Tobias Halland Johannessen (NOR, 22 ans, UNO-X Pro Cycling Team)

Le bougre vient juste d’intégrer le peloton professionnel, et il le domine déjà ! Vainqueur du Tour de l’Avenir 2021, on savait Tobias Halland Johannessen promis à un grand avenir. Mais on le voyait suivre une trajectoire à la Tobias Foss, son aîné de deux ans, vainqueur de l’antépénultième édition du « Tour de France Espoirs ». Issu, comme Johannessen, de l’excellente école d’UNO-X Norwegian Development Team, l’actuel champion de Norvège avait cédé aux sirènes de l’imposante Jumbo-Visma, acceptant de se mettre à la planche pour ses leaders le temps de faire ses gammes.

En fait, Tobias Halland Johannessen a choisi la trajectoire diamétralement opposée. Signant un contrat de trois ans dans l’équipe mère de la structure norvégienne, uniquement composée de ressortissants nationaux et de danois, le natif de Drobak a choisi de poursuivre le développement de son sens du leadership sans griller d’étapes. En outre, en ce faisant, il récompensait l’excellente formation reçue du côté de Lillehammer, au nord d’Oslo.

Aujourd’hui, force est de constater que l’option sélectionnée s’avère payante. S’il ne foule pas encore les routes du World Tour, Tobias Halland Johannessen a déjà l’occasion de rencontrer ses membres, et de s’y mesurer. Aligné dès le mois de janvier sur le GP la Marseillaise, qu’il a conclu dans le groupe de tête, le frère jumeau d’Anders s’est hissé au sommet des classements une semaine plus tard, à l’occasion de l’Etoile de Bessèges. Troisième à Rousson et à Bessèges, dans des finaux des costauds, il a ensuite surclassé les meilleurs grimpeurs de l’épreuve au Mont Bouquet, remportant le premier bouquet de sa carrière naissante. Le dimanche soir, à Alès, il ne lui manquait que 32 secondes sur le vainqueur du classement général, Benjamin Thomas. 32 secondes qu’il avait bêtement concédées le premier jour, piégé dans une bordure à proximité de Bellegarde. La force d’un cador n’empêche pas les erreurs de jeunesse.

La victoire de Tobias Halland Johannessen, sur la 4e étape de l'Etoile de BessègesLa victoire de Tobias Halland Johannessen, sur la 4e étape de l’Etoile de Bessèges | © Etoile de Bessèges

 

Magnus Sheffield (USA, 19 ans, INEOS-Grenadiers)

Alors lui, on ne l’avait pas vu venir. Pas si tôt, pas si vite. Arraché aux rangs juniors l’hiver dernier par le Team INEOS Grenadiers, il avait évidemment traversé la saison passée dans un anonymat total, bridé par sa jeunesse adolescente (il est né en 2002). Sur la scène internationale, il n’avait intégré qu’une seule fois le top 10 : une 10e place sur les mondiaux Espoirs de contre-la-montre.

Sa première apparition à l’écran des téléviseurs, et sur le radar des suiveurs, remonte simplement au 4 février dernier. Echappée sur la route de Bessèges en compagnie de solides gaillards comme Bruno Armirail ou Thibault Gernalec, l’américain fut finalement le dernier résistant au peloton, englouti par les leaders peu avant le sommet de la dernière difficulté. À son âge, ce fait d’arme méritait d’être signalé.

Mais ce vendredi, Magnus Sheffield a réalisé un exploit de bien plus grande ampleur. Une performance retentissante. Rescapé de l’écrémage des monts andalous, sur la Ruta del Sol, le natif de Pittsford s’est présenté sous la flamme rouge au sein d’un groupe d’une vingtaine de coureurs. C’est à cet instant, sur les pentes des rues de la commune d’Otura, qu’il a choisi de produire son effort pour s’extirper de la masse. Personne ne l’a revu. Pas même Simon Yates, Miguel Angel Lopez ou Alexey Lutsenko, aux palmarès longs comme le bras. Sheffield, lui, n’en avait même pas un pouce. Désormais, sa mainmise se dessine.

Magnus Sheffield a décroché sa toute première victoire professionnelle sur la 3e étape du Tour d'AndalousieMagnus Sheffield a décroché sa toute première victoire professionnelle sur la 3e étape du Tour d’Andalousie | © Team INEOS – Grenadiers 

Carlos Rodriguez (ESP, 19 ans, Team INEOS-Grenadiers)

Si Tobias Halland Johannessen a bien remporté la dernière édition du Tour de l’Avenir, il s’en est fallu de peu pour que Carlos Rodriguez ne le renverse au cours de la dernière étape. Parti à l’assaut dans le col du Petit Saint Bernard, l’Espagnol n’avait cessé d’accroître son avance pour échouer finalement à 7 petites secondes du Norvégien au classement général final. Déçu, le natif d’Almunecar, dans la province de Granada, pouvait toutefois se consoler avec ce bouquet de prestige, au terme d’une saison qui ne pas a pas donné beaucoup d’occasions de briller.

En effet, recruté par le Team INEOS dès l’intersaison 2019-2020, alors qu’il n’avait pas encore 19 ans, Carlos Rodriguez n’avait jamais pu s’accoutumer à la victoire, comme les pépites le font ordinairement dans les rangs Espoirs. Mis au service de ses leaders, il n’avait jamais pu jouer sa carte personnelle jusqu’à la précédente édition de la Ruta del Sol, dont il s’était adjugé la quatrième place du classement général final. Certes, reportée en mai en raison de la pandémie de COVID-19, le plateau de l’épreuve andalouse avait perdu de sa saveur, mais son vainqueur s’appelait tout de même Miguel Angel Lopez.

Cette année, Carlos Rodriguez peut légitimement envisager le podium. Impressionnant de solidité dans les montagnes valenciennes au début du mois de février, il est même parvenu à devancer le monstrueux Remco Evenepoel sur l’étape reine. Et cette semaine, il a aisément gardé le contact des meilleurs, d’Adam Yates à Alexey Lutsenko en passant par Miguel Angel Lopez. Le tout, à tout juste 21 ans. Si le Tour de l’Avenir s’est refusé à lui, le futur lui tend les bras.

Carlos Rodriguez dispute actuellement la Ruta del SolCarlos Rodriguez dispute actuellement la Ruta del Sol | © Team INEOS – Grenadiers 

Paul Penhoët (FRA, 20 ans, Conti Groupama-FDJ)

Il gagne déjà un pécule mais n’est encore pro que par intermittences. En effet, si Paul Penhoët entame sa troisième saison au sein de l’équipe continentale de la Groupama-FDJ (évoluant en troisième division du circuit international), il lui arrive de plus en plus fréquemment de faire des piges au sein de l’écurie mère, lorsque la multiplication des courses oblige Marc Madiot à puiser dans les réserves. L’an dernier, il avait déjà alterné entre les deux niveaux, brillant avec la Conti (3 succès en catégorie 2.) mais échouant à intégrer de top 10 sous le maillot des « grands ». Désigné sprinteur de l’équipe sur le Tour du Poitou-Charentes, à la fin du mois d’août, il avait ainsi déçu, n’arrivant pas à faire mieux qu’une 11e place à Loudun

Cette saison, en revanche, le francilien semble lancé. Titularisé par la Groupama-FDJ dès le Tour d’Oman, la semaine passée, Paul Penhoët a bénéficié d’une partie du train habituel d’Arnaud Démare. Ramon Sinkeldam, Ingnatas Konovalovas ou encore Miles Scotson ont ainsi pu le propulser aux coudes à coudes avec les légendes Cavendish et Ewan. S’il n’est naturellement pas parvenu à les « sauter », le Français a néanmoins enchaîné les accessits, terminant l’épreuve en apothéose, auteur d’une quatrième place à Matrah Corniche. Pourtant, Paul Penhoët s’avoue « resté sur sa faim ». Lucide sur son potentiel, il visait même plus haut, les yeux rivés sur le podium.

Il n’en reste que cette belle semaine a largement nourri sa confiance, comme en témoigne sa fulgurante progression dans les sprints massifs. En outre, Paul Penhoët s’est découvert un atout qu’il ignorait : une certaine aisance face à la pente. 28e du classement final d’une épreuve à fort dénivelé, sur 87 arrivants, l’ancien pensionnaire du CSM Clamart peut nourrir de sérieuses ambitions à l’égard des classiques. L’avenir du sprint, à la Groupama-FDJ, c’est lui.

Paul Penhoët sur le Tour d'OmanPaul Penhoët sur le Tour d’Oman | © Groupama-FDJ

Kevin Vauquelin (FRA, 20 ans, Arkea-Samsic)

« Je ne me pensais pas capable d’être à ce niveau ». Tel fut le verbe de Kevin Vauquelin au terme d’un Tour d’Oman extatique pour le calvadosien. Jusque-là, Kevin Vauquelin se pensait surtout bon rouleur, à l’image de son brillant titre de champion de France Espoirs du contre-la-montre, obtenu en juillet dernier à Lorrez-le-Bocage-Préaux, ou d’une troisième place sur le prologue du Tour de la Paix. Mais jamais il ne s’était pensé capable de grimper si bien, si fort. En août 2021, sur le Tour de l’Avenir, il avait même tenté de perdre du poids pour favoriser son envol dans la montagne. Le résultat fut désastreux (abandon à l’étape 7, après une énorme défaillance la veille).

Après deux piges en tant que stagiaire, Kevin Vauquelin a définitivement intégré le Team Arkea-Samsic cette saison, bénéficiant ainsi du cadre professionnel de l’équipe bretonne. Entrainement, récupération, diététique, tout y est minutieusement étudié, ausculté. La magie du monde pro s’est ainsi convertie en travail concrétisé. A son grand étonnement, le natif de Bayeux s’est découvert des ailes sur le Tour d’Oman. Aérien dans les forts pourcentages, il n’a cessé de se porter à l’attaque, accompagnant ainsi les Fausta Masnada et consorts. 3e à Muscat, 2e au sommet de la Montagne Verte et encore offensif sur la route de Matrah Corniche, le Français a ainsi décroché une splendide 6e place au classement général final de l’épreuve. Plus qu’un exploit, il s’agit d’une véritable délivrance pour le néo-résident de Cagnes-sur-Mer. « Je viens d’entrevoir des possibilités pour l’avenir » confie même l’intéressé à Direct Vélo.

Kevin Vauquelin (au centre) a pleinement contribué à la victoire du Team Arkea Samsic au classement par équipesKevin Vauquelin (au centre) a pleinement contribué à la victoire du Team Arkea Samsic au classement par équipes | © Tour d’Oman

Par Jean-Guillaume Langrognet