La saison des classiques s’était ouverte sur la côte ligurienne en mars, elle se termine aujourd’hui en Lombardie. La constante de toutes les grandes courses transalpines en 2013, c’est la météo désastreuse. Après un Milan-San Remo dantesque, un Giro neigeux, et un Mondial toscan disputé sous le déluge, c’est la pluie qui marque encore cette édition du Tour de Lombardie et celle-ci sera fatale au grand favori au départ de Bergame : Vincenzo Nibali (Astana). L’Italien espèrait décrocher son premier monument après être passé à côté d’une médaille mondiale la semaine dernière à Florence. Après son Giro victorieux, le Sicilien n’est pas verni sur ses terres. Le Requin de Messine devra quitter le peloton à 90 kilomètres de l’arrivée, victime d’une chute sur les routes de Lombardie rendues glissantes par la pluie automnale.
Michael Albasini (Orica-GreenEdge), Alessandro De Marchi (Cannondale), Fabio Felline (Androni Giocattoli), Reto Hollenstein (IAM Cycling), Carlos-Julian Quintero (Colombia), et Willem Wauters (Vacansoleil-DCM) mettront un temps fou à se dégager du peloton. Après 70 kilomètres, l’échappée matinale est enfin sortie, mais, contrairement au scénario auquel on assiste régulièrement sur les classiques, celle-ci ne bénéficie pas des largesses du peloton. Les six hommes de tête évolueront toujours à moins de 2 minutes du paquet qui veille au grain. Cela ne les empêchera pourtant pas de franchir la première difficulté du parcours, le Valico di Valcava en tête, mais c’est un groupe de vingt coureurs dans lequel on retrouve déjà de sérieux outsiders pour la victoire qui va aborder à l’avant le col de Sormano.
Avec des clients comme Jan Bakelants (RadioShack-Leopard) et Greg Van Avermaet (BMC Racing Team) parmi les échappés, le groupe ne peut pas aller bien loin. Le Team Saxo-Tinkoff ramène le peloton au pied du mur de Sormano, et ses deux kilomètres abominables à près de 16 % de moyenne. Cette difficulté terrible sera grimpée au train, sans à-coup, mais ces rampes diaboliques suffisent à écrémer le peloton. Il faut attendre les tout derniers décamètres pour voir accélérer Nairo-Alexander Quintana (Movistar Team) qui provoque une première sélection avec Alejandro Valverde dans son sillage. Tandis que le nouveau champion du monde, Rui-Alberto Faria Da Costa semble en difficulté au sommet du mur de Sormano, ses coéquipiers font le show à l’avant de la course et se retrouvent en tête. Accompagnés de quelques coureurs, les deux hommes n’insistent pas et le groupe se relève finalement à 60 kilomètres de l’arrivée.
Thomas Voeckler subit le même sort que Vincenzo Nibali, Joaquim Rodriguez copie-colle.
Le tandem de la Movistar juge alors qu’une tentative démarrée à ce moment de la course est forcément vouée à l’échec, précédant Nibali en 2011, oblige. 60 kilomètres de l’arrivée, c’est pourtant là que le show Thomas Voeckler (Team Europcar) va commencer. L’Alsacien part alors seul à l’assaut de la Madonna del Ghisallo. On se dit alors que son coup de poker est complètement insensé, totalement inconscient, mais le coureur de 34 ans nous a habitués à ce genre d’épopées un peu folles, inimaginables, même dans nos rêves les plus fous. Contre toute attente, l’ancien Maillot Jaune du Tour s’envole avec la bénédiction du peloton qui pense alors qu’il lui sera aisé de reprendre le Vendéen d’adoption avant l’ultime difficulté, comme il l’avait fait avec Vincenzo Nibali il y a deux ans.
Et pourtant Voeckler creuse son avance, encore et encore. Grimaçant plus encore qu’à l’accoutumée le double champion de France crée la sensation et ne s’écroule pas dans l’ascension vers la Madonna del Ghisallo, bien au contraire. Au moment où les cloches sonnent pour saluer le passage des coureurs à 46 kilomètres de l’arrivée, le protégé de Jean-René Bernaudeau possède encore 2’49 » d’avance. Il lui reste encore une ascension à affronter, mais surtout une longue vallée qui peut lui être fatale en cas d’organisation du peloton. L’hypothèse se vérifie encore cette année au détriment du Français qui voit son avance fondre sur ces longs kilomètres de plat peu propices à un homme seul. Et c’est avec une trentaine de secondes d’avance que Voeckler entame la montée de la Villa Vergano.
Logiquement, l’Alsacien est repris et l’explication entre favoris peut avoir lieu. Si Thibaut Pinot (FDJ.fr) plante la première banderille, un homme sort très vite du lot : Joaquim Rodriguez (Team Katusha). Le Catalan attaque au même endroit que l’an dernier et bascule avec une poignée de secondes d’avance sur son ennemi intime, Alejandro Valverde. Il reste alors 10 kilomètres, 10 bornes durant lesquelles les deux frères ennemis du cyclisme espagnol vont se livrer à une bataille à distance, mais cette fois, Purito ne perdra pas. Dans la même position que la semaine dernière au Championnat du Monde, Rodriguez va cette fois vivre un dénouement beaucoup plus heureux. Il remporte le Tour de Lombardie pour la deuxième année consécutive, reprend la tête du classement WorldTour et sèche les larmes qui ont coulé sur son visage il y a 7 jours.
Classement :
1. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) en 6h10’18 »
2. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 17 sec.
3. Rafal Majka (POL, Team Saxo-Tinkoff) à 23 sec.
4. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) à 45 sec.
5. Enrico Gasparotto (ITA, Astana) m.t.
6. Daniel Moreno (ESP, Team Katusha) à 55 sec.
7. Pieter Serry (BEL, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
8. Franco Pellizotti (ITA, Androni Giocattoli) m.t.
9. Ivan Santaromita (ITA, BMC Racing Team) m.t.
10. Robert Gesink (PBS, Belkin) m.t.