Thierry, Thibaut Pinot a remporté une étape du Tour de France, dont il est le plus jeune participant. C’est une surprise ?
Très sincèrement non car nous connaissions son potentiel et savions qu’il a beaucoup de talent. On ne l’a pas mis non plus par hasard sur le Tour. Nous avions confiance en lui, même si on pensait que c’était un peu tôt pour qu’il fasse trois semaines au plus haut niveau. Il est bourré de talent, il a toujours envie d’aller de l’avant, ce qu’il a démontré est phénoménal.
Avez-vous douté de sa capacité à aller au bout ?
On ne doutait pas spécialement. On savait que ça allait être juste pour aller gagner puisqu’à partir du moment où les principaux leaders s’expliquaient entre eux ça allait revenir assez vite. Mais nous savions qu’il avait une petite marge de sécurité et surtout beaucoup de talent, qu’il n’allait pas lâcher comme ça. A 5 kilomètres de l’arrivée on y croyait davantage, à 4 encore plus, et sous la flamme rouge on savait que c’était gagné.
Il n’avait pas réussi à faire l’étape dont il rêvait samedi à la Planche des Belles Filles, son attaque vers Porrentruy était-elle motivée par l’esprit de revanche ?
Il espérait peut-être faire mieux à la Planche des Belles Filles mais il n’était pas forcément super et il s’était mis beaucoup de pression, étant chez lui, devant beaucoup de supporters qui l’attendaient. Thibaut avait l’habitude de faire ce final à l’entraînement, mais là il n’avait plus les mêmes repères en course. Il n’était pas spécialement dans une grande journée mais il s’est lâché vers Porrentruy pour réaliser un grand numéro.
Quelle valeur à cette étape pour lui et l’équipe ?
D’abord Thibaut était un petit peu chez lui puisqu’il est né juste de l’autre côté de la frontière. Il gagne une étape qui sera sans doute l’une des plus difficiles que nous rencontrerons sur ce Tour. Pour nous, c’est énorme. Il savait ce qu’il avait à faire, il l’a fait de façon magistrale, et pour nous il n’y a rien de plus magnifique.
Pour une équipe française, c’est un soulagement que de gagner une étape sur le Tour ?
Toute équipe présente sur le Tour a besoin d’aller chercher un résultat et de gagner. C’est la finalité du sport de haut niveau. Mais pour nous ça valide sutout le travail que fait l’équipe autour des jeunes, que nous essayons d’amener au plus haut niveau. C’est un pur bonheur.
Thibaut Pinot disait avoir enfreint les consignes. Pourquoi ne lui était-il pas permis de s’échapper sur une telle étape ?
Ça faisait plusieurs jours qu’on le freinait parce que trois semaines, c’est long. Mais lui n’avait envie que d’une chose, c’était d’être devant et de gagner une étape. A la première occasion qu’il a eue, il l’a fait !
Gagner comme il l’a fait, c’est sa marque de fabrique ?
C’est en tout cas exactement sa façon de concevoir le vélo. Etre offensif, aller de l’avant. Dans les cols, dans la haute montagne, devant beaucoup de public. Et faire un numéro dans le final. C’est comme ça qu’il conçoit le vélo. Aller chercher la victoire comme il l’a fait c’est royal.
Est-ce un futur coureur de Tour ?
Ça c’est évident, et c’est pour ça que nous ne voulions pas le mettre dès cette année au Tour. Quand il met les pieds sur une course de trois semaines, on sait que c’est pour jouer le classement général. Quand on est grimpeur comme lui on peut se le permettre. Thibaut est précoce dans tout ce qu’il fait, il l’a encore montré, et je pense que ce n’est que le début d’une longue carrière.
Propos recueillis à Porrentruy le 9 juillet 2012.