La modification de l’itinéraire d’une classique est toujours une curiosité. Pourtant, rarement les effets recherchés par ceux qui redessinent les cartes sont obtenus. En réduisant encore la distance entre les deux dernières escalades – le mot n’est pas trop fort – du Mur de Huy, les gardiens de la Flèche Wallonne souhaitaient en finir avec ce scénario devenu tellement convenu d’un peloton (presque) tout entier se précipitant au sprint dans les 1300 derniers mètres à la verticale. On avait déjà ramené le deuxième des trois franchissements du Mur de Huy à une trentaine de kilomètres du but il y a quelques années, voilà qu’on le rapproche aujourd’hui à 23,5 kilomètres de l’arrivée, avec l’introduction entre les deux Murs de la côte d’Ereffe (2,2 km à 5,9 %), autrefois empruntée en début de parcours…

Mais les organisateurs auront beau se creuser les méninges, il n’existe pas de formule magique pour conjurer la maxime qui veut que ce soient d’abord les coureurs qui fassent la course. Et pas le parcours. Dans l’attente néanmoins de ce final rendu plus explosif, et qui s’avérera finalement sans conséquence sur le scénario habituel (le dernier à n’avoir pas bâti son succès dans la montée finale reste Igor Astarloa en 2003), les côtes s’enchaînent durant 199 kilomètres entre Bastogne et Huy. Ce n’est ni l’accumulation des côtes ni l’accumulation des efforts qui paralyse Preben Van Hecke (Topsport Vlaanderen-Baloise). Déjà de la grande échappée qui anima la quasi totalité de l’Amstel Gold Race dimanche, le Belge reprend un ticket pour la tête de course, qu’il rejoint après une vingtaine de kilomètres avec deux coureurs seulement cette fois-ci, Jonathan Clarke (Unitedhealthcare) et Ramunas Navardauskas (Garmin-Sharp).

Les trois coureurs qui forment l’échappée passeront le plus clair de la course devant, rapidement crédités d’une avance proche des neuf minutes au terme d’une première heure menée tambour battant à 49,4 km/h de moyenne. Si les côtes qui se succèdent alors vont ralentir le rythme des hommes de tête et entamer leur avantage, elles ne laisseront rien paraître des intentions des véritables favoris, dont les équipiers se contentent de réduire l’écart sans précipitation. Aussi, lorsque se dresse la deuxième ascension du Mur de Huy à 23,5 kilomètres de l’arrivée, Preben Van Hecke et Ramunas Navardauskas, qui se sont délestés de Jonathan Clarke un peu plus tôt, auront encore le privilège de grimper les premiers. Et de prolonger leur bel effort jusque dans la côte d’Ereffe, où ils sont revus à 12 kilomètres du but.

Mais alors que l’on s’apprête à plonger de nouveau vers la vallée de la Meuse, aucun favori ne condescend à se découvrir. A l’exception d’un démarrage de Cyril Gautier (Team Europcar) dans l’avant-dernier Mur de Huy ou d’une tentative de Jérémy Roy (FDJ.fr) dans le raidillon qui précède la plongée sur Huy à 8 kilomètres de l’arrivée, personne n’aura franchement tenté d’opposer une résistance au sprint de côte maintes fois répété en guise de finale de la Flèche Wallonne. Quand Jérémy Roy dépose les armes à 3 kilomètres de l’arrivée, c’est un peloton encore très fourni qui entre dans Huy pour venir buter dans le Mur. Et c’est encore un Français, Romain Bardet (Ag2r La Mondiale) cette fois, qui s’active à l’assaut de l’ultime difficulté, 1300 mètres à 9,3 %, que ponctuent des courbes aux pourcentages sévères estimés à plus de 20 % à la corde. Bardet rentre vite dans le rang, le coude à coude entre cadors peut commencer.

Et les cadors se nomment Michal Kwiatkowski (Omega Pharma-Quick Step), épatant d’audace et qui n’est certainement plus loin d’accrocher un premier monument à son palmarès, Daniel Martin (Garmin-Sharp), qui retrouve des jambes de feu quatre jours avant de remettre en jeu son titre de vainqueur de Liège-Bastogne-Liège, et plus que tout Alejandro Valverde (Movistar Team). Après avoir tenu en laisse ses deux principaux adversaires dans la montée du Mur de Huy, l’Espagnol déboîte à l’approche de l’ultime ligne droite. Son explosivité est telle qu’elle lui octroie tout de go de belles longueurs d’avance. De quoi se redresser bien avant la ligne pour savourer une deuxième Flèche Wallonne victorieuse (après 2006) et se projeter avec sérénité vers la 100ème édition de Liège-Bastogne-Liège dimanche.

Classement :

1. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) les 199 km en 4h36’45 » (43,1 km/h)
2. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) à 3 sec.
3. Michal Kwiatkowski (POL, Omega Pharma-Quick Step) à 4 sec.
4. Bauke Mollema (PBS, Belkin) m.t.
5. Tom-Jelte Slagter (PBS, Garmin-Sharp) à 6 sec.
6. Jelle Vanendert (BEL, Lotto-Belisol) m.t.
7. Michael Albasini (SUI, Orica-GreenEdge) à 8 sec.
8. Roman Kreuziger (TCH, Tinkoff-Saxo) m.t.
9. Daniel Moreno (ESP, Team Katusha) à 11 sec.
10. Philippe Gilbert (BEL, BMC Racing Team) à 15 sec.