C’est un sujet qui fait encore débat à tous les points de vue : économique, technique, pragmatique, sécuritaire… A l’essai dans les pelotons pros depuis l’été dernier et jusqu’en fin de saison, moment après lequel la fédération internationale choisira de les adopter ou de les rejeter, les freins à disques font crisser des dents.
Peu de coureurs pros ont manifesté un réel emballement pour ce produit issu du VTT et développé depuis quelques années pour le cyclo-cross. Et les plus réfractaires à cette évolution avançaient depuis longtemps les risques encourus en cas de chute. Dimanche à Paris-Roubaix, deux équipes seulement avaient choisi de porter leur expérimentation sur le terrain de l’Enfer du Nord, Direct Energie et Lampre-Merida. Et les chutes qui se sont multipliées sur les pavés nordistes ont fait leur première victime officielle : Francisco-José Ventoso (Movistar Team).
Opéré lundi à Valenciennes d’une profonde entaille du tibia gauche, l’Espagnol confirme aujourd’hui les rumeurs qui couraient sur la possibilité que sa lésion ait été causée par un disque. Il revient dans une lettre ouverte sur les circonstances de sa blessure. « Dans un secteur pavé, il y a eu une grosse chute et des coureurs se sont empilés. J’ai freiné mais je n’ai pas pu éviter le contact avec le coureur qui me précédait et qui essayait lui aussi d’éviter de chuter. Je ne suis pas vraiment tombé, seule ma jambe a touché l’arrière de son vélo. C’est en repartant que j’ai jeté un œil à mon tibia. Je n’avais pas mal, il n’y avait pas tellement de sang, mais je pouvais clairement voir la membrane recouvrant l’os. J’ai été saisi d’effroi, je me suis aussitôt garé et j’ai commencé à me sentir mal. »
Aujourd’hui, Francisco-José Ventoso tire la sonnette d’alarme. « J’ai eu de la chance car ma jambe n’est pas coupée, j’ai seulement un muscle cisaillé. Mais vous imaginez si ce disque avait touché une jugulaire ou une artère fémorale ? Les disques provoquent de graves coupures, ce sont de vraies machettes, faut-il attendre qu’un drame horrible se produise pour prendre des mesures ? Cette évolution n’aurait jamais dû arriver dans le peloton, du moins pas avant qu’on ne la maîtrise clairement. Ça n’a même pas lieu d’être car je n’ai franchement jamais vu un coureur arriver à bout de puissance de freinage à cause de freins traditionnels. »
Au-delà du danger soulevé par le coureur de Movistar depuis sa convalescence, les freins à disques font l’objet de nombreuses critiques, notamment en cas de changement de roues après une crevaison. Ils ajoutent des difficultés supplémentaires aux services d’assistance neutre, faute de standardisation des axes et des dimensions de disques. Récemment interrogé sur la question, le directeur de la communication de Campagnolo Lorenzo Taxis nous rappelait : « le frein à disque reste une expression des constructeurs et la fédération internationale ne pourra pas stopper une telle évolution. Quand le marché va dans une certaine direction, il est difficile d’imaginer l’UCI bloquer cette expansion. L’expérimentation établie par l’UCI permet de voir ce qui va se passer. Mais ce que décideront les professionnels influencera le marché, il en a toujours été ainsi pour chaque produit. »
Faut-il poursuivre l’expérimentation ? Quel regard portez-vous sur le frein à disques ? Réagissez sur la page Facebook de Vélo 101.