Thomas, après deux années en WorldTour, vous avez rejoint une équipe Continentale, Roubaix Lille Métropole. Pourquoi ce choix ?
Pour moi, c’est une nouvelle aventure. J’essaye de le prendre comme une expérience enrichissante. Je vais découvrir de nouvelles courses. J’avais émis le souhait de revenir en France. La situation était ambiguë avec mon ancienne équipe, Giant-Shimano. J’ai trouvé un accord avec Roubaix qui me paraissait motivant. Les projets de l’équipe à long terme me paraissent aussi très intéressants. Je pars dans l’optique de rebondir. J’ai eu un rôle d’équipier pendant quatre ans et demi. J’aimerais m’affirmer et avoir plus de liberté sur les courses vallonnées et accidentées. Je pourrai aussi apporter mon expérience à l’équipe. J’étais dans la meilleure équipe au monde au niveau du sprint. J’ai beaucoup appris. J’ai compris beaucoup de choses et je peux les apporter ici. Un bon sprinteur ne peut gagner qu’avec une bonne équipe. Ce ne sont pas forcément les meilleurs coureurs. C’est simplement une très bonne organisation.
Peut-on dire que c’est reculer pour mieux sauter ?
Non, il faut rester positif et voir le bon côté des choses. En restant en WorldTour, je serai resté dans un rôle d’équipier. Ici, j’aurai ma propre chance. C’est une chance pour moi. J’aurais certes préféré retrouver une équipe de Continentale Pro pour pouvoir courir des épreuves comme Paris-Nice ou le Dauphiné. Ce sont des courses qui vont passer près de chez moi, ce sera difficile de les voir à la maison. Mais je ne prends pas du tout cela comme un retour en arrière.
Aviez-vous d’autres contacts ?
On connaît la conjoncture. Beaucoup de coureurs vont se retrouver au chômage. Il y a eu des mésententes avec mon équipe. Mon agent a travaillé, il y a eu de bonnes pistes. Roubaix m’a fait une offre. Je ne pouvais pas attendre et j’ai saisi cette opportunité.
Les mésententes avec Giant-Shimano étaient de quel ordre ?
L’équipe avait besoin de dégraisser et j’étais en fin de contrat. Il n’y a pas eu de contact, nous n’avons pas discuté. Je suis parti de moi-même. J’avais besoin de sécuriser mon avenir. Il y a aussi eu quelques problèmes en interne. A mes yeux, tout n’était pas assez professionnel pour une équipe WorldTour. C’est dommage, car il y avait une belle ambiance avec les autres coureurs et le staff. J’ai beaucoup aimé cette expérience et je retiens beaucoup de positif. Mais j’avais besoin de changement. Je voulais reprendre du plaisir dans mon métier, ce qui n’était plus forcément le cas à la fin.
Dans quelle mesure transmettez-vous votre expérience aux jeunes sprinteurs de l’équipe ?
Je n’ai que 25 ans et je fais aussi partie des jeunes de l’équipe (il rit). Les coureurs me posent des questions sur la nutrition, sur les entraînements. J’ai essayé de les pousser à s’entraîner de manière différente. C’est-à-dire mieux gérer les entraînements : rouler moins vite lors de l’endurance, mais faire les exercices à 100 %. A l’entraînement, on n’est pas là pour se tester par rapport aux autres. C’est individuel. Il faut se comparer qu’à soi même.
Et on imagine que les jeunes sprinteurs comme Rudy Barbier ou Timothy Dupont sont à l’écoute d’un coureur qui a côtoyé Marcel Kittel et John Degenkolb.
Ils essayent de s’inspirer de ces coureurs, c’est normal. Je pense que Marcel Kittel est le meilleur sprinteur à l’heure actuelle en vitesse pure. Pour eux, ce sont des exemples. Je leur ai par exemple dit que jamais on ne faisait de sorties à 30 de moyenne, mais plutôt à 28. Ils ont essayé d’en tenir compte. On verra les choses concrètes en course quand il s’agira de s’organiser, de prendre les bonnes dispositions, notamment de savoir qui sprintera. J’espère avoir une bonne influence à ce niveau-là.
Qu’est-ce que l’équipe attend de vous ?
L’équipe m’a demandé de gagner des courses. Je vais m’attacher à réaliser cet objectif. Ils m’ont demandé d’apporter mon expérience pour les sprints, pour les jeunes, sur le vélo et en dehors. C’est à dire bien se comporter en tant que sportif de haut niveau en ce qui concerne la nutrition, le sommeil, aux entraînements. J’ai envie d’apporter cette pierre à l’édifice.
Vous avez terminé 3ème du GP La Marseillaise il y a deux ans, c’est là que vous reprendrez ?
Oui, j’irai à La Marseillaise puis à Bessèges. Si le Tour Med n’avait pas lieu, ça ferait un trou béant dans le calendrier de beaucoup d’équipes jusqu’au Tour du Haut Var. Ensuite, comme je ne serai pas sur les classiques belges, j’ai une période d’entraînement pour reprendre à Paris-Troyes et être performant sur les Coupes de France comme la Classic Loire-Atlantique ou Cholet-Pays de Loire. Il y a ensuite un point d’interrogation. Nous ferons la Classica Corsica mais pas le Critérium International. C’est dommage, mais ça va nous renforcer dans l’idée de montrer à ASO que nous avons notre place. Mon fil rouge reste la Coupe de France et les courses par étapes accidentées. Je suis aussi plus performant dans la période estivale. J’attends début mars puisque je serai enfin libéré de mes problèmes de posture que je traîne depuis pas mal de temps.
L’équipe veut monter en deuxième division la saison prochaine. Dans quelle mesure pensez-vous faire partie de ce projet ?
J’espère déjà participer à sa construction. Le président Jean-Charles Canone s’est engagé à le faire. Je crois vraiment qu’il en a les capacités. Sportivement, on se doit d’être sur le terrain pour montrer que l’on a notre place en Continentale Pro. Passer en deuxième division, c’est primordial pour l’avenir de l’équipe. Avec la réforme du WorldTour, les équipes continentales ont tout intérêt à passer en Continentale Pro. Je suis optimiste pour l’évolution de l’équipe. Le groupe est intéressant.
Propos recueillis à Lomme le 26 janvier 2015.