Yohann, quel est le premier sentiment qui vous vient à l’esprit au terme de votre premier Tour de France ?
Je suis avant tout content d’avoir bouclé mon premier Tour et aussi content de l’excellent comportement du Team Europcar. Nous avons fait un grand Tour avec l’équipe que nous avions cette année. Tout le monde est heureux, le patron comme le sponsor.
On dit d’un coureur qu’il devient un vrai coureur quand il atteint les Champs-Elysées, est-ce le cas ?
Sûrement. C’est sûr que le Tour de France, c’est important pour un Français. Mais je pense qu’un coureur italien qui arrive à Milan à l’issue du Giro se dit la même chose. J’ai déjà participé à deux Grands Tours mais le Tour de France c’est tout de même particulier.
Vous êtes le premier Antillais à participer et à terminer le Tour, c’est une fierté ?
Oui, c’est sûr, ça fait plaisir. Mais je reste un coureur comme les autres et je ne me suis jamais fixé pour objectif d’être le premier coureur antillais à participer au Tour. Je suis un coureur comme les autres, j’essaie de faire mon travail comme il faut. J’ai essayé d’être au maximum avec Thomas Voeckler tout du long du Tour, c’était ma mission, j’espère l’avoir bien remplie.
Entre la participation d’un Guadeloupéen au Tour et le maillot jaune de Thomas Voeckler, qui a grandi en Martinique, quels échos avez-vous eu des Antilles ?
C’est la fête là-bas. En Guadeloupe les gens sont très contents d’avoir un représentant au Tour de France. C’en est de même pour la Martinique. Le cyclisme antillais progresse, ça fait plaisir, tout le monde est content.
Cela va-t-il donner l’envie aux jeunes Antillais de venir courir en métropole ?
Du moins j’espère que ça leur donnera des envies. Surtout, il y a des jeunes qui ont du talent, j’espère que ça leur donnera l’ambition de venir en métropole pour progresser et se confronter à l’élite.
Honnêtement, auriez-vous rêvé d’un Tour de France tel que celui réalisé par Europcar cette année ?
Non ! Le Grand Départ en Vendée, ça paraît loin maintenant. Nous avions beaucoup de pression parce que c’était chez nous. On avait envie de bien faire. Après, nous ne rêvions pas d’un tel déroulement. Si on nous avait dit que Thomas Voeckler terminerait 4ème après avoir porté dix jours le maillot jaune, que Pierre Rolland finirait Maillot Blanc et vainqueur d’étape à l’Alpe d’Huez, l’une des plus belles, on aurait signé tout de suite.
Qu’est-ce qui a provoqué ce déclic ?
Depuis des années, l’équipe se veut assez soudée. Nous nous considérons vraiment comme une famille. Nous avons perdu de grands coureurs, beaucoup ont pensé que l’équipe serait affaiblie, mais nous avons prouvé que c’était peut-être le contraire. Nous sommes toujours là, des jeunes arrivent et progressent. L’équipe a été pensée un peu différemment cette saison, avec des gars présents pour protéger des leaders. C’est une équipe formidable.
Et si Christophe Kern, épatant dans le Critérium du Dauphiné, avait été là…
Ça aurait été quelque chose d’énorme. Christophe Kern, Thomas Voeckler et Pierre Rolland en montagne, plus Anthony Charteau, vous imaginez…
Qu’avez-vous appris de ce premier Tour de France ?
J’apprends à longueur d’année aux côtés de Thomas Voeckler. Pendant les classiques, je cours avec lui et j’apprends énormément. Sur le Tour, il m’a fallu apprendre à gérer le stress, les moments difficiles, car il y en a eus.
Le maillot jaune jusqu’à Paris, vous y avez cru ?
Plus ça allait et plus on commençait à y croire. L’équipe y croyait chaque jour un peu plus. On se disait que Thomas allait le faire, il nous impressionnait de jour en jour et on se disait pourquoi pas. Je pense qu’il avait le podium dans les jambes, c’est dommage qu’il termine au pied, même si on ne reviendra pas en arrière.
Pédaler pour le Maillot Jaune, ça fait quoi ?
Ça donne des frissons. On sent quand même les pédales mais on se sent porté par le public, qui nous a encouragés tout du long du parcours. C’était une motivation supplémentaire.
Et maintenant, qu’allez-vous faire ?
Je vais prendre du repos, partir un peu en Guadeloupe me ressourcer, voir la famille, puis revenir pour le Tour du Limousin et le Tour du Poitou-Charentes.
Propos recueillis à Paris le 24 juillet 2011.