La célèbre maxime dit qu’un coureur cycliste devient un vrai coureur quand il a terminé le Tour de France. Alors si l’on croit à cette phrase, il convient d’ajouter quelques noms à la liste de « vrais coureurs » depuis dimanche soir et l’arrivée de la Grande Boucle aux Champs-Elysées. Un sentiment incroyable et unique vient de les traverser et la vie de coureur de ces garçons en sera marquée à tout jamais. Quel beau moment pour un cycliste que de remonter la plus grande avenue du monde un soir de juillet et d’en terminer une première fois avec le Tour de France.
« C’est de la satisfaction, raconte Thomas Boudat (Direct Energie) une fois la ligne franchie. J’avais dit à mes parents que j’avais deux rêves dans ma vie, faire les Jeux Olympiques et finir le Tour de France. » Le jeune homme, à 23 ans, a donc réalisé les deux, mais voit déjà plus loin. « C’est la fin de mon premier Tour mais ce n’est que le début de mon aventure. »
Alors bien sûr, courir la plus grande course du monde n’est pas synonyme de trois semaines de pur plaisir. Les moments difficiles, tout le monde en connaît mais les néophytes, en les surmontant, en ressortent grandis. « Je vais retenir qu’il faut garder espoir et se battre. Quand j’étais en galère, je me voyais plus à la maison qu’à Paris » raconte Olivier Le Gac (FDJ), malade et à la limite de l’abandon les premiers jours. Le Breton n’est toutefois pas d’accord à 100 % avec la maxime qui le classe désormais dans la catégorie des vrais coureurs. « C’est peut-être un peu vrai, car quand on dit que l’on est coureur cycliste on nous demande si on fait le Tour. Un Tour classe un coureur mais il y a aussi d’autres belles courses. Toutes les classiques sont des courses vraiment dures. »
Les classiques, ces courses printanières qui font vibrer les amoureux de vélo et toute la Belgique. C’est sur ces épreuves que s’est construit Dimitri Claeys (Cofidis), 30 ans, qui vient de terminer sa première course de trois semaines. « C’était un rêve de faire le Tour et de le finir encore plus. C’était une super expérience. » La découverte de 21 jours de course avec seulement deux journées de repos et la récupération sont bien souvent les interrogations principales, mais le Belge a semblé avoir la caisse suffisante pour tenir jusqu’au bout. « Je ne savais pas comment j’allais réagir après deux semaines mais je suis resté en bonne santé et plutôt frais jusqu’au bout. »
Pour un néophyte, gérer un Grand Tour s’apprend. C’est l’élément principal que retiendra Guillaume Martin (Wanty-Groupe Gobert), animateur de premier plan les quinze premiers jours, avec en point d’orgue une place de 3ème aux Rousses. « J’ai appris à gérer une course de trois semaines sur le plan physique, assure le jeune Français. Je sais qu’il faudra que je revois mon approche l’an prochain pour être un peu plus frais en dernière semaine. Physiquement c’était une découverte de courir trois semaines donc c’est normal que je fatigue. » Car dès le lendemain de sa belle performance jurassienne, le garçon de 24 ans a vécu sa pire journée sur les pentes du Mont du Chat. « C’est normal que tout ne soit pas parfait dès la première fois, précise-t-il. » De quoi lui offrir une belle marge de progression après sa 23ème place au général.
La découverte du Tour de France, c’est aussi connaître la proportion impensable que peut prendre une course cycliste. « Le public dans les cols était impressionnant, remarque Olivier Le Gac. » Pour faire face à cette épreuve gargantuesque, Guillaume Martin a essayé dès le départ de relativiser, en philosophe qu’il est. « Je me disais qu’il fallait que j’essaie de prendre cela comme une course normale et je pense que j’ai réussi à le faire. J’étais dans ma bulle et je faisais mon truc. »
Tous avaient donc le sourire dimanche soir, malgré la grisaille parisienne venue remplacer la chaleur alpestre. Une coupe de champagne pour certains, une bière pour d’autres, le moment était venu de faire la fête et de partager cet instant. « Un de mes meilleurs souvenirs restera le passage sur la ligne des Champs-Elysées, et retrouver mes proches et ma famille, » conclut Thomas Boudat qui se verrait bien franchir cette ligne en vainqueur un jour. Et nul doute que l’expérience acquise ces trois dernières semaines lui sera plus que bénéfique. – Adrien Godard