Anthony, vous avez l’un des premiers animateurs du Tour de France. Cette échappée, y avez-vous cru ?
Non. Les RadioShack-Nissan ont toujours contrôlé. On est resté trois-quatre minutes devant le peloton et l’écart n’a jamais évolué. C’était impossible, dans ces conditions, d’aller au bout. J’ai voulu me rabattre sur le maillot à pois. Malheureusement Michael Morkov était quand même plus fort que nous. Du coup, c’est un peu une journée pour rien. Maintenant ça fait toujours plaisir d’être devant sur le Tour.
L’échappée a vite semblé vouée à l’échec, on a vite vu que Morkov était au-dessus sur les grimpeurs, où avez-vous trouvé la motivation ?
Une fois la troisième côte franchie, j’ai compris que je ne serais pas meilleur grimpeur. C’est vrai que c’était peine perdue. Notre avance ne nous permettait pas de croire en nos chances. Mais c’est comme ça. Dans les 30 derniers kilomètres, on a vraiment accéléré et donné tout ce que nous avions. Nous nous sommes bien entendus jusqu’au bout mais nous sommes au Tour de France, c’est un autre monde. Ça roule deux fois plus vite et je savais que nous n’aurions pas la moindre chance quand nous n’avions plus qu’une minute à 15 kilomètres de l’arrivée.
Vous teniez à prendre une grosse échappée dès la première étape de ce Tour ?
L’équipe m’avait demandé de m’échapper et de tenter d’aller chercher le maillot à pois. J’ai fait ce qu’on m’a demandé, j’ai écouté les consignes. C’est toujours bien de s’échapper dans les premières étapes, même si ça ne va quasiment jamais au bout. Souvent, sur les trois-quatre premières étapes, ça part rapidement. C’est ce qui s’est passé cette fois. J’étais placé dès le kilomètre 0, et je n’ai pas raté la bonne.
Qui était le régulateur de l’échappée ?
Il n’y avait pas de vieux coureurs, pas de capitaine d’échappée. Nous nous sommes tous bien entendus, nous nous sommes donné des conseils entre nous.
Vous avez pris du vent ?
Oui, beaucoup de vent. A la fin c’était favorable mais nous avons longtemps eu le vent de côté et de face, ce n’était pas évident.
Cette échappée, c’était finalement plus une galère ou du plaisir ?
Non, on prend toujours du plaisir. Avec les encouragements reçus toute la journée, j’ai pris beaucoup de plaisir à être échappé, même si ça ne va pas au bout. Il y avait beaucoup de public sur tout le parcours, beaucoup d’ambiance.
Une telle escapade, ça débloque la mécanique. C’est plutôt bon pour la suite ?
C’est sûr que c’est bon pour moi comme pour l’équipe. Je n’ai pas pu disputer les grimpeurs ni aller au bout avec l’échappée, mais ça fait toujours du bien d’être représenté dans les premières étapes. Ça met en confiance toute la formation Saur-Sojasun.
Est-ce à dire que l’équipe sera dans les coups tous les jours ?
Non, je ne pense pas. Nous avons quand même un objectif au classement général avec Jérôme Coppel. Nous n’allons pas nous lancer dans tous les coups. Là, c’était particulier car il y avait une chance de prendre le maillot des grimpeurs. Sur des étapes où il n’y aura rien à aller chercher au bout, je ne pense pas que nous aurons l’autorisation de nous échapper.
Quand c’est revenu, vous avez vu passer des avions ?
Oui ! Quand je me suis fait reprendre, je me suis dit que là on était au Tour. Ça n’a plus rien à voir avec les autres courses. Je n’ai pas trop eu le temps de voir qui était devant. J’ai vu un TGV passer, et c’est tout ! Tout ce que j’ai eu le temps de voir, c’est l’équipe Lotto-Belisol qui roulait et Jérôme Coppel placé aux alentours de la 30ème place. Je me suis dit que c’était bon, même s’il était tout seul sur la fin.
Après la course, vous décrassez…
C’est quelque chose que je fais depuis le mois d’avril. Beaucoup d’équipes font ça. Ça fait du bien après l’étape. Nous sommes l’un des rares sports à arrêter directement après l’effort sans jamais faire de décrassage ensuite. On passe la ligne à 190 pulsations et on coupe l’effort aussi net. Ça fait du bien avant le massage de décrasser un peu.
Propos recueillis à Seraing le 1er juillet 2012.