Vincent, vous célébriez cette année votre vingtième année de présence à la tête d’une équipe, la saison d’Ag2r La Mondiale a-t-elle été à la hauteur de vos espérances ?
Non, nous aurions préféré mieux, notamment en termes de victoires. On sait aussi que ce qui marque le fait qu’une équipe soit reconnue ou pas, ce sont les victoires. Et c’est vraiment ce qui a péché chez nous. Maintenant, tout n’est pas à jeter au panier. Nous avons une équipe qui, globalement, a plutôt bien fonctionné. Malheureusement nous avons été dans l’incapacité de gagner des courses. Ça a été flagrant et c’est pourquoi nous avons travaillé sur le recrutement car nous devons absolument gagner à nouveau.
Qu’est-ce qui a manqué à l’équipe ?
Nos leaders, pour une bonne partie de la saison, n’ont pas été au niveau. Nos sprinteurs n’ont pas gagné. Quand vos leaders ne sont pas tout à fait au niveau et que vos sprinteurs ne gagnent rien, il est plus difficile d’aller demander à d’autres coureurs d’aller signer des exploits. En vue de la saison prochaine, nous avons essayé de travailler là-dessus. Nous avons pris des grimpeurs, des coureurs d’avenir. Nous avons aussi des coureurs en devenir comme Romain Bardet, Blel Kadri, Maxime Bouet… Des garçons perfectibles.
Etes-vous confiant quant aux chances de voir Ag2r La Mondiale figurer encore au WorldTour la saison prochaine ?
Aujourd’hui, oui. Il y a quelques mois c’était plus difficile mais aujourd’hui, oui. Nous avons travaillé pour cela. Nous sommes notamment en train de construire une équipe basée sur la montagne, avec des grimpeurs comme Domenico Pozzovivo et Carlos-Alberto Betancur. J’ignore si Domenico Pozzovivo ira au Tour de France l’an prochain car on sait que pour un Italien le Giro, dont il a pris la 8ème place cette année, est plus important. Nous verrons aussi si nous mettons ou non un pur grimpeur comme le Colombien Carlos-Alberto Betancur.
Le Tour 2013, justement, vous l’avez découvert mercredi à Paris. Qu’en retenez-vous ?
Je crois que ce sera un départ exceptionnel. On a déjà vu beaucoup de belles images, beaucoup d’émotion. Ce territoire merveilleux qu’est la Corse méritait le passage d’une telle édition. La part aux rouleurs sera un peu moins belle que cette année. Ça n’en sera que meilleur car j’ai trouvé le Tour 2012 un peu fade. La montagne sera dynamique, notamment dans la traversée des Alpes. Il y aura de l’indécision jusqu’à la fin puisque l’avant-dernière étape au Semnoz, au-dessus d’Annecy, pourra être décisive. Deux fois l’Alpe d’Huez, ce sera spectaculaire. Et puis pour la 100ème édition il était important que le Tour arrive au sommet d’un col mythique comme le Ventoux.
La semaine dernière, l’Union Cycliste Internationale a rendu son verdict quant à l’affaire Armstrong, approuvez-vous sa décision ?
Bien sûr, la décision de l’UCI a été juste, personne n’aurait compris une autre décision. Même si elle est décriée ou qu’on lui trouve du laxisme dans la lutte antidopage, je trouve que l’UCI reste la fédération la plus active contre le dopage. Si aujourd’hui on découvre encore des tricheurs, c’est qu’il existe des politiques très fortes pour lutter contre le dopage. Ce n’est certes peut-être pas suffisant mais en attendant ça marche. Je crois en l’avenir. Le cyclisme va mieux et je reste optimiste. J’ai vu des choses, ces deux, trois dernières années, de nature à nous rassurer.
Etes-vous moins inquiet qu’il y a quelques saisons en arrière ?
J’avais déjà tout cet espoir il y a quelques années mais c’est vrai que lorsqu’on voit tout ce qu’on a pu lire sur l’organisation du dopage autour d’Armstrong, c’est effrayant ! Ce n’est pas la façon dont je conçois mon sport. Heureusement nous avons dans nos équipes beaucoup de jeunes plein d’avenir. C’est ce en quoi j’ai envie de croire. La pression est plus forte et de ce que l’on ressent sur le terrain, ça va beaucoup mieux. Tout n’est pas fini, il y aura toujours des irréductibles, mais la pression des instances, des contrôles antidopage, des managers, peut finir par décourager les tricheurs.
Quel doit être le rôle d’un manager dans ce contexte ?
Ce qui est important c’est la pérennisation de nos équipes, de nos athlètes. Il y a des vies derrière, il y a des familles. Evidemment qu’un jour je rêve de gagner le Tour de France. Pour le moment ce n’est pas arrivé, et j’en suis encore loin, mais nous avons toujours de jeunes coureurs qui arrivent, qui ont de l’ambition, et il faut pouvoir les soutenir jusqu’au bout.
Propos recueillis à Paris le 24 octobre 2012.