Chaque mois, Vélo 101 part à la rencontre d’une femme active dans l’univers du cyclisme. Elles sont nombreuses à graviter autour d’une discipline qui n’est plus, depuis longtemps, réservée qu’à la seule gente masculine. Cette rubrique, notre saga de l’année 2010, permet ainsi de mettre en lumière ces femmes impliquées dans le cyclisme. Elles sont championnes ou assistantes, elles sont épouses de coureur ou bien hôtesses, elles sont mamans de champions ou bien élues… Ce mois-ci, rencontre avec Mireille Blain, la maman d’Alexandre Blain, un coureur qui possède la particularité d’avoir poursuivi de longues études en parallèle de sa carrière de coureur. Après deux années chez Cofidis, Alexandre Blain a rejoint cette année l’équipe Endura Racing. Enseignante de champions, Mireille Blain nous raconte son quotidien de maman de coureur pro.
Mireille, vous êtes la maman d’Alexandre. Tout d’abord pouvez-vous vous présenter ?
J’ai été enseignante. J’ai notamment appris à lire à des champions du monde comme Nicolas Vouilloz, Fabien Barel, Nicolas Filippi et mon fils évidemment Alexandre. J’ai un autre fils, Grégory, qui est chercheur en physionomie humaine et sportive, et qui vient de rentrer des Etats-Unis après trois années. Il est maintenant maître de conférences et chercheur à l’université de Lille.
Et d’un point de vue sportif ?
J’ai fait de la course à pied, j’ai été plusieurs fois qualifiée pour les Championnats de France de marathon et de semi-marathon. Je l’ai fait pendant plusieurs années et je continue maintenant pour le plaisir. Mais mon mari et moi continuons à faire du sport : du VTT, de la course à pied, de la randonnée en montagne… Nous restons en contact avec le sport, même pour nous-mêmes.
Alexandre est coureur pro depuis trois ans, l’avez-vous toujours suivi de près ou l’avez-vous laissé autonome dans les structures des clubs ?
Nous l’avons suivi régulièrement. Mais lorsqu’il est arrivé chez Cofidis, nous avons été plus en recul pour ne pas s’immiscer dans sa vie professionnelle. Il est devenu pro et nous l’avons laissé se gérer en pro. Mais jusque-là nous avons toujours été derrière lui.
Naît-on maman de champion ou le devient-on ?
Je crois qu’on naît ainsi ! De tout temps, Alexandre a aimé être devant, que ce soit sur le plan scolaire ou sur le plan sportif. C’est un battant depuis sa naissance. C’est un compétiteur-né.
Le dilemme a dû se poser un jour entre faire du sport à plein temps et poursuivre des études. Comment avez-vous géré cet aspect ?
Nous avons accepté les deux. Alexandre s’est d’ailleurs très bien débrouillé car il a réussi à assumer et assimiler les deux en même temps. Nous n’avons jamais interféré dans cette action. Nous avons toujours voulu qu’il fasse à la fois du sport et des études. Pour nous, c’était compatible et même nécessaire pour son équilibre.
En tant qu’enseignante, vous préconiseriez toujours de maintenir les deux en parallèle : sport et études ?
Tout à fait. C’est une question d’organisation. Il faut absolument garder le sport et les études et non pas l’un ou l’autre, si on en a les possibilités évidemment. Alexandre avait des facilités donc il n’a eu aucun souci pour ça.
Conseilleriez-vous donc à des parents d’élèves d’encourager leur fils ou leur fille à embrasser une carrière sportive de haut niveau ?
Le cas s’est présenté car les parents de Nicolas Vouilloz étaient venus me voir parce que Nicolas voulait arrêter ses études pour se consacrer au vélo. Nous leur avons conseillé de le laisser faire ce qu’il ressentait au fond de lui pour ne pas avoir de regrets. Il a bien fait, la preuve. Si d’autres parents nous demandaient, on leur dirait de ne pas quitter le sport, au contraire, mais plutôt d’encourager cette démarche, d’aider autant que possible.
Quel que soit le niveau, vous pensez donc que le sport est un équilibre avec les études ?
Si l’athlète en a les possibilités, oui, je pense que c’est un équilibre.
Le sport de haut niveau, c’est de l’engagement à 101 %, des prises de risque aussi. En tant que maman, est-ce une source d’inquiétude ?
Oui par rapport à Alexandre s’il n’arrive pas à réaliser ce qu’il avait projeté. Les inquiétudes, c’est toujours par rapport à lui mais pas par rapport à moi. L’hiver dernier, il lui a fallu trouver une autre équipe mais je n’ai pas été inquiète car il a toujours été déterminé et il a continué à s’entraîner. Comme s’il allait trouver une autre équipe. Nous nous sommes accrochés à ça. On s’est dit qu’il voulait aller de l’avant et qu’il trouverait. On a toujours été du côté positif.
Vous avez enseigné à trois champions du monde, Vouilloz, Barel et Filippi, qu’est-ce qui vous a marqué par rapport à ces trois garçons ?
J’ai apprécié qu’ils soient toujours restés modestes. Nous avons toujours eu de bons rapports. Nous étions une petite structure et ils n’ont eu que mon mari et moi pour enseignants dans le primaire. Nous sommes fiers car nous avons fait du sport à l’école régulièrement et ils ont persévéré. Nous avons toujours été fiers de leur modestie. Alexandre, c’est grâce à Nicolas Vouilloz qu’il s’est mis à faire du VTT descente puis du cross-country, du cyclo-cross, de la piste…
Diriez-vous que ces champions, capables de poursuivre leurs études et d’avoir une carrière sportive, ont une forme d’intelligence supérieure aux autres ?
Ce serait présomptueux de dire ça mais peut-être. Alexandre a toujours été précoce dans les études. A 22 ans, il avait déjà un bac+5. Il savait gérer son temps de sport et son temps d’étude, concilier les deux.