Le circuit de Saint-Omer a donc permis hier à Arnaud Démare (FDJ) d’accrocher au sprint son second titre de champion de France. Mais comment est-il parvenu à ce résultat et surtout comment le Picard et son rival Nacer Bouhanni (Cofidis) se sont-ils retrouvés si « facile » au sprint ?
248 kilomètres à effectuer, seize tours de 15,5 kilomètres avec seulement 121 mètres de D+ à chaque tour. Une petite côte de 1,7 kilomètre à 5 % et une autre plus courte de 1,4 kilomètre à 5,6 %. En gros, pas un parcours pour les grimpeurs qui seront en avant le mois prochain sur le Tour de France. C’est ce qui explique aussi pourquoi certains ont fait l’impasse sur ce championnat afin de mieux préparer l’objectif de juillet qu’est le Tour de France.
En d’autres termes, cela signifiait aussi que la course serait longue, environ six heures pour les premiers. Or ce qui compte sur ces longues épreuves, c’est la gestion. Dès le briefing d’avant-course, la majorité des équipes pensaient à une arrivée au sprint. De ce fait, chaque sprinter maison était protégé et avait toujours avec lui un lieutenant pour le ramener vers l’avant, lui apporter de l’eau, le replacer, etc. Un travail de titan que nous pouvons saluer car pas assez souvent mis en avant. Sans cet homme, les sprinteurs ne seraient certainement pas aussi frais lors de l’emballage final !
Nous avons vu hier que la FDJ et la Cofidis ont tout de suite montré qu’ils étaient là pour leur sprinteur, en tête de peloton sur presque toute la course. Un peu comme sur un Grand Tour où l’équipe du leader régule le tempo. Certes, nous avons eu un groupe d’échappés assez conséquent et bien représenté avec dix-sept coureurs. Mais l’écart a toujours été contrôlé.
Concrètement, sur de telles courses, l’objectif principal des sprinteurs est d’arriver le plus frais possible dans la dernière phase de course et de se faire « déposer » le mieux possible par leur équipe. Sur une telle durée, nous pouvons estimer la dépense énergétique entre 6500 et 7300 calories ! Soit autant qu’une étape de montagne. Vous comprenez mieux pourquoi il est très important de bien se ravitailler tout au long de l’épreuve. Enfin, chaque coup de pédale compte. Ce qui signifie que le moindre effort inutile peut coûter cher sur la fin. Quand votre organisme produit un effort aussi long, chaque économie que vous pouvez lui apporter ne sera que bénéfique.
Jamais, avant les 10 derniers kilomètres, nous n’aurons vu les deux meilleurs sprinteurs français aux avant-postes. En revanche, ces derniers étaient toujours dans les trente premières positions, derrière des coéquipiers. A cette place, ils sont abrités du vent, protégés des chutes ou des différentes tensions du peloton. Mais ces places sont chères et c’est encore une fois le lieutenant qui se bat pour rester là avec son leader dans la roue ! Enfin, une fois les échappés repris, le but est de mener un très gros rythme afin qu’aucune autre échappée ne se forme. C’est ce que nous avons observé avec les équipes FDJ et Cofidis en tête puis sur le dernier kilomètre. Arnaud Démare disposait encore de trois coéquipiers, et Nacer Bouhanni était dans la roue du futur champion de France… alors qu’il avait encore un coéquipier.
Le sprint lancé, les deux sprinteurs de niveau international ont littéralement déposé les autres. C’est à plus de 70 km/h que la victoire s’est jouée ! Pour ce faire, le sprinteur de la FDJ avait choisi un plateau de 55 dents ! Ce qui est bien vu car pour un sprint à 115 tr/min sur un 55×11, vous roulez à 73 km/h ! Quant au sprinteur de la Cofidis, plus explosif, il a pu tout de suite sauter dans la roue mais ne l’a pas débordé !
Pour une course, le choix du matériel est donc précis. Le vélo reste un sport de mécanique où la tendance va de plus en plus vers du matériel pointilleux et des choix de plus en plus techniques ! – Stéphane Cognet