Avant l’entrée brutale dans les Dolomites demain au cours d’une étape comprenant 5400 mètres de dénivelé, le suspense reste entier sur une course rose qui ne s’est pas encore complètement décantée. En guise d’apéritif à ce menu XXL de montagne où les non-grimpeurs risquent de faire une indigestion de cols, le Giro part à l’assaut des sommets méconnus du Frioul. La 13ème étape permet de faire la transition entre une première partie de semaine destinée aux baroudeurs, aux puncheurs, et aux sprinteurs et un week-end, suivi d’une troisième semaine féroce, où seuls les montagnards pourront se mettre en action. Tous les coureurs attendus pour le classement général sont déjà présents en embuscade derrière Bob Jungels (Etixx-Quick Step) qui doit expérimenter ses limites en haute montagne au cours d’un week-end déjà décisif.
Tous les coureurs ? Pas tout à fait. À la liste des favoris au départ d’Apeldoorn il manque un nom depuis mardi. Celui de Mikel Landa (Team Sky). L’abandon de son leader, vaincu par une gastro-entérite qui l’a affligé au lendemain de la deuxième journée de repos, a poussé l’état-major britannique à revoir complètement ses plans, comme elle l’a trop souvent fait par le passé sur le Giro, parfois même sur le Tour. La tactique du « Tout pour Landa » au général n’ayant pas payé, le staff britannique part à la chasse aux étapes avec les grimpeurs qui étaient supposés épauler le Basque dans sa quête du maillot rose. Parmi eux, il en est un qui s’est toujours montré constant sur les Grands Tours, terminant régulièrement dans les Tops 15 des classements généraux finaux tout en épaulant efficacement ses leaders : Mikel Nieve.
Le Basque sait également se muer en un redoutable chasseur d’étape, ce qu’il était déjà parvenu à faire sur le Giro il y a cinq ans à l’occasion d’une étape mythique, proche de celle qui nous attend demain, à Val di Fassa. Bien que la haute montagne ne soit pas encore au rendez-vous de la course rose aujourd’hui (l’altitude maximum étant de 985 mètres), l’Espagnol saisit l’opportunité qui se présente à lui en prenant une échappée conséquente constituée de près de trente unités où il retrouve Koshevoy, Modolo, Mohoric et Ulissi (Lampre-Merida), Clarke, Dombrowski et Moser (Cannondale), Rojas, Sütterlin et Visconti (Movistar Team), Atapuma et De Marchi (BMC Racing Team), Bole et Cunego (Nippo-Vini Fantini), Malacarne et Zeits (Astana), Van Zyl et Venter (Dimension Data), Battaglin (Team LottoNL-Jumbo), Boaro (Tinkoff), Busato (Wilier Triestina-Southeast), Denifl (IAM Cycling), Henao (Team Sky), et Montaguti (Ag2r La Mondiale).
Bob Jungels lâché, Andrey Amador s’empare du maillot rose
Bien que la lutte fasse rage entre ceux-là et que Stefan Denifl ait joué les éclaireurs pendant une partie de l’étape, les vingt-cinq hommes abordent ensemble l’avant-dernière montée, la Cima Porzus et ses 8,8 kilomètres à 8,2 %. Les Cannondale mettent sur orbite Joe Dombrowski, mais Mikel Nieve sent le danger et colle à la roue de l’Américain. Très vite, la supériorité du coureur espagnol sur son adversaire ne fait aucun doute. Le vainqueur du dernier Tour de l’Utah s’accroche, mais doit se résoudre à laisser filer son adversaire et se fait rejoindre par une partie de ses anciens compagnons dans la descente. Parti à l’assaut de Nieve dans Valle, la dernière difficulté du jour, Giovanni Visconti franchit le sommet avec près d’une minute de retard. C’est beaucoup trop pour inquiéter le petit grimpeur du Team Sky qui sauve le Giro de sa formation en s’imposant à Cividale del Friuli.
On aurait tout aussi bien pu en rester là dans ces montagnes du Frioul, certes difficiles, mais loin d’être aussi exigeantes que les sommets des Dolomites que les coureurs ont déjà en tête. Les favoris auraient pu attendre l’étape de demain pour tester la résistance de Bob Jungels sur les cimes, mais ils le font dès aujourd’hui. Les Astana préparent le terrain dans la Cima Porzus et insistent dans Valle. Cette fois, le Maillot Rose cède du terrain. Alejandro Valverde (Movistar Team) l’a vite compris et dégaine le premier, vite suivi par Vincenzo Nibali (Astana). L’accélération des deux hommes ne provoque pas de différences avec les autres favoris, mais elles accablent le Luxembourgeois qui lutte seul à l’arrière, davantage avec les tripes et la tête qu’avec les jambes, pour défendre comme il le peut le maillot qu’il porte depuis mardi soir.
Comme un symbole, quand le terrain s’aplanit à 7 kilomètres de l’arrivée et qu’il accuse déjà près d’une minute de retard sur les autres favoris, Bob Jungels retrouve le soutien de Gianluca Brambilla. Le coureur italien avait été d’une aide précieuse au représentant du Grand Duché pour prendre possession du maillot rose, n’hésitant pas à sacrifier ses propres chances. Il l’accompagne aujourd’hui jusqu’au bout dans la perte de ce même maillot désiré de tous. Bob Jungels doit abandonner son bien en coupant la ligne 50 secondes après le groupe des favoris, réglé par Vincenzo Nibali qui récupère quatre secondes de bonification, et repasse devant Alejandro Valverde au classement général. Andrey Amador (Movistar Team) qui court après le rose depuis mardi en prend possession à la veille d’une étape qui devrait causer bien des dégâts.
Les 210 kilomètres entre Alpago et Corvara constituent l’étape-reine de cette édition.
Classement 13ème étape :
1. Mikel Nieve (ESP, Team Sky) les 170 km en 4h31’49 »
2. Giovanni Visconti (ITA, Movistar Team) à 43 sec.
3. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) à 1’17 »
4. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) m.t.
5. Rafal Majka (POL, Tinkoff) m.t.
6. Stefan Denifl (AUT, IAM Cycling) m.t.
7. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
8. Rigoberto Uran (COL, Cannondale) m.t.
9. Matteo Montaguti (ITA, Ag2r La Mondiale) m.t.
10. Domenico Pozzovivo (ITA, Ag2r La Mondiale) m.t.
Classement général :
1. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) en 54h05’50 »
2. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) à 26 sec.
3. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) à 41 sec.
4. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 43 sec.
5. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
6. Rafal Majka (POL, Tinkoff) à 1’37 »
7. Ilnur Zakarin (RUS, Team Katusha) à 2’01 »
8. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) à 2’19 »
9. Rigoberto Uran (COL, Cannondale) à 2’48 »
10. Jakob Fuglsang (DAN, Astana) à 3’15 »
Classement par points :
1. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek-Segafredo) 138 pt
2. Arnaud Démare (FRA, FDJ) 119 pt
3. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) 104 pt
4. Sacha Modolo (ITA, Lampre-Merida) 84 pt
5. Maarten Tjallingii (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 83 pt
6. Daniel Oss (ITA, BMC Racing Team) 80 pt
7. Matteo Trentin (ITA, Etixx-Quick Step) 76 pt
8. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) 57 pt
9. Moreno Hofland (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 54 pt
10. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) 52 pt
Classement de la montagne :
1. Damiano Cunego (ITA, Nippo-Vini Fantini) 91 pt
2. Giovanni Visconti (ITA, Movistar Team) 61 pt
3. Stefan Denifl (AUT, IAM Cycling) 54 pt
4. Mikel Nieve (ESP, Team Sky) 50 pt
5. Giulio Ciccone (ITA, Bardiani-CSF) 27 pt
6. Tim Wellens (BEL, Lotto-Soudal) 25 pt
7. Matteo Montaguti (ITA, Ag2r La Mondiale) 20 pt
8. Stefano Pirazzi (ITA, Bardiani-CSF) 18 pt
9. Gianluca Brambilla (ITA, Etixx-Quick Step) 16 pt
10. Alessandro Bisolti (ITA, Nippo-Vini Fantini) 16 pt
Classement des jeunes :
1. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) en 54h06’16 »
2. Davide Formolo (ITA, Cannondale) à 5’49 »
3. Sebastian Henao (COL, Team Sky) à 13’31 »
4. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) à 22’40 »
5. Joe Dombrowski (USA, Cannondale) à 44’20 »
6. Carlos Verona (ESP, Etixx-Quick Step) à 44’25 »
7. Merhawi Kudus (ERY, Dimension Data) à 44’32 »
8. Damien Howson (AUS, Orica-GreenEdge) à 52’14 »
9. Nathan Brown (USA, Cannondale) à 55’25 »
10. Tobias Ludvigsson (SUE, Giant-Alpecin) à 1h04’53 »
Classement par équipes :
1. Movistar Team (ESP) en 162h20’45 »
2. Astana (KAZ) à 7’16 »
3. Cannondale (USA) à 11’52 »
4. Ag2r La Mondiale (FRA) à 14’35 »
5. Etixx-Quick Step (BEL) à 24’56 »
6. Tinkoff (RUS) à 30’24 »
7. Team Katusha (RUS) à 35’00 »
8. Team Sky (GBR) à 40’21 »
9. Dimension Data (AFS) à 49’21 »
10. Lampre-Merida (ITA) à 59’57 »