Petit bout de femme de 1,62 mètre avec un caractère bien trempé, dynamique, déterminée, ambitieuse, vraie boute-en-train aimant la vie, voilà le portrait sans retouches de Caroline Mani, la championne de France de cyclo-cross. Ne lui en déplaise, mais Caroline, c’est la tête et les jambes : Bac ES et IUT GEA en poche, elle poursuit sa deuxième année d’Etudes Supérieures de Commerce à Montpellier. La jeune et jolie Franc-Comtoise de 23 ans, née à Besançon, formée au VTT Conliège, sociétaire du CC Etupes, possède déjà un palmarès bien étoffé à faire pâlir plus d’un coureur chevronné. Issue d’une famille sportive, elle a su cultiver son amour pour le sport. Sa devise : « rêve ta vie et vis ton rêve ». Elle a mis dans son ciel du bleu, du blanc et du rouge. Gageons que les prochaines couleurs qu’elle rêvera d’ajouter feront rimer ciel avec arc-en-ciel.
Caroline, comment vas-tu depuis le terme de la saison de cyclo-cross ?
J’ai eu un hiver bien usant physiquement et mentalement. Il y a eu beaucoup d’émotions, de fatigue… J’ai pris des vacances, je suis partie au ski durant quinze jours avec les gens que j’aime. J’avais besoin de souffler. Après, j’ai repris l’entraînement mais surtout j’ai passé mes examens car j’avais beaucoup de retard. Je viens d’enchaîner un stage équipe de France VTT et un stage équipe de France route. Je m’entraîne beaucoup ces derniers temps pour être au niveau lors de la première manche de Coupe du Monde VTT en Angleterre fin avril.
Tu as dû être sollicitée de toutes parts, as-tu récupéré depuis ?
Effectivement, j’ai pas mal été sollicitée mais c’est tellement appréciable. Je me suis accordée des vacances courtes mais j’avais besoin d’évacuer tout ce stress, ces émotions et cette fatigue.
On te voit monter en puissance chaque année, ce titre, le sentais-tu venir ?
Au niveau national, le rêve de chaque athlète est un maillot tricolore, alors forcément je l’avais au fond de moi. Au début de la saison, Christel Ferrier-Bruneau dominait mais je suis montée en puissance. J’avais pour objectif une victoire à Besançon et aux France. Quand j’ai gagné à domicile, c’est là que j’ai su que je pouvais aller chercher ce titre. Je me suis rapprochée petit à petit ! Maintenant j’ai d’autres rêves…
L’année 2010 pourrait te voir exploser au plus haut niveau international, quels seront tes objectifs cette saison ?
Je pense qu’il ne manque pas grand-chose pour monter sur les podiums internationaux. En tout cas ce sera l’objectif majeur de la saison : franchir un cap à l’international. Je me rapproche et j’y crois. On se donnera les moyens d’y arriver. Ca fait plaisir de voir que l’on croit en moi cela me pousse vers le haut !
Tu cours sur deux tableaux, le VTT et la route. Comment penses-tu gérer tes préparations et tes courses avec cette spécificité ?
La priorité est le VTT. Après, en complément, je cours sur route car j’ai des disponibilités dans le calendrier, mais l’objectif, c’est les Jeux de 2012 en VTT ! Il est vrai que je tire sur la corde mais j’ai un très bon entraîneur, Matthieu Nadal, qui me suit depuis mes débuts, et on gère ensemble les phases de récupération nécessaires pour ne pas faiblir et être présents sur les gros objectifs.
Il fut un temps, tu taquinais les guidons de moto-cross. L’expérience du cocktail VTT DH adrénaline plus vitesse ne t’a jamais tentée ?
Non, la descente ne me tente pas. Tout d’abord, j’aime l’effort intense comme le cross-country, le cyclo-cross, et après les fractures que j’ai eues, j’appréhende la chute. Alors la DH, ce n’est pas pour moi !
C’est pour cette raison que tu as choisi le vélo ?
C’est un peu un hasard si je suis sur un vélo. J’ai fait onze ans de tennis et de moto-cross et j’ai eu un grave accident de moto en 2002 (NDLR : fracture de vertèbre), donc je n’ai pu faire de sport pendant plusieurs mois. Fin 2003, j’ai participé aux Championnats UNSS avec mon lycée à Besançon. J’étais en seconde générale et j’ai entendu parler ensuite d’une sélection sport-études. J’y suis allée avec un vélo prêté par un magasin. Je n’étais jamais montée sur un vélo de route. Quelques jours après, j’apprends que je suis prise et c’est là que tout a commencé.
Comment ont eu lieu tes débuts dans le milieu ?
Je suis rentrée en sport-études à la rentrée 2003, je n’avais jamais réellement fait de vélo et on m’a envoyé au Roc d’Azur avec un vélo Scott qui valait je crois 350 euros. J’étais fière de mon vélo mais je me suis rendue compte sur la ligne que les autres avaient des vélos à 5000 euros. Je finis 7ème en Cadettes et j’intègre ensuite le team VTT Conliège.
Peux-tu nous parler de tes équipes ?
J’ai rejoint l’équipe BH en VTT. Je suis vraiment satisfaite, il y a une super ambiance, du bon matos et un staff vraiment performant. On va faire de belles choses ensemble je pense cette année ! En route, je serai chez Vienne-Futuroscope. Au début, j’avais l’impression de ne pas servir à grand-chose dans l’équipe mais au fur et à mesure j’ai réussi à avoir une place et à m’intégrer. Il y a une belle équipe, une super ambiance et un super staff donc cela mène à la performance. En plus, j’ai obtenu une médaille au contre-la-montre l’an passé, donc j’ai prouvé que je pouvais aussi être présente sur la route.
Comment concilies-tu ta vie d’étudiante et ta vie de cycliste ?
C’est assez difficile, je me demande parfois comment j’arrive à gérer les études supérieures et le haut niveau en vélo. Cet hiver, je ne suis pas du tout allée à l’école et j’ai réussi à valider mes examens. Ce n’est pas évident mais il faut comme partout se donner les moyens pour y arriver. Mais l’école est vraiment très compréhensive avec les sportifs et je les remercie.
Comment aurais-tu vu ta vie sans vélo ?
Il n’y a pas que le vélo dans la vie. Je vis des expériences incroyables avec le sport. On voyage, on rencontre des tas de personnes. Je n’ai pas de vie étudiante, je suis en décalage avec ceux de mon âge, c’est parfois difficile de se comprendre mais je suis heureuse de ma vie et s’il n’y avait pas eu le vélo, je ferais certainement un autre sport car j’aime la compétition, les challenges… Une carrière de sportif est courte alors j’en profite jusqu’au moment où je devrai poser le pied et passer à autre chose.
As-tu d’autres passions dans la vie ?
J’adore tous les sports individuels, comme la course à pied, la moto, le ski, la plongée…
As-tu des modèles cyclistes dans la vie ?
Mon modèle est Laurence Leboucher. Elle s’occupe beaucoup de moi et m’a appris beaucoup de choses en VTT et en cyclo-cross. C’est une sacrée championne !
Le cyclisme féminin souffre de notoriété et de reconnaissance. Si l’on te donnait une baguette magique pour te laisser prononcer des vœux, quels seraient-ils ?
Médiatisation et… argent, disons la possibilité de vivre du vélo. Car les femmes sont obligées de travailler ou suivre des études en parallèle.
En tout cas, on te sent passionnée…
Je suis sur le vélo comme je suis dans la vie, je m’investis et donne le maximum de moi-même à chaque course. J’aime aller au bout de moi-même ! J’aime l’effort, sentir les battements de mon cœur s’accélérer et les sensations ressenties.
Quelle victoire t’a laissé le plus beau souvenir ?
Je crois que la plus belle victoire est celle du Championnat de France de cyclo-cross cette année. Mon premier maillot bleu-blanc-rouge. Ce fut une belle bagarre. La plus émotive est peut-être ma troisième place aux Championnats de France de contre-la-montre. Marina Jaunatre a obtenu sa troisième place en Elite et moi en Espoirs et on a pleuré toutes les deux ! C’était émouvant mais cela ne vaut pas un titre tout de même.
Que pouvons-nous te souhaiter pour cette année ?
Des podiums, des victoires ! Un sportif, ce qu’il veut, c’est gagner et progresser !
Propos recueillis par Emmanuel Chaillard – http://velotekiero.sportblog.fr