La guerre n’est pas encore déclarée entre les favoris de la Vuelta, qui devraient repousser l’assaut à la première arrivée en altitude jeudi. Avec d’autres armes que celles qu’ils ont ce matin entre les mains, le Tour d’Espagne ayant jeté l’ancre dans le port de Cadix, où mouille le porte-avions flambant neuf Juan Carlos I, baptisé il y a un an par la reine Sofia. C’est une image rare que de voir le peloton tout entier se présenter sur le pont du navire ce matin. Chaque équipe aura droit à sa photo-souvenir devant un avion de chasse. Les plus hauts gradés du peloton auront même le privilège de s’installer aux commandes de l’appareil pour jouer à Top Gun devant les objectifs. Des images insolites qui témoignent aussi de la détente ambiante en ce début de Tour d’Espagne alors que les choses sérieuses n’ont pas vraiment commencé.
Il y a pourtant un enjeu capital dans cette troisième étape qui part de Cadix pour rejoindre Arcos de la Frontera (197,8 km) après un large détour par les terres andalouses et donc les premiers sommets de cette édition – on grimpera jusqu’à 1100 mètres en dépit d’un départ à hauteur de l’océan Atlantique. L’étape se concluant en côte pour rejoindre les hauteurs du magnifique village blanc perché sur son éperon rocheux, elle doit permettre d’y voir plus clair sur la véritable condition physique de chacun, à commencer forcément par les recalés de juillet, Chris Froome (Team Sky) et Alberto Contador (Tinkoff-Saxo). Ce n’est évidemment pas comparable avec l’effort qu’il leur faudra fournir en haut des cols en seconde partie de semaine, mais il s’agira d’un test important pour deux coureurs qui n’ont plus livré de tels efforts en compétition depuis les arrivées du Tour à Sheffield pour l’un, la Mauselaine pour l’autre.
Cette étape, avec ses quatre ascensions à mi-parcours, c’est aussi à nouveau l’occasion d’aller chercher le maillot blanc à pois bleus de meilleur grimpeur. Peu après le départ, cinq hommes s’y collent : Jérôme Cousin (Team Europcar), Jonathan Fumeaux (IAM Cycling), Luis Mas (Caja Rural-Seguros RGA), Danilo Wyss (BMC Racing Team) et comme hier Jacques Janse-Van Rensburg (MTN-Qhubeka). Et quand les cinq atteignent la zone des puertos, la bataille pour le maillot à pois commence. La tunique est une propriété française quasi exclusive depuis six ans, seul Simon Clarke en 2012 ayant interrompu la chaîne entre les sacres de David Moncoutié et celui de Nicolas Edet. Jérôme Cousin veut y goûter. C’est lui qui confisque les points au sommet des deux premières ascensions, ce qui ne ravit guère l’Espagnol Luis Mas.
Froome et Contador terminent auprès des favoris.
L’avance de l’échappée, montée à 8’05 », étant alors bien retombée, le gain du maillot à pois devient l’unique enjeu des gars de devant. Précédé au sprint dans les deux premières ascensions, Luis Mas n’a qu’une alternative pour s’emparer du maillot des grimpeurs à la faveur des deux escalades suivantes : s’isoler. C’est ce qu’il entreprend dans la troisième difficulté, où son démarrage à 70 kilomètres de l’arrivée surprend les autres échappés. Seul devant dès lors, le coureur de 24 ans n’a plus à se soucier de Jérôme Cousin. Il rafle les points au sommet des deux bosses restantes et s’engage dans un final qui lui sera défavorable. A 20 kilomètres de l’arrivée, il est repris comme les autres avant lui, laissant les favoris se replacer aux avant-postes pour le sprint final en côte dans les rues d’Arcos de la Frontera.
La montée finale sur un peu moins de 2 kilomètres n’exclut pas la présence dans le rush de vrais sprinteurs. Ainsi va-t-on retrouver avec surprise Nacer Bouhanni (FDJ.fr) parmi les hommes forts qui s’élancent dans la bosse d’arrivée. Seulement, si le sprinteur victorieux hier à San Fernando est dans le coup, quand John Degenkolb (Giant-Shimano) et Peter Sagan (Cannondale) semble-t-il mieux taillés pour ce type d’exercice ont renoncé dès le pied, il n’a pas le punch nécessaire pour jouer la gagne (il finira 8ème néanmoins). Un instant d’ailleurs, on croit Giampaolo Caruso (Team Katusha) parti pour échapper au sprint et s’imposer sur une brutale accélération dans le dernier kilomètre, mais l’Italien a présumé de ses forces et il se range avant même d’entrevoir la dernière ligne droite.
C’est Daniel Martin (Garmin-Sharp) qui rentre le premier sur Caruso, mais l’Irlandais a ramené dans sa roue l’Australien Michael Matthews (Orica-GreenEdge), qu’on classe à tort comme un finisseur depuis les deux victoires au sprint qui l’ont révélé l’an dernier sur la Vuelta. Certes, l’ancien champion du monde Espoirs va vite, mais il est aussi très performant dans les bosses de ce genre, 2ème de la Flèche Brabançonne cette saison et vainqueur de l’étape du Mont Cassin sur un Giro dont il a porté six jours le maillot rose. C’est encore de maillot de leader dont il sera question pour lui aujourd’hui. Plus costaud que les autres, Michael Matthews empoche l’étape, 10 secondes de bonification et le leadership. Froome et Contador terminent dans le même paquet auprès d’Evans, Gesink, Kelderman, Moreno, Quintana, Rodriguez, Sanchez et Uran. Valverde, Talansky et Van Den Broeck concèdent 7 secondes sur une micro-cassure.
Demain mardi, la quatrième étape se disputera entre Mairena del Alcor et Cordoue (164,7 km).
Classement 3ème étape :
1. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) les 197,8 km en 5h12’14 » (38,0 km/h)
2. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) m.t.
3. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) m.t.
4. Wilco Kelderman (PBS, Belkin) m.t.
5. Paul Martens (ALL, Belkin) m.t.
6. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) m.t.
7. Lloyd Mondory (FRA, Ag2r La Mondiale) m.t.
8. Nacer Bouhanni (FRA, FDJ.fr) m.t.
9. Daniel Moreno (ESP, Team Katusha) m.t.
10. Christopher Froome (GBR, Team Sky) m.t.
Classement général :
1. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) en 9h27’53 »
2. Nairo Quintana (COL, Movistar Team) à 4 sec.
3. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 11 sec.
4. Rigoberto Uran (COL, Omega Pharma-Quick Step) à 15 sec.
5. Damiano Caruso (ITA, Cannondale) à 17 sec.
6. Johan-Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) m.t.
7. George Bennett (NZL, Cannondale) à 20 sec.
8. Julian Arredondo (COL, Trek Factory Racing) m.t.
9. Haimar Zubeldia (ESP, Trek Factory Racing) m.t.
10. Gianluca Brambilla (ITA, Omega Pharma-Quick Step) à 22 sec.
Classement par points :
1. Nacer Bouhanni (FRA, FDJ.fr) 33 pt
2. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) 29 pt
3. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) 20 pt
4. John Degenkolb (ALL, Giant-Shimano) 20 pt
5. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) 16 pt
6. Roberto Ferrari (ITA, Lampre-Merida) 16 pt
7. Wilco Kelderman (PBS, Belkin) 14 pt
8. Jasper Stuyven (BEL, Trek Factory Racing) 14 pt
9. Lloyd Mondory (FRA, Ag2r La Mondiale) 12 pt
10. Paul Martens (ALL, Belkin) 12 pt
Classement de la montagne :
1. Luis Mas (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 9 pt
2. Jérôme Cousin (FRA, Team Europcar) 9 pt
3. Danilo Wyss (SUI, BMC Racing Team) 6 pt
4. Nathan Haas (AUS, Garmin-Sharp) 3 pt
5. Kristian Sbaragli (ITA, MTN-Qhubeka) 2 pt
6. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) 1 pt
Classement du combiné :
1. Luis Mas (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 114 pt
2. Danilo Wyss (SUI, BMC Racing Team) 145 pt
3. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) 148 pt
Classement par équipes :
1. Belkin (PBS) en 27h55’44 »
2. BMC Racing Team (USA) à 9 sec.
3. Team Sky (GBR) à 22 sec.
4. Team Katusha (RUS) à 26 sec.
5. Omega Pharma-Quick Step (BEL) à 29 sec.
6. Cannondale (ITA) à 31 sec.
7. Astana (KAZ) à 32 sec.
8. Movistar Team (ESP) à 36 sec.
9. Garmin-Sharp (USA) m.t.
10. Ag2r La Mondiale (FRA) à 51 sec.