3 questions à… Tom Boonen (Omega Pharma-Quick Step)
Tom, vos performances récentes dans les classiques vous ont hissé au tableau de tous les records, vous y pensiez avant cette saison ?
Pas vraiment. Ni aux records ni à toutes ces victoires. J’ai travaillé dur pour atteindre mon meilleur niveau pour ces deux ou trois semaines importantes. J’étais déjà heureux d’avoir atteint le niveau que je visais sans incident. Quand j’ai gagné le Grand Prix E3, j’ai su que j’allais être bon pour la suite. Quand j’y repense, c’est fou tout ce qui s’est passé ces deux dernières semaines. Je suis en train de réaliser que je suis peut-être le meilleur coureur du monde sur les classiques pavées. C’est spécial, et ma carrière n’est pas encore finie !
Pour gagner Paris-Roubaix, vous vous êtes cette fois lancé dans un numéro solitaire. Etait-ce ce que vous aviez planifié ?
Pas du tout. Mais quand on a pris la tête puis que Niki Terpstra a lâché, j’ai pensé que j’avais déjà gagné le Tour des Flandres et que je pouvais tenter de gagner mon quatrième Paris-Roubaix d’une manière vraiment différente. J’ai commencé à me battre. Le vent n’était pas vraiment de mon côté mais avec 30 secondes d’avance j’ai pensé que ça allait être aussi dur pour ceux de derrière que pour moi. J’avais seulement peur qu’un coureur comme Pozzato ou Ballan soit plus frais que moi.
A quoi avez-vous pensé durant votre longue escapade solitaire ?
Je ne pensais pas à la victoire et encore moins au record. Je me battais juste contre moi-même. J’ai pris les choses étape par étape, secteur pavé par secteur pavé, kilomètre par kilomètre. Je pense que si vous commencez à penser aux 50 kilomètres qu’il vous reste à faire, vous ne pouvez pas y parvenir. Tout est dans la tête. A partir de mes 30 secondes d’avance, j’ai pensé à grappiller seconde après seconde. Sans me mettre dans le rouge. Sur le vélodrome, j’ai pu apprécier de partager ce succès avec le public. J’ai vraiment savouré mes deux tours de piste. C’est une arrivée tellement spéciale, la seule où vous pouvez profiter du dernier kilomètre avec les spectateurs. C’est une arrivée à la hauteur d’une course comme celle-ci.
Frédéric Guesdon. Quinze ans après sa victoire mémorable dans Paris-Roubaix, Frédéric Guesdon (FDJ-BigMat) a tiré sa révérence hier. Il a malheureusement rejoint le vélodrome quelques secondes trop tard, au moment où tout le monde s’affairait autour du podium, pour que sa 88ème place soit validée. « Je reste sur le coup de la déception, a commenté le Breton de 40 ans, qui ne réalisait visiblement pas encore qu’il en avait fini avec une carrière de dix-huit ans. Quand on rate sa course sur une erreur personnelle, on ne peut s’en prendre qu’à soi. Là ça n’a pas été le cas. C’est tombé devant moi. J’ai été pris dans une chute. Ensuite j’ai crevé sur de la belle route. La poisse s’en est mêlée, je ne méritais pas ça. Je me serais sans doute arrêté sur une autre course. Là je n’avais pas de raisons de le faire. Je ne voulais pas regretter, je me suis reconcentré. Je me suis tout de même fait plaisir sur la fin. J’ai fait le Carrefour de l’Arbre à bloc. »
Sébastien Turgot. Régulièrement placé (10ème du GP E3, 10ème des Trois Jours de La Panne, 8ème du GP de l’Escaut), Sébastien Turgot (Team Europcar) était un garçon à suivre sur Paris-Roubaix. De là à l’attendre sur la deuxième marche du podium, ce que plus aucun Français n’avait réalisé depuis Frédéric Guesdon en 1997, personne n’aurait osé l’imaginer. « Ça fait un petit moment que les sensations sont là, a rappelé le Nantais. Depuis les Flandres tout se passe bien, j’ai fait de petites places même si j’ai manqué de réussite. Je cherchais le déclic, l’équipe me faisait confiance, je savais qu’il ne fallait pas que je me loupe. Quand on a rejoint le groupe sur le vélodrome, je savais que ça allait le faire au sprint. J’ai cassé un rayon dans le dernier virage en frottant la roue de Flecha, ça touchait les patins mais je ne m’en suis plus occupé ! »
Alessandro Ballan. L’autre grand bonhomme des Flandriennes aura été Alessandro Ballan (BMC Racing Team). 3ème du Tour des Flandres après avoir été à l’origine du coup décisif dans le Vieux Quarémont, 3ème de Paris-Roubaix après avoir été vaincu d’un rien au sprint par Sébastien Turgot, l’ancien champion du monde a marqué les esprits et foulé la troisième marche du podium de l’épreuve une troisième fois (après les éditions 2006 et 2008). « Je ne suis pas rapide au sprint et je n’en avais pas l’expérience dans le vélodrome, c’était donc difficile pour moi, a déclaré Ballan. Tom Boonen était tout simplement trop fort. Quand il est parti à 55 kilomètres de l’arrivée, je n’imaginais pas qu’il puisse finir en solo, car nous avions quatre ou cinq coureurs de chez Sky et deux de chez Rabobank dans mon groupe. »
Tom Boonen. Vu à 30 kilomètres de l’arrivée de Paris-Roubaix hier. Sur la route qui le conduisait victorieusement au vélodrome de Roubaix, Tom Boonen (Omega Pharma-Quick Step) a été ravitaillé par son directeur sportif Wilfried Peeters. Il a saisi un bidon, avalé un gel… et jeté son emballage dans la nature nordiste. Un geste méprisable quand, à cet instant-là, sa voiture se tenait juste à ses côtés et à son entière disposition pour récupérer le détritus. Rendre le déchet à son ravitailleur ne lui aurait rien coûté de plus que de s’en débarrasser comme un souillon. Si les bidons font de beaux objets collectors pour les spectateurs, rares sont les déchets qui finissent tels des trophées sur une bibliothèque. Un champion, ce n’est pas qu’un palmarès, ce sont aussi des attitudes et des exemples à montrer…