Ce mercredi-là au sommet de l’Aubisque, Michael Rasmussen avait gagné le Tour de France. Dans l’ultime ascension du Tour 2007, il avait lâché un à un ses plus féroces adversaires dans un style supersonique, gravissant la pente sur une jambe sans jamais donner le sentiment de piocher. C’était le clou d’un spectacle écœurant, le coup de grâce d’un Maillot Jaune controversé depuis les doutes émis sur sa localisation au cours des semaines ayant précédé le Tour. Le grimpeur danois sur le point de remporter la plus grande course du monde avait fui les contrôleurs inopinés au mois de juin en prétextant se préparer au Mexique… lorsque d’autres avaient croisé sa route en Italie, laissant présager des actes illicites. Sous la pression devenue accablante, l’équipe Rabobank avait fini par décider de retirer d’elle-même un Maillot Jaune nauséabond.
Aujourd’hui, Michael Rasmussen en a fini avec le mensonge. Au Danemark, où il a réuni la presse cet après-midi, le coureur de 38 ans a fait une déclaration inattendue : « je vous annonce que je mets aujourd’hui un terme à ma carrière. J’ai choisi de coopérer avec les autorités compétentes en matière de lutte contre le dopage afin d’aider à résoudre la crise la plus grave que notre sport ait jamais connue. La conséquence de ma coopération entraînera une suspension que je suis prêt à recevoir. » Issu du VTT, discipline dont il était devenu champion du monde en 1999, Michael Rasmussen avait fait ses débuts sur la route en 2002 avec Bjarne Riis avant de rejoindre Rabobank la saison suivante. Meilleur grimpeur des Tours de France 2005 et 2006, il se sera adjugé quatre étapes de la Grande Boucle.
Rattrapé par des soupçons de dopage en 2007, abandonné par tous, le Danois avait écopé d’une suspension de deux ans, allant jusqu’à raconter avoir menti sur sa localisation en juin 2007 pour éviter que sa femme ne sache pas qu’il la trompait ! Ces fardeaux, Michael Rasmussen n’en pouvait plus de les porter. Alors il a décidé de libérer sa conscience et d’œuvrer pour le bien du cyclisme. « Je suis bien conscient que j’ai triché, que j’ai menti et que j’ai trompé les gens et les autres coureurs, a-t-il déclaré cet après-midi. Je suis prêt à y remédier. » D’ores et déjà, Michael Rasmussen a offert sa coopération à l’Agence Mondiale Antidopage et aux agences de lutte antidopage danoise, néerlandaise et américaine. Une collaboration qui repose sur un accord de confidentialité, ce pour quoi Rasmussen n’a pu donner davantage de précisions.
Ce qu’on en sait pour l’heure, c’est que l’ancien Maillot Jaune, interrogé par l’agence antidopage danoise, aurait fourni des informations extrêmement utiles sur ses pratiques dopantes et n’aurait pas hésité à dénoncer d’autres coureurs. « J’ai utilisé moi-même des produits dopants et des méthodes interdites entre 1998 et 2010, a-t-il simplement déclaré. J’ai pris de l’EPO, de l’hormone de croissance, de la testostérone, de la DHEA, de l’insuline, de l’IGF-1, de la cortisone et des transfusions sanguines. »
Michael Rasmussen était accompagné aujourd’hui par Claus Hembo, le manager de l’équipe Christina Watches-Onfone avec laquelle il aura terminé sa carrière dans l’anonymat. Et Claus Hembo n’a pas mâché ses mots : « nous croyons que le dopage continue d’être un phénomène largement répandu dans le cyclisme. Nous nourrissions le rêve de créer une grande équipe. Malheureusement nous en sommes venus à la conclusion que notre ambition ne pouvait tenir dans le contexte actuel, où le dopage est encore présent. Aujourd’hui nous voulons prendre les devants sans quoi les choses continueront. Comme Michael Rasmussen, les coureurs qui ont fait partie de ce système doivent parler afin que nous puissions en sortir. La loi du silence doit être brisée une bonne fois pour toutes. »