Hier sur la 20ème étape de ce Giro vraiment très indécis, nous avons vu les favoris pour la victoire finale se livrer une vraie guerre des nerfs. En effet, l’ancien porteur du maillot rose a été distancé sur la montée de Foza. Pas la plus importante mais avec ses 14 kilomètres à 6,7% de moyenne, elle a offert un final explosif entres tous ces favoris. Nous allons revenir en chiffres sur chaque acteur et comment ont-ils géré leur montée.
Dès les premiers kilomètres d’ascension, Nibali place le premier vrai démarrage. Il sera suivi par Quintana, Dumoulin sera distancé mais va revenir au train. Pozzovivo et Zakarin vont partir à l’avant. Quintana fait exploser le groupe et cette fois le papillon de Maastricht ne reviendra pas et va faire la montée avec les retardés du groupe. Devant ce sont d’innombrables attaques et contres entres favoris. Une vraie guerre. Et ce jusqu’au sommet et la descente. Malgré tout ils creusent l’écart sur l’ancien porteur du maillot rose et reviennent sur le duo de tête. A partir de ce moment-là, c’est une véritable guerre des nerfs où personne ne veut prendre d’initiative. Mais pourtant ils doivent rouler, s’aider pour creuser un écart maximal sur Dumoulin en vue du CLM du lendemain.
Observons cette progression par à-coups et surtout s’ils avaient tout de suite uni leurs efforts. Nous avons choisi 2 secteurs, le premier sur les 2,5 derniers kilomètres du passo di Foza :
Vincenzo Nibali (Bahrain-Merida) : les 2,5 kilomètres en 6’24 » soit 23,4 km / h
Puissance moyenne de 396W (6.09 W/kg) Force moyenne de 238.8N
Nairo Quintana (Movistar Team) : les 2,5 kilomètres en 6’24 » soit 23,4 km / h
Puissance moyenne de 370W (6.27 W/kg) Force moyenne de 241.8N
Thibaut Pinot (FDJ) : les 2,5 kilomètres en 6’24 » soit 23,4 km / h
Puissance moyenne de 387W (6.14 W/kg) Force moyenne de 234.7N
Tom Dumoulin (Team Sunweb) : les 2,5 kilomètres en 6’35 » soit 22,8 km / h
Puissance moyenne de 322W (4.67 W/kg) Force moyenne de 214.4N
Ce qui intéressant est de voir que Dumoulin comme à son habitude ne s’est pas affolé et a choisi de rester au train. Ses concurrents ont tous produits des attaques et donc des variations de Watts même s’ils ont basculé ensemble. On voit que Quintana a fourni le plus gros effort. Il a pris ses responsabilités de leader afin d’enfoncer le clou sur le Néerlandais. Nibali et Pinot, un peu abrités derrière le scarabée, ont une moyenne de W/kg plus faible. En revanche c’est le Français qui tournera le plus les jambes de ce trio. Il va rester tout le long sur une cadence proche des 90tr/min soit un 39×19, 21 dans les passages plus raides. Du côté de ses rivaux ils oscillent vers 86tr/min soit une dent de moins qui se retranscris par une différence de 25cm à chaque tour de roue. Concrètement cela signifie que Thibaut Pinot va chercher sa puissance en augmentant sa cadence et non sa force. Observez que c’est lui qui a la force pure appliqué sur la pédale la plus faible. Quand à Tom Dumoulin, il n’est pas dans ses performances habituelles. Il est dans un mauvais jour, nous l’avons vu visuellement mais les chiffres concrétisent cette observation. Il est à bout de force et de souffle !
Le second secteur choisi sont les 10 derniers kilomètres de cette étape avec les 20’’ du sprint final :
Vincenzo Nibali (Bahrain-Merida) : les 10 derniers kilomètres en 11’22 » soit 52,8 km / h
Puissance moyenne de 315W (4.84 W/kg) les 20″ du sprint à 669W (10.29 W/kg)
Nairo Quintana (Movistar Team) : les 10 derniers kilomètres en 11’24 » soit 52,7 km / h
Puissance moyenne de 311W (5.27 W/kg) les 20″ du sprint à 609W (10.32W/kg)
Tom Dumoulin (Team Sunweb) : les 10 derniers kilomètres en 11’13 » soit 53,5 km / h
Puissance moyenne de 319W (4.62 W/kg) les 20″ du sprint à 549W (7.95 W/kg)
Nous observons que sur cette portion, le rouleur qu’est Tom Dumoulin était plus à son avantage et à repris 11″ sur ses rivaux. Ceci dit, ces derniers étaient cinq pour la victoire d’étape et se sont observés sur ce final. Ce fût même une vraie guerre des nerfs. Encore une fois c’est le maillot rose qui a fourni le plus gros effort comprenant qu’il fallait conserver voire augmenter l’écart avec le Néerlandais ! Mais le plus incroyable est le fait que derrière Dumoulin assume seul la chasse et si notre quintette de tête avait roulé de concert avec une puissance moyenne estimée de 6W/kg ce qui aurait donné une moyenne proche des 60km/h ! Au final un écart de 1’13’’ ! Mais les faits de course comme toujours prennent le dessus sur la théorie… – Stéphane Cognet