L’image est devenue traditionnelle au franchissement de la ligne d’arrivée d’un grand événement de VTT, peut-être parce que le vélo autant que l’homme fait partie intégrante de la victoire en cross-country. Alors quand il s’est présenté dans la dernière ligne droite, la plus belle de sa carrière, il est descendu de machine et a brandi bien haut dans le ciel le VTT sur lequel il est allé chercher enfin son premier titre de champion du monde. On avait fait tous les paris pour le titre mondial. On avait longuement évoqué les difficultés à vaincre l’armada suisse, tellement impressionnante. On avait longtemps rêvé d’un retour en grâce de Julien Absalon, quatre fois champion du monde mais battu par le collectif helvétique ces deux dernières années. Peut-être ne croyait-on plus en ses chances de gagner mais Hermida l’a fait. Le voilà champion du monde.
Les pluies tombées au matin ont cessé au moment où s’élancent les meilleurs vététistes du monde pour six tours d’un circuit aussi emblématique que rigoureux. Le tracé de 4,8 kilomètres est technique mais surtout physique. La première partie est dessinée sur un single-track très étroit où il est quasiment impossible de dépasser. La seconde partie est plus ouverte mais aussi plus accidentée. Le départ est donc donné, et un premier drame va aussitôt surgir. Après 200 mètres de course seulement, une chute met à terre notre champion national Julien Absalon. Le Lorrain, qui a déjà perdu la Coupe du Monde sur crevaison le week-end dernier à Windham, est touché. Il a été poussé à la faute par le Néerlandais Rudi Van Houts, tombé devant ses roues dans un passage trop étroit. Impossible de l’éviter.
Passé par-dessus son guidon, Julien Absalon met un bref instant à reprendre ses esprits. Le vélo n’est pas endommagé, alors il repart aussitôt. Mais il s’aperçoit bien vite que quelque chose ne tourne pas rond. Son auriculaire droit le fait souffrir et il lui devient bien vite difficile de garder la main sur le frein en raison de la douleur. Les deux premières descentes empierrées, c’est à pied que le Français les prend. Puis il commence à se ressaisir, à se remettre dans la course qui a déjà bien commencé à l’avant. Mais ses chances de décrocher le titre semblent s’être envolées. Une véritable infortune… Un peu plus à l’avant, donc, la course fait rage. Elle se veut dure et intense. Quatre pilotes se montrent un ton au-dessus des autres : le Suisse Nino Schurter, le Tchèque Jaroslav Kulhavy, le Sud-Africain Burry Stander et l’Espagnol José-Antonio Hermida.
De toutes les grandes manœuvres, José-Antonio Hermida décroche enfin le titre mondial.
Des quatre coureurs qui se maintiennent dans un mouchoir de poche jusqu’à la mi-course, Nino Schurter semble un moment capable de rééditer sa victoire dans le Championnat du Monde. Mais la malchance ne l’épargne pas non plus. Il est victime d’une crevaison à un peu plus de trois tours de l’arrivée et aussitôt écarté de la tête de course. Il retrouve ainsi Julien Absalon, auteur d’une belle remontée et d’un véritable courage. Cassé physiquement et certainement moralement, le Lorrain court en effet après les trois hommes de tête. Mais à son tour, il est retardé par une crevaison. Il devra se contenter de la 5ème place, le 4ème rang revenant au Suisse Nino Schurter, l’autre malchanceux (il a percé une seconde fois) de ces Championnats du Monde de VTT au dénouement pour le moins inattendu.
Les deux grands favoris écartés, il ne reste donc plus que trois outsiders en lice pour le titre mondial. Le verdict va tomber à un tour et demi de l’arrivée. Là, José-Antonio Hermida saisit sa chance. Lui aussi a été impliqué dans la chute qui a détruit les illusions de Julien Absalon en tout début de course, mais il s’est relevé intact et n’aura pas eu à déplorer le moindre problème mécanique durant toute la course. A environ 7 kilomètres du but, donc, l’Espagnol démarre. Burry Stander, sacré champion du monde Espoirs l’année dernière, est déjà trop entamé pour suivre le mouvement. Il ira néanmoins chercher une formidable médaille de bronze pour sa première participation à un Championnat du Monde Elites. Deux hommes attaquent donc le tour final en tête : José-Antonio Hermida et Jaroslav Kulhavy, qui semble rechercher l’économie.
Le doute s’installe pour José-Antonio Hermida, qui ignore que penser de son adversaire. Il va finalement le tester à la faveur d’une côte en graviers. L’accélération de l’Espagnol est décisive. Elle élimine pour de bon le Tchèque, vainqueur de la finale de la Coupe du Monde le week-end dernier à Windham. De toutes les grandes manœuvres aujourd’hui, José-Antonio Hermida remporte donc enfin le titre mondial à 32 ans. Pilote éminemment sympathique, que l’humour et la disponibilité ont rendu très populaire, l’Espagnol de Multivan Merida Biking Team s’approprie enfin le maillot arc-en-ciel, qu’il avait eu l’occasion de ravir à Cains en 1996 chez les Juniors puis à Sierra Nevada en 2000 chez les Espoirs. Cette fois, c’est chez les Elites que José-Antonio Hermida s’apprête à faire honneur à son titre pendant un an.
Classement :
1. José-Antonio Hermida (ESP, Espagne) les 33 km en 1h52’26 » (17,6 km/h)
2. Jaroslav Kulhavy (TCH, République Tchèque) à 29 sec.
3. Burry Stander (AFS, Afrique du Sud) à 1’10 »
4. Nino Schurter (SUI, Suisse) à 2’03 »
5. Julien Absalon (FRA, France) à 2’23 »
6. Carlos Coloma (ESP, Espagne) à 2’43 »
7. Liam Killeen (GBR, Grande-Bretagne) à 2’51 »
8. Geoff Kabush (CAN, Canada) à 3’58 »
9. Florian Vogel (SUI, Suisse) à 4’14 »
10. Ivan Alvarez (ESP, Espagne) à 4’30 »