Il fut un temps pas si lointain où le Grand Prix Ouest-France se jouait à guichets fermés sur un circuit noir de monde qui symbolisait plus qu’ailleurs la ferveur du public breton pour le sport cycliste. Le temps d’un dimanche, Plouay était rebaptisée capitale du vélo et les coureurs savaient offrir en retour des courses toujours épatantes. C’était avant la savoureuse réception des Championnats du Monde de l’an 2000, juste avant que l’on érige ce boulevard vide d’âme à l’entrée de la commune morbihannaise, qui se substituerait alors à la côte du Lézot pour site d’arrivée. Depuis, le Grand Prix Ouest-France est tombé dans l’escarcelle des routiers-sprinteurs et son circuit devenu trop long il y a cinq ans (19,1 kilomètres) a engendré des courses aux saveurs écornées. Disons-le clairement : on regrette le circuit d’autrefois et son arrivée pour puncheurs…
La longueur importante proposée aujourd’hui (treize tours de circuit soit 248,3 kilomètres, ce qui en fait l’une des courses d’un jour les plus longues du calendrier) ne semble pas pouvoir changer la donne. Il y a un an, les sprinteurs ont repris leurs aises à l’arrivée du Grand Prix Ouest-France, et en dépit d’une participation riche en stars des classiques, il semble que l’épreuve se dirigera à nouveau vers un final de la sorte. Pourtant, les ascensions répétées du Lézot, de Kerihuel et de Ty Marrec sont suffisamment usantes pour provoquer une sélection bien avant le dernier tour de circuit, mais aucune équipe ni aucun favori ne va aujourd’hui juger opportun de précipiter le grand écrémage. Faute d’ambition à la hauteur de la course, le peloton s’accommode de la présence en tête de huit coureurs, partis à la faveur de la deuxième boucle du circuit après 26 kilomètres de course. Ce sera le principal fait de course de la journée.
Les huit attaquants matinaux sont Jack Bobridge (Garmin-Cervélo), Mikaël Chérel (Ag2r La Mondiale), Sébastien Duret (Bretagne-Schuller), Mauro Finetto (Liquigas-Cannondale), Cyril Gautier (Team Europcar), Michal Kwiatkowski (RadioShack), Guillaume Levarlet (Saur-Sojasun) et Marcello Pavarin (Vacansoleil-DCM). Aussitôt, le peloton laisse l’échappée se développer. Il coupe son effort et ne tressaille même pas lorsque le groupe des huit flirte avec les onze minutes d’avance. C’est vrai que la course est longue, mais pour priver les sprinteurs du déboulé final il convient tout de même d’entrer en action assez tôt. Or le peloton retarde l’heure de la grande bagarre et ne gomme que difficilement son retard sur les huit attaquants. Ce petit jeu prend de telles proportions qu’il devient bientôt plausible que l’un des huit de tête s’impose !
A 33 kilomètres du but, c’est d’ailleurs dans ce but que Mauro Finetto et Michal Kwiatkowski choisissent de semer la zizanie au sein du groupe de tête. L’échappée se réduit à ces deux noms mais le ciel se couvre tout doucement sur la tête de course. Agacé par l’apathie de ses adversaires, Thomas Voeckler (Team Europcar) s’agite à l’approche du dernier tour. L’Alsacien se met soudain en tête d’exploiter chacune des dernières ascensions. On le voit ainsi incisif à foison, d’abord dans Ty Marrec, ensuite dans le Lézot, à nouveau dans Kerihuel… Ses coups de boutoir secouent le paquet mais rien n’y fait. Un groupe toujours conséquent se maintient à la poursuite des derniers échappés et l’ultime négociation de la côte de Ty Marrec, à 4 kilomètres de l’arrivée, se présente progressivement tel le juge de paix de cette édition, une fois de plus. Dernier échappé matinal à s’incliner, Michal Kwiatkowski y bute. Il ne signera pas d’exploit.
A 4 kilomètres du but, la course des grands peut enfin commencer. Simon Gerrans (Team Sky) se découvre au cœur de Ty Marrec, entraînant avec lui une poignée d’hommes parmi lesquels Grega Bole (Lampre-ISD). Le Slovène est rapide au sprint mais il profite de cette légère anticipation pour repartir de plus belle et s’engager détaché dans la dernière ligne droite. Du peloton qui fonce sur lui se dégage alors un épatant Thomas Voeckler. Le chouchou du public est sublime en poursuiteur mais il ne parvient pas à rentrer sur le champion de Slovénie, qui conserve juste ce qu’il faut pour franchir la ligne en vainqueur. Grâce à ce joli coup devenu un classique à Plouay, Grega Bole s’impose devant un peloton emmené par Gerrans et Voeckler, deux anciens lauréats du Grand Prix. Il triomphe d’une course durant laquelle l’attentisme aura trop prédominé.
Classement :
1. Grega Bole (SLO, Lampre-ISD) les 248,3 km en 6h32’40 » (37,9 km/h)
2. Simon Gerrans (AUS, Team Sky) m.t.
3. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar) m.t.
4. Thor Hushovd (NOR, Garmin-Cervélo) m.t.
5. Giacomo Nizzolo (ITA, Team Leopard-Trek) m.t.
6. Arnaud Gérard (FRA, FDJ) m.t.
7. José-Joaquin Rojas (ESP, Movistar Team) m.t.
8. Fumiyuki Beppu (JAP, RadioShack) m.t.
9. Julien Simon (FRA, Saur-Sojasun) m.t.
10. Yoann Offredo (FRA, FDJ) m.t.