Tous les deux jours, Maxime Bouet revient sur son Tour de France. Aujourd’hui, il livre ses impressions sur la première étape du Massif Central. Il revient également sur la vie au sein du peloton. Il évoque enfin la répartition des chambres entre les différents coureurs d’une équipe. Immersion en plein coeur du peloton du 98ème Tour de France.
Maxime, pouvez-vous nous expliquer ce que vous faites pendant toute une journée dans le peloton comme celle d’hier direction Châteauroux par exemple ?
Sur une étape comme celle de vendredi, même s’il y a beaucoup de kilomètres, on ne s’ennuie vraiment pas ! On n’est jamais tranquille à partir du moment où il y a beaucoup de vent. Lorsque l’on regarde la météo le matin et que l’on apprend qu’il va y avoir beaucoup de vent, on sait que cela va être une journée de grand stress. Toute la journée il faut rester placé, il faut faire attention à ne pas tomber. Ce sont des journées de galère avec beaucoup de chutes. On essaye de profiter de chaque trou de souris pour remonter quelques places dans le peloton, tout le monde essaye de passer et cela entraine de nombreuses chutes, des cassures.
Où étiez-vous au moment de la chute de Bradley Wiggins et de Chris Horner et quel est la réaction d’un coureur dans ces moments là ?
J’étais au milieu du peloton. A ce moment là, on ne sait pas qui abandonne. Il faut surtout rester extrêmement vigilant par rapport à la situation de nos Leaders d’équipe. Quand ça tombe, il faut que l’on sache où se trouvent nos Leaders pour pouvoir alerter la voiture pour qu’elle puisse venir dépanner le plus vite possible et apporter le nécessaire : une roue, un vélo, par exemple. Et puis quand on est pris dans la cassure on peut informer le directeur sportif des Leaders des autres équipes qui sont également pris au piège.
Quel genre de discussion pouvez-vous avoir avec les autres coureurs ?
Généralement, on discute de l’étape précédente, et de l’étape du jour, comment on l’envisage, c’est ce genre de discussion là que nous entretenons avec les autres coureurs. On essaye la plupart du temps de rester groupé entre membres d’une même équipe. On reste au contact de nos Leaders pour savoir s’ils ont besoin de bidons ou de quoi que ce soit. Après, il y a des coureurs avec qui je parle d’autres choses que de vélo, comme avec Rémi Pauriol qui a malheureusement abandonné hier et qui est un bon ami. Je m’entends bien avec Remi Di Gregorio également.
Y-a-t-il un langage universel au sein du peloton ?
Disons qu’il y a deux mots que tout le monde utilise. Il y a tout d’abord « service » qui est utilisé pour pouvoir remonter le peloton sans trop de problèmes pour ravitailler nos équipiers. Mais évidemment, quand on arrive dans les 20 derniers kilomètres et que cela frotte énormément, même en criant « service », le coureur n’arrivera pas à remonter. Cependant, c’est très rare d’avoir à remonter des bidons en fin d’étape. Quant à des coureurs qui se sont servis de ce mot pour pouvoir se replacer sans pour autant ravitailler leurs équipiers, ça n’arrive quasiment jamais, j’ai du voir ça une ou deux fois seulement. Le deuxième mot c’est « pisser ». Aujourd’hui par exemple, en début d’étape, c’est ce qui a été crié à l’avant du peloton pour signifier qu’on pouvait laisser partir les hommes échappés, c’est un peu comme une permission.
Avant d’attaquer la montagne, vous forcez-vous à emmener un braquet souple même sur le plat ?
Non, avant d’entrer dans la montagne, c’est surtout la récupération qui est très importante. Après, c’est important de mouliner, évidemment mais sur la route de Super-Besse, je n’étais pas dans une bonne journée alors j’ai emmené un gros braquet pendant toute l’étape, ce n’est pas très bon, c’est une erreur. J’étais aussi très mal placé car j’avais de mauvaises sensations. Très vite, on prend un coup au moral, qui plus avec les conditions météorologiques qui ne sont pas bonnes depuis quelques jours, ça devient vite plus difficile. Dans une journée comme celle-là, l’objectif devient rapidement de s’accrocher le plus longtemps possible dans le peloton.
Cela aide-t-il dans ce cas là l’atmosphère si particulière propre au Tour de France ?
Personnellement, je n’aime pas abandonner, quelle que soit la course. Cette saison, je n’ai pas abandonné une seule course. Mais pour un coureur qui est blessé, qui a mal partout, oui, ça aide forcément à ne pas lâcher, à aller jusqu’au bout.
Y-a-t-il des éléments particuliers qui facilitent la récupération ?
Ce soir par exemple, après une journée compliquée comme celle que j’ai vécue, j’avais envie de me faire masser. Je ne suis pas allé à la cryothérapie mais depuis le départ du Tour, j’y allais tous les jours. Dans l’équipe, on a également des bottes de récupération. Ce sont toutes ces petites choses qui font que l’on va plus ou moins bien récupérer. Il faut aussi penser à bien s’alimenter, bien boire. Dans une journée où je ne me sens pas très bien comme aujourd’hui, il faut continuer à tout faire comme d’habitude, manger, boire, c’est très important.
Aujourd’hui vous n’étiez pas très bien, êtes-vous inquiet pour l’étape de Saint-Flour ?
Inquiet non, je n’irai pas jusqu’à dire ça. Aujourd’hui, je n’étais pas non plus mal au point de terminer dans le grupetto. L’essentiel c’est de s’accrocher même quand on ne se sent pas extrêmement bien, ne pas le faire serait une erreur.
Vous êtes entré dans le Massif Central aujourd’hui, avez-vous fait un bilan avec Sébastien Hinault après son passage en Bretagne ?
Non, on n’en a pas vraiment parlé. Mais je pense qu’il est plutôt content, le bilan n’est vraiment pas mauvais. Après, quand on se retrouve le soir, on essaye de parler d’autres choses, c’est important.
Sébastien Hinault est votre compagnon de chambre sur ce Tour de France, comment se passe la répartition des chambres ?
Habituellement je partage ma chambre avec Nicolas Roche. Mais sur le Tour de France on est neuf et il y en a donc forcément un qui se retrouve dans une chambre seul. Il a préféré prendre cette chambre pour être plus tranquille. Ensuite, il y a Blel Kadri qui est toujours avec Christophe Riblon, Jean-Christophe Péraud est lui souvent avec Hubert Dupont. Tout cela se fait naturellement.
Y-a-t-il toujours des problèmes entre John Gadret et Nicolas Roche après les événements de l’an dernier ?
Non, c’est une erreur que de s’arrêter sur les problèmes qui ont pu être évoqués l’an passé. Ils sont vraiment en bon terme, il n’y a plus de problème, bien au contraire.
Propos recueillis le 9 juillet 2011.