Il a beau anticiper de trois semaines et demie la campagne des classiques flandriennes à proprement parler, le Circuit Het Nieuwsblad possède ce charme indissoluble des grands rendez-vous. Impossible, à l’ouverture du calendrier belge, de ne pas ressentir ce frisson à l’évocation des monts qui, d’ici un mois, concentreront l’attention des plus grands chasseurs de classiques. Tous n’ont pas répondu présent cette année à leur appel précoce, des garçons qui avaient pris l’habitude d’y briller par le passé, comme Ian Stannard ou Sep Vanmarcke, ayant choisi d’imiter Fabian Cancellara pour ne se concentrer que sur la quinzaine flandrienne du mois prochain. Les autres, en revanche, ont vu en cette 71ème édition une occasion de prendre des marques essentielles sur un terrain qui présentait cette année une variante.
Des travaux de voirie empêchant l’accès au Molenberg, la finale avait été redessinée avec l’introduction du Boembekeberg pour dernier des treize monts avant le retour sur Gand. Une modification mineure tant la semi-classique flamande a pour coutume de se décanter avant tout dans l’enchaînement du Taaienberg et de l’Eikenberg à moins de 60 kilomètres de l’arrivée.
C’est là, alors que progressait toujours en tête une échappée partie à douze – avec Brecht Dhaene, Kai Reus et Stef Van Zummeren (Veranda’s Willems), Zakkari Dempster (Bora-Argon 18), Maxime Farazijn (Topsport Vlaanderen-Baloise), Alexis Gougeard (Ag2r La Mondiale), Hugo Hofstetter (Cofidis), Kristian House (One Pro Cycling), Benoît Jarrier (Fortuneo-Vital Concept), Julien Morice (Direct Energie), Brian Van Goethem (Roompot-Oranje Peloton) et Kevin Van Melsen (Wanty-Groupe Gobert) – que la course aura encore basculé aujourd’hui. Dans la rigole bétonnée du Taaienberg précisément, seul échappatoire aux pavés ronds et secs pesque montés les uns sur les autres. A 57 kilomètres du but, un quatuor venait à s’y détacher, composé de Tiesj Benoot (Lotto-Soudal), Luke Rowe (Team Sky), Greg Van Avermaet (BMC Racing Team) et du champion du monde Peter Sagan (Tinkoff), dossard 1 épinglé au bas du maillot arc-en-ciel.
Après le Taaienberg, les quatre viraient en haut de l’Eikenberg avec une minute d’avance sur un peloton que tentait de ramener sur eux l’équipe Etixx-Quick Step, prise de court dans l’enchaînement décisif. Mais l’écart dans les 50 derniers kilomètres allait invariablement se maintenir autour de la minute, pour ne fondre que trop tard dans les rues de Gand, où le peloton venait mourir sur les talons des cinq hommes forts du jour. Car aux quatre favoris sortis dans le Taaienberg il convenait d’ajouter le nom d’Alexis Gougeard. Echappé depuis le matin, le Normand s’était d’abord accroché aux roues des meilleurs avec Dhaene, Morice et Reus, qui avaient fini par céder pour de bon sur le pavé du Lange Munte, où Peter Sagan redoublait ses efforts.
Le champion du monde, qui n’avait couru que le Tour de San Luis cette saison, s’est adonné ces dernières semaines à un tout nouveau programme, ayant privilégié un entraînement en altitude en Sierra Nevada à ses traditionnels déplacements dans le Moyen-Orient. Et sur ce dernier secteur pavé, situé à 20 kilomètres de Gand, il limitait donc la liste des candidats à la victoire aux quatre costauds du Taaienberg… et à Alexis Gougeard, qui s’arrachait les tripes pour se maintenir auprès d’eux jusqu’au bout, où il allait prendre la 5ème place.
Seul un sprint pourrait départager les cinq de tête, sur lesquels planait brusquement la menace d’un retour du peloton dans les rues de Gand. Et Greg Van Avermaet, encore dans le rythme des Tours du Qatar et d’Oman, ne faisait aucun complexe face au rapide Peter Sagan, qui l’avait contré pour le titre mondial à Richmond après une attaque dans la grimpée de la 23ème rue. Cette fois c’est le Belge qui lançait le sprint à 200 mètres de la ligne pour contenir sans problème ses adversaires et permettre à la Belgique de reconquérir sa semi-classique d’ouverture, quatre ans après la victoire de Sep Vanmarcke. Soit un premier succès d’envergure sur ce terrain là pour Greg Van Avermaet, 3ème du Tour des Flandres et de Paris-Roubaix l’an dernier, et qui rêve à 30 ans de s’adjuger un premier monument. Un rêve qu’il partage avec Peter Sagan et Tiesj Benoot, ses dauphins du jour, déjà dans les startings-blocks pour une revanche dans un mois et l’ouverture de la campagne flandrienne.
Classement :
1. Greg Van Avermaet (BEL, BMC Racing Team) les 200,8 km en 4h54’12 » (41,0 km/h)
2. Peter Sagan (SVQ, Tinkoff) m.t.
3. Tiesj Benoot (BEL, Lotto-Soudal) m.t.
4. Luke Rowe (GBR, Team Sky) m.t.
5. Alexis Gougeard (FRA, Ag2r La Mondiale) à 6 sec.
6. Jens Debusschere (BEL, Lotto-Soudal) à 9 sec.
7. Adrien Petit (FRA, Direct Energie) m.t.
8. Edward Theuns (BEL, Trek Factory Racing) m.t.
9. Jasper Stuyven (BEL, Trek Factory Racing) m.t.
10. Matthieu Ladagnous (FRA, FDJ) m.t.