 %. Le décès de ma mère en début d’année m’a sans doute plus pesé que je n’ai voulu le penser. J’ai dû attendre la mi-juillet pour faire mon premier podium en Coupe du Monde et je me suis bien rattrapé sur la fin de saison. En forme, je suis capable de faire de grandes choses. Je nourris un peu de regrets sur le Mondial avec ce départ un peu compliqué. Les départs ne sont pas mon point fort, mais ils ne sont plus mon point faible. Sur ce départ, je n’ai pas réussi à lire le peloton, à bien me placer. Je fais 6ème mais sans ça j’aurais clairement pu aller chercher une médaille. Et aller chercher une médaille dans un grand Championnat, ça reste l’objectif. Je n’en suis passé pas loin avec une 4ème place en 2013, 2015 m’a conforté dans mes capacités. J’espère pouvoir concrétiser en 2016.
Propos recueillis le 11 décembre 2015.