Parce qu’ils avaient laissé tout le monde derrière eux jeudi dans les pentes du col de la Croix de Chaubouret, Michal Kwiatkowski (Etixx-Quick Step) et les leaders de Sky Richie Porte et Geraint Thomas concentraient sur eux toute l’attention alors que Paris-Nice rejoint aujourd’hui la côte méditerranéenne en passant par l’arrière-pays niçois et ses petites routes escarpées. Qui aurait pu imaginer un homme capable d’inverser le cours des choses sur les 184,5 kilomètres séparant Vence de Nice (Alpes-Maritimes) ? Certainement pas Tony Gallopin (Lotto-Soudal), en embuscade au classement général après sa belle montée de la Croix de Chaubouret (7ème), encore que pour réaliser l’exploit signé cet après-midi il aura fallu une grande détermination au talentueux coureur français, ancien Maillot Jaune du Tour. Et un coup de pouce du ciel.
Ceux qui avaient cru avancer vers le soleil en descendant vers le sud ont été bernés. C’est une pluie froide parfois mêlée de grêle qui s’abat sur la course dite au soleil ! Des conditions qu’affectionne Tony Gallopin, qui a choisi cette saison d’abandonner ses prétentions sur les classiques du nord pour se concentrer sur d’autres objectifs dont un Top 10 sur Paris-Nice fait partie. C’est la victoire finale, ni plus ni moins, que le Francilien de 26 ans défendra demain dans le contre-la-montre du col d’Eze ! Cette montée sèche de 9,6 kilomètres reste un obstacle à la victoire finale convoitée ce matin par Michal Kwiatkowski. Le champion du monde, qui n’a jamais gravi le col niçois, a conscience que cette ultime difficulté joue en sa défaveur. Il y deux ans, Porte y avait écrasé ses adversaires pour remporter Paris-Nice, se hissant là-haut en 19’16 ». Cinq coureurs s’en étaient approchés à moins d’une minute, personne à moins de 20 secondes.
Michal Kwiatkowski est donc prévenu, et ce n’est pas un aveu de faiblesse que de considérer son avantage au classement général insuffisant. Parce qu’il a besoin de marge, le Maillot Jaune va donc assaillir en personne ses deux rivaux de Sky. L’étape du jour comprend six difficultés, mais c’est sur les versants descendants qu’il choisit de porter le combat. La route humide dans les descentes de cols réclame des nerfs d’acier. Kwiatkowski et sa garde très rapprochée (Tony Martin et Michal Golas) n’ont pas froid aux yeux. Après une première accélération qui a surpris les Sky dans les lacets de la côte de Coaraze à 70 kilomètres de l’arrivée, ils dévalent comme des motos ceux du col Saint-Roch à 50 kilomètres de Nice. Seul un homme suit l’initiative des trois Etixx-Quick Step : Tony Gallopin, 6ème du général à 38 secondes.
Ensemble, les quatre hommes déterminés rentrent sur ce qui reste d’une échappée matinale d’une trentaine d’hommes au sein de laquelle figure notamment Sylvain Chavanel (IAM Cycling) pour attaquer la côte de Peille (6,6 km à 6,8 %) avec un avantage d’une demi-minute. Mais tandis que Martin et Golas déposent les armes, Michal Kwiatkowski donne brusquement des signes de fatigue. Cela n’échappe pas à Tony Gallopin, qui démarre dans l’ascension à 30 kilomètres de l’arrivée pour échapper au regroupement qui s’effectue derrière lui. Kwiatkowski, qui pensait avoir joué un vilain tour aux Sky, prend soudain un retour de bâton. Attaqué par ses adversaires orgueilleux, le Maillot Jaune ne peut plus suivre. A la bascule à 25 kilomètres de l’arrivée, Tony Gallopin possède 25 secondes d’avance sur ses poursuivants (Costa, Fuglsang, Porte, Spilak, Thomas, Valls). Kwiatkowski à la peine est à 40 secondes.
Mais parce qu’on n’est pas à un rebondissement près dans cette étape époustouflante, voilà que Richie Porte et Geraint Thomas vont glisser l’un après l’autre dans la descente de la côte de Peille ! Le cuissard déchiré pour l’un, le levier de frein tordu pour l’autre, les Sky maudits sont happés par le groupe Kwiatkowski dont ils ne s’échapperont plus. Devant, Tony Gallopin a échappé à toutes ces péripéties… et il en tire bénéfice. Son avantage s’accroît dans la descente du col d’Eze. Sur la Promenade des Anglais, qu’il atteint en triomphateur avec une minute d’avance sur le peloton des favoris, le Français s’en va signer un nouvel exploit après ceux réalisés sur la Clasica San Sebastian 2013 et au Tour de France 2014. Mais c’est une performance d’un autre calibre encore qu’il lui faudra réaliser demain dans le col d’Eze.
En jaune, Tony Gallopin s’attaquera aux 9,6 kilomètres d’ascension avec 36 secondes d’avance sur Richie Porte au classement général. Il lui avait abandonné 1’56 » dans un autre contexte il y a deux ans.
Classement 6ème étape :
1. Tony Gallopin (FRA, Lotto-Soudal) les 184,5 km en 4h52’57 » (37,8 km/h)
2. Simon Spilak (SLO, Team Katusha) à 32 sec.
3. Rui Costa (POR, Lampre-Merida) m.t.
4. Jakob Fuglsang (DAN, Astana) m.t.
5. Rafael Valls (ESP, Lampre-Merida) à 35 sec.
6. Michael Valgren (DAN, Tinkoff-Saxo) à 1’00 »
7. Tim Wellens (BEL, Lotto-Soudal) m.t.
8. Sylvain Chavanel (FRA, IAM Cycling) m.t.
9. Arthur Vichot (FRA, FDJ) m.t.
10. Nicolas Edet (FRA, Cofidis) m.t.
Classement général :
1. Tony Gallopin (FRA, Lotto-Soudal) en 28’49’42 »
2. Richie Porte (AUS, Team Sky) à 36 sec.
3. Michal Kwiatkowski (POL, Etixx-Quick Step) à 37 sec.
4. Geraint Thomas (GBR, Team Sky) à 38 sec.
5. Jakob Fuglsang (DAN, Astana) m.t.
6. Rui Costa (POR, Lampre-Merida) à 42 sec.
7. Simon Spilak (SLO, Team Katusha) à 53 sec.
8. Rafael Valls (ESP, Lampre-Merida) à 1’01 »
9. Gorka Izaguirre (ESP, Movistar Team) à 1’19 »
10. Tim Wellens (BEL, Lotto-Soudal) à 2’00 »