C’est une vacherie comme le Tour d’Espagne aime en dénicher : une route tracée presque à la verticale dans la sierra del Fraile, entre les pins et une végétation typiquement méditerranéenne. Même à 1100 mètres d’altitude, Xorret de Cati reste sous l’influence de la mer, toute proche, et son mur de 5 kilomètres à 9 % déjà franchi cinq fois par la Vuelta depuis sa découverte en 1998 reste considéré comme un épouvantail par l’ensemble du peloton. Il y avait matière à faire encore des écarts, et si Chris Froome (Team Sky) a bien augmenté son avantage ce soir, les pertes de ses adversaires restent tolérables. Même si en vertu du long contre-la-montre individuel qui se présentera dans dix jours, mieux vaudrait commencer pour eux à inverser cette fâcheuse tendance.
C’était l’idée d’Alberto Contador (Trek-Segafredo), qui lui s’attache à effacer jour après jour l’ardoise andorrane pour revenir au moins dans la course au podium. Il en reste loin à ce stade de la partie, 17ème à 3’10 », mais les montagnes les plus sélectives nous attendent encore. En attendant, le Madrilène rassure toujours. Il aura une fois de plus été le seul à encaisser le démarrage de Chris Froome sur les rampes spectaculaires de Xorret de Cati. Sans compromettre les chances de l’échappée matinale, l’équipe Sky s’était attachée à contrôler la course tout au long d’une journée courue à un rythme élevé pour assurer à Froome la sauvegarde du maillot de leader.
Et quand se dressait enfin la pente de Xorret de Cati, Froome changeait de braquet pour forcer l’allure. Seul Alberto Contador, donc, allait parvenir à suivre le rythme. Mais l’Espagnol n’était pas en mesure de renchérir. Distancé sur le sommet, il recollait néanmoins au début de la descente, puisqu’il restait alors 2900 mètres à parcourir avant de couper la ligne d’arrivée. Froome et Contador unissaient leurs forces mais leurs principaux adversaires (Chaves, Nibali, Aru, Zakarin) n’allaient pas céder plus que 17 secondes à l’arrivée. Les autres (Roche, Van Garderen, De La Cruz, Yates, Woods) lâchaient tout de même 28 secondes.
Voilà donc Froome de plus en plus incontestable dans la peau de leader du classement général, avec 28 secondes d’avance sur Chaves, 41 sur Roche, 53 sur Nibali et 58 sur Van Garderen. Un classement général qui ne concerne désormais plus les Français. Romain Bardet (Ag2r La Mondiale) n’a plus la jambe pour ça. Quant à Warren Barguil (Team Sunweb), il a été sorti du jeu ce matin par sa propre équipe pour mutinerie, lui qui ambitionnait mieux que le rôle qui lui avait été attribué par son staff.
Heureusement, Julian Alaphilippe (Quick-Step Floors) était là aujourd’hui pour redonner du baume au coeur au cyclisme tricolore. Après 30 kilomètres d’une étape qui en comptait 199,5, il s’était glissé dans une échappée de vingt-et-un coureurs avec Buchmann, Majka et Pfingsten (Bora-Hansgrohe), Chernetski et De Vreese (Astana), De Clercq et Monfort (Lotto-Soudal), Niemiec et Polanc (UAE Team Emirates), Bonnafond (Cofidis), Canty (Cannondale-Drapac), Chevrier (Ag2r La Mondiale), Hernandez (Trek-Segafredo), Kreder (Aqua Blue Sport), Losada (Katusha-Alpecin), Novak (Bahrain-Merida), Oliveira (Movistar Team), Olivier (Team Sunweb), Pauwels (Dimension Data) et Vliegen (BMC Racing Team). Le peloton n’avait jamais accordé de marge substantielle aux hommes de tête mais la victoire restait à leur portée alors qu’ils se présentaient devant au pied de l’Alto de Xorret de Cati.
Rafal Majka allait alors se déchaîner tel un beau diable pour tenter de sortir tout le monde de sa roue. Mais Julian Alaphilippe paraissait facile et il ne lui cédait jamais le moindre centimètre. Une fois, deux fois, trois fois, Majka relançait énergiquement la machine sans jamais faire plier le Français. Ainsi les deux hommes basculaient-ils en tête, rejoints dans la courte descente par Jan Polanc. Le sprint allait se tenir à trois mais quel que soit le nombre, Julian Alaphilippe n’était pas prenable aujourd’hui. Et c’est lui qui s’imposait haut la main dans ce final déjà presque mythique.
Demain dimanche, un final quasi identique se présentera aux coureurs de la Vuelta entre Orihuela et Cumbre del Sol (174 km).
Classement 8ème étape :
1. Julian Alaphilippe (FRA, Quick-Step Floors) les 199,5 km en 4h37’55 »
2. Jan Polanc (SLO, UAE Team Emirates) à 2 sec.
3. Rafal Majka (POOL, Bora-Hansgrohe) m.t.
4. Serge Pauwels (BEL, Dimension Data) à 26 sec.
5. Nelson Oliveira (POR, Movistar Team) à 28 sec.
6. Michel Kreder (PBS, Aqua Blue Sport) à 32 sec.
7. Maxime Monfort (BEL, Lotto-Soudal) m.t.
8. Bart De Clercq (BEL, Lotto-Soudal) à 34 sec.
9. Alberto Losada (ESP, Katusha-Alpecin) à 37 sec.
10. Emanuel Buchmann (ALL, Bora-Hansgrohe) à 1’04 »
Classement général :
1. Chris Froome (GBR, Team Sky) en 32h26’13 »
2. Esteban Chaves (COL, Orica-Scott) à 28 sec.
3. Nicolas Roche (IRL, BMC Racing Team) à 41 sec.
4. Vincenzo Nibali (ITA, Bahrain-Merida) à 53 sec.
5. Tejay Van Garderen (USA, BMC Racing Team) à 58 sec.
6. Fabio Aru (ITA, Astana) à 1’06 »
7. David De La Cruz (ESP, Quick-Step Floors) à 1’08 »
8. Adam Yates (GBR, Orica-Scott) à 1’18 »
9. Michael Woods (CAN, Cannondale-Drapac) à 1’41 »
10. Ilnur Zakarin (RUS, Katusha-Alpecin) à 1’57 »
Classement par points :
1. Matteo Trentin (ITA, Quick-Step Floors) 49 pt
2. Pawel Poljanski (POL, Bora-Hansgrohe) 44 pt
3. Matej Mohoric (SLO, UAE Team Emirates) 43 pt
Classement de la montagne :
1. Davide Villella (ITA, Cannondale-Drapac) 38 pt
2. Thomas De Gendt (BEL, Lotto-Soudal) 17 pt
3. Darwin Atapuma (COL, UAE Team Emirates) 12 pt
Classement du combiné :
1. Chris Froome (GBR, Team Sky) 17 pt
2. Jan Polanc (SLO, UAE Team Emirates) 32 pt
3. Esteban Chaves (COL, Orica-Scott) 40 pt
Classement par équipes :
1. Movistar Team (ESP) en 96h40’18 »
2. UAE Team Emirates (UAE) à 35 sec.
3. Astana (KAZ) à 7’12 »