Jeremy, 15 ans professionnel chez FDJ et te voilà à nouveau sélectionné pour le Giro, ton 3ème. T’attendais tu à cette sélection ?
Oui, me voilà à nouveau sélectionné pour mon troisième Giro, je m’en doutais car cela avait été évoqué l’hiver dernier car Thibaut avait pour objectif de revenir sur le Giro. Avec deux leaders dans l’équipe, c’est un peu dur de trouver sa place donc je m’attendais à faire le Giro et pas le Tour de France. Chaque leader demande des équipiers différents car Arnaud est sprinter et Thibaut a besoin d’équipiers en haute montagne, donc oui, je m’attendais à cette sélection.
Après tes participations en 2008 et en 2017, qu’attends tu de cette troisième fois ?
J’avais des souvenirs assez douloureux du Giro en 2008, ca roulait vite et il y avait eu quelques déclassements par la suite. D’avoir fait le Giro l’an passé cela m’a fait du bien car j’ai retrouvé une course un peu plus ouverte, en plus il y avait un fil conducteur avec Thibaut qui a été chercher la 4ème place et en lice pour la victoire finale jusqu’au bout. On y repart avec de belles ambitions et j’espère être à la hauteur pour l’accompagner le plus loin possible. C’est mon statut d’équipier qui veut ca et c’est un objectif pour nous tous.
Tu sembles bien préparé avec de nombreux stages. Ce Giro est donc le rendez vous majeur de ta saison ?
Oui nous avons préparé le Giro avec une stage en Sicile sur une semaine, une préparation classique avec 5-6 semaines avant le Giro une bonne coupure, puis une reprise et un travail en moyenne montagne et montagne à 5 coureurs. C’est bien car habitant sur Tours, je manque un peu de cette topologie de terrain et c’est bien de pouvoir rouler en groupe et de pouvoir faire des grandes sorties avec une assistance ravitaillement, mécanique et massage. L’équipe a mis en place un bon stage pour se préparer dans les meilleures conditions possibles.
Tous soudés derrière Thibaut Pinot ? Avez vous déjà ciblé certaines étapes ?
Effectivement, tous derrière Thibaut et même devant Thibaut sur les étapes pour essayer de le protéger, c’est l’objectif affiché autour de lui car il souhaite aller chercher une bonne place au général, cela nous motive. Ce Giro est très difficile avec des arrivées au sommet, ce qui n’est pas pour lui déplaire. Nous n’avons pas ciblé d’étapes en particulier car sur un Grand Tour il faut voir avec la concurrence, la fatigue, les défaillances du moment… La stratégie évolue au fil des étapes. C’est dur de faire du tableau noir sur 3 semaines car en étant des êtres humains, il y a toujours des réajustements à faire.
Au regard de la situation politique en Israel actuellement, les équipes ont elles reçu des consignes particulières à respecter ? As tu quelques appréhensions ?
Quand on a appris que le départ serait en Israël, ça a été une petite surprise, même s’il y avait eu des échos auparavant. c’est la première fois qu’un Grand Tour part en dehors de l’Europe donc en termes de logistique et d’organisation il faut tout prévoir.
C’est vrai que la situation géopolitique étant ce qu’elle est, je pense que beaucoup de choses ont été mises en place sur place pour la sécurité. Pas de consignes particulières mais il y a des zones à risque à éviter, tout le monde est renseigné là-dessus. Il n’y a pas de raison pour que cela se passe mal.
Je pense que l’objectif pour la ville et pour le pays, allié à la création de l’équipe Israel Cycling Academy, c’est justement de promouvoir l’humanité, j’espère que ce sera un « big event » où on pourra passer un beau message au niveau local. Bien entendu il nous faudra respecter les conditions et les cultures locales, comme pour le casher, on s’y pliera il n’y a pas de soucis avec ça.
En mars, tu as participé aux Strade Bianche et au Grand Prix de Larciano, des moments plutôt difficiles pour toi sans véritable récupération entre les deux, même si tu sembles apprécier particulièrement l’Italie. Un plaisir de retrouver quand même les paysages de la péninsule ?
Oui le Strade Bianche c’est une très belle course, c’était ma 2ème participation avec des décors fabuleux ! C’est une région où il fait bon vivre: la gastronomie est super, les hôtels très biens, le public est présent. c’est une atmosphère chaleureuse et c’est avec beaucoup de plaisir que je participe à cette course.
Le GP de Larciano je l’ai découvert cette année, avec une première longue partie relativement facile puis un circuit final escarpé qui permet de faire la différence. J’avais bien mal aux jambes des Strade bianche, je n’ai pas performé plus que ça mais j’avais besoin de courir ce week-end là et j’ai pu aider un peu les jeunes néopros qui débutent en les conseillant. C’est aussi mon rôle d’accompagner.
Tu as annoncé le 23 février dernier que 2018 serait ta dernière année, heureux d’avoir passé toute ta carrière à la FDJ ?
Effectivement, c’est ma dernière saison, je l’avais déjà dans un coin de la tête depuis plusieurs mois. Toute une carrière à la FDJ c’est un beau symbole, symbole de fidélité, de reconnaissance des deux côtés, de confiance. Ce n’est pas anodin de passer toute une carrière dans la même équipe, c’est un signe de stabilité. Je suis fier d’avoir pu faire ça et d’avoir contribué au développement de l’équipe, y compris au contact de l’équipe dirigeante pour faire évoluer certaines choses. C’est la fin d’une histoire, à moi d’en écrire une autre par la suite, différente mais tout autant épanouissante.
Bien qu’il soit trop tôt pour parler reconversion puisqu’il y a encore toute une belle saison à accomplir, as tu déjà quelques pistes ?
Effectivement, je n’ai encore rien décidé. Je compte tester plusieurs options car je n’ai pas encore de projet arrêté. Il y a beaucoup de choses qui m’intéressent, c’est un avantage et un inconvénient. Je me suis même formé à divers métiers dans plusieurs domaines pendant ma carrière cycliste. On verra selon les opportunités. Je n’exclus rien et j’ai envie de m’éclater aussi en reconversion. Ce ne sera pas facile et c’est un choix compliqué mais on verra bien.
Tes parents t’ont toujours soutenu et ton père était dans le milieu cycliste. Que pensent ils de l’arrêt de ta carrière à 34 ans ?
Mes parents respectent totalement ma décision et ils sont, je pense, fiers de ma carrière et savent tous les sacrifices que j’ai pu faire pendant mes études, tant sur Lyon que sur Rennes où j’ai eu des moments difficiles en déplacements et en logistique. Ils m’ont toujours soutenu, y compris dans ma vie de famille qui n’est pas toujours facile à combler avec des enfants qui réclament ma présence donc ils respectent pleinement mon choix et me soutiennent dans mes décisions.
Nous te laissons le mot de la fin et te souhaitons bonne chance pour ce Giro que nous suivrons avec attention !
Je vous invite à nous soutenir sur la chaine L’Equipe pour ce Giro. J’espère qu’on répondra aux attentes suscitées et que nous performerons pour aller atteindre notre objectif avec Thibault et avec l’équipe Groupama-FDJ avec ce podium, voir plus ! Merci à tous et à très bientôt !
Mathilde Duriez, vélo101