Paris n’est pas encore tout à fait en vue, mais on s’en rapproche. La Tour Eiffel, on en aperçoit le mât, tout là-bas, derrière les cimes verdoyantes et sauvages que sont les Pyrénées. Dans quatre jours, le peloton du Tour de France défilera sur les Champs. Et s’il semble que les jeux soient faits au classement général, ces deux derniers jours en montagne seront avant tout destinés à en avoir le cœur net. Ces deux journées pyrénéennes, aujourd’hui et demain, se veulent complémentaires. A la quadrilogie Aubisque-Tourmalet-Aspin-Peyresourde sous le cagnard entre Pau (Pyrénées-Atlantiques) et Bagnères-de-Luchon (Haute-Garonne), sur 197 kilomètres, succédera demain une étape plus courte et orageuse avec arrivée inédite dans la station de Peyragudes. Si quelqu’un s’oppose au succès de Wiggins, qu’il se manifeste ou se terre à jamais !
Pour vaincre Bradley Wiggins et son imprenable train Sky, il faut revisiter les stratégies trop usuelles. « Mener une stratégie de harcèlement », propose le directeur du Tour de France Christian Prudhomme dans une interview qu’il nous a accordée ce matin et que nous vous invitons à lire. Et le harcèlement du Maillot Jaune, c’est dans l’Aubisque qu’il se doit de commencer. Or, sur la route qui y mène, un groupe volumineux a déjà pris place en tête. Il comprend trente-huit coureurs de toutes natures : des sprinteurs, des grimpeurs, des champions, des anonymes… Arashiro, Azanza, Bouet, Caruso, Casar, Cummings, Dumoulin, Faria Da Costa, Fédrigo, Feillu, Hincapie, Hondo, Hoogerland, Izaguirre, Karpets, Kessiakoff, Kiryienka, Kruijswijsk, Ladagnous, Levarlet, Marino, Martin, Martinez, Marzano, Minard, Paulinho, Popovych, Sörensen, Sprick, Stortoni, Taaramae, Ten-Dam, Trofimov, Vals, Vinokourov, Voeckler, Voigt et Vorganov.
Déjà, le peloton s’est relevé. Le Maillot Jaune n’a personne à qui contester la présence en tête de course. Et s’il peut en plus priver ses adversaires directs au classement général de la carotte d’une victoire d’étape, ce sera déjà quelques velléités en moins à parer dans les dernières difficultés. Car lesdits opposants ne mettront rien de nouveau en place, manquant décidément d’inspiration. A moins que ce ne soit de forces, au lendemain d’une nouvelle journée de repos. Un gars qui, en revanche, tire toujours bénéfice de ces répits imposés, c’est Thomas Voeckler (Team Europcar). Hier, l’Alsacien n’est monté que dix minutes sur les rouleaux, mais c’est sa façon de performer le lendemain. Il ne le cache plus, il veut conquérir le maillot à pois de meilleur grimpeur porté par Fredrik Kessiakoff (Astana), lui-même échappé. Mais plus pour bien longtemps.
Cadel Evans en perdition dans Peyresourde, le podium du Tour de France se confirme.
Si la colossale échappée franchit l’Aubisque sans heurts, dans la roue de Thomas Voeckler, le groupe commence à s’effilocher dans la montée du Tourmalet. A mi-ascension, Daniel Martin (Garmin-Sharp) démarre. Seuls Brice Feillu (Saur-Sojasun) et… Thomas Voeckler lui répondent. Les deux Français ne vont pas tarder à sortir l’Irlandais de leurs roues. A 5 kilomètres du haut du Tourmalet, Voeckler et Feillu ne sont plus qu’en tête à tête. Bien qu’on soit encore loin du but et qu’il reste à gravir les cols d’Aspin et de Peyresourde, il apparaît évident que l’étape se jouera entre ces deux-là. Chris-Anker Sörensen (Team Saxo Bank-Tinkoff Bank) et Alexandre Vinokourov (Astana) n’ont pas abdiqué à leur poursuite, mais l’entêtement du duo, qui reviendra à une demi-minute, ne fera que précipiter un démarrage de Thomas Voeckler à 22 kilomètres de l’arrivée, disons davantage 7 kilomètres du sommet de Peyresourde.
Et voilà notre double champion de France reparti dans un numéro dont lui seul a le secret, fendant une foule surchauffée sous le feu d’un soleil de plomb. Maillot grand ouvert, Thomas Voeckler nous gratifie d’un nouveau festival de tics et de grimaces. Mais c’est comme ça qu’il s’exprime quand il se fait mal à la gueule, et tant pis si c’est risible, c’est diablement efficace ! Thomas Voeckler souffle, il tire la langue, il serre les dents, il dodeline de la tête. Tout ça sans transition. Et puis bientôt, il entrevoit entre deux vagues humaines la banderole indiquant le sommet de Peyresourde. Les quatre grands sommets du jour franchis en tête, comme ses héros d’enfance, il ne reste plus au Français qu’à plonger sur Bagnères-de-Luchon pour récolter de nouveaux lauriers et renfiler un maillot à pois qu’il va lui falloir défendre ardemment demain encore.
Au grand coup de show de Voeckler répond un gros coup de chaud de Cadel Evans (BMC Racing Team). L’Australien ne gagnera pas ce Tour 2012. Pas plus qu’il ne grimpera sur le podium. En difficulté au sommet d’Aspin, il est en perdition dans Peyresourde. Ce soir il abandonne 4’47 » et recule au 7ème rang du classement général (à 8’06 »), derrière son coéquipier plus que jamais Maillot Blanc Tejay Van Garderen. Le podium, lui, se confirme dans Peyresourde, où deux attaques de Vincenzo Nibali (Liquigas-Cannondale) contrôlées successivement par Christopher Froome et Bradley Wiggins (Team Sky) à 4 kilomètres du sommet permettent au trio de se dégager et de creuser l’écart sur tous ses suivants au classement général. Si Wiggins possède toujours 2’05 » d’avance sur Froome et 2’23 » sur Nibali, le trou est fait sur les autres. Et Pierre Rolland (Team Europcar) et Thibaut Pinot (FDJ-BigMat) préservent leur place dans le Top 10.
Demain jeudi, la dernière étape de montagne se disputera entre Bagnères-de-Luchon et Peyragudes (143,5 km).
Classement 16ème étape :
1. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar) les 197 km en 5h35’02 » (35,3 km/h)
2. Chris-Anker Sörensen (DAN, Team Saxo Bank-Tinkoff Bank) à 1’40 »
3. Gorka Izaguirre (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 3’22 »
4. Alexandr Vinokurov (KAZ, Astana Pro Team) m.t.
5. Brice Feillu (FRA, Saur-Sojasun) à 3’58 »
6. Jens Voigt (ALL, Radioshack-nissan) à 4’18 »
7. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) à 6’08 »
8. Simone Stortoni (ITA, Lampre-ISD) m.t.
9. Giampaolo Caruso (ITA, Team Katusha) m.t.
10. Laurens Ten-Dam (PBS, Rabobank) à 6’11 »
Classement général :
1. Bradley Wiggins (GBR, Team Sky) en 74h15’32 »
2. Christopher Froome (GBR, Team Sky) à 2’05 »
3. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Cannondale) à 2’23 »
4. Jurgen Van Den Broeck (BEL, Lotto-Belisol) à 5’46 »
5. Haimar Zubeldia (ESP, RadioShack-Nissan) à 7’13 »
6. Tejay Van Garderen (USA, BMC Racing Team) à 7’55 »
7. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) à 8’06 »
8. Janez Brajkovic (SLO, Astana) à 9’09 »
9. Pierre Rolland (FRA, Team Europcar) à 10’10 »
10. Thibaut Pinot (FRA, FDJ-BigMat) à 11’43 »
Classement par points :
1. Peter Sagan (SVQ, Liquigas-Cannondale) 356 pt
2. Andre Greipel (ALL, Lotto-Belisol) 254 pt
3. Matthew Goss (AUS, Orica-GreenEdge) 203 pt
4. Mark Cavendish (GBR, Team Sky) 130 pt
5. Edvald Boasson-Hagen (NOR, Team Sky) 127 pt
6. Bradley Wiggins (GBR, Team Sky) 109 pt
7. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) 100 pt
8. Christopher Froome (GBR, Team Sky) 91 pt
9. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar) 88 pt
10. Daryl Impey (AFS, Orica-GreenEdge) 84 pt
Classement de la montagne :
1. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar) 107 pt
2. Fredrik Kessiakoff (SUE, Astana) 103 pt
3. Chris-Anker Sörensen (DAN, Team Saxo Bank-Tinkoff Bank) 77 pt
4. Pierre Rolland (FRA, Team Europcar) 55 pt
5. Brice Feillu (FRA, Saur-Sojasun) 38 pt
6. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) 34 pt
7. Michele Scarponi (ITA, Lampre-ISD) 33 pt
8. Christopher Froome (GBR, Team Sky) 32 pt
9. Thibaut Pinot (FRA, FDJ-BigMat) 32 pt
10. Jens Voigt (ALL, RadioShack-Nissan) 31 pt
Classement de la combativité :
1. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar)
Classement des jeunes :
1. Tejay Van Garderen (USA, BMC Racing Team) en 74h23’27 »
2. Thibaut Pinot (FRA, FDJ-BigMat) à 3’48 »
3. Steven Kruijswijk (PBS, Rabobank) à 45’26 »
4. Gorka Izaguirre (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 52’49 »
5. Peter Sagan (SVQ, Liquigas-Cannondale) à 54’43 »
6. Rein Taaramae (EST, Cofidis) à 1h01’56 »
7. Rafael Valls (ESP, Vacansoleil-DCM) à 1h03’32 »
8. Davide Malacarne (ITA, Team Europcar) à 1h18’57 »
9. Dominik Nerz (ALL, Liquigas-Cannondale) à 1h19’10 »
10. Edvald Boasson-Hagen (NOR, Team Sky) à 1h26’02 »
Classement par équipes :
1. RadioShack-Nissan (LUX) en 222h58’15 »
2. Team Sky (GBR) à 17’18 »
3. Astana (KAZ) à 28’53 »
4. BMC Racing Team (USA) à 29’13 »
5. Team Europcar (FRA) à 50’03 »
6. Liquigas-Cannondale (ITA) à 56’34 »
7. Movistar Team (ESP) à 59’56 »
8. FDJ-BigMat (FRA) à 1h01’22 »
9. Team Katusha (RUS) à 1h01’31 »
10. Omega Pharma-Quick Step (BEL) à 1h20’04 »