Steve, nous vous avons retrouvé lors de la 3ème manche de Coupe du Monde de cyclo-cross à Coxyde en civil et non en coursier. Pourquoi ?
En plus d’être coureur cycliste, je suis le mari de Lucie. Elle avait besoin de quelqu’un pour l’intendance mécanique et je l’ai fait avec plaisir. Comme cela ne bouleversait pas mon programme d’entraînement et de course… J’étais donc un homme de coureuse pour le coup. En fait, je n’ai pas participé à la Coupe du Monde, car ma priorité est maintenant la route. Au sein de l’équipe Ag2r La Mondiale, j’ai un rôle important à jouer sur les classiques. Cela se prépare assez tôt dans la saison. J’avais tendance à laisser beaucoup de jus l’hiver. Maintenant, je ne fais des cyclo-cross que pour m’entretenir et améliorer la condition. C’est fini de me prendre la tête sur les Coupes du Monde ou sur les manches de SuperPrestige comme j’ai pu le faire par le passé.
N’avez-vous pas un petit pincement au cœur quand vous revenez sur de tels événements ?
Honnêtement, oui. Quand je suis arrivé à Coxyde, je serai bien allé faire un tour, juste pour le plaisir de rouler dans le sable. On ne vient qu’une fois dans l’année à Coxyde et c’est la seule fois où l’on peut se faire plaisir techniquement. Mais c’est tout. Quand on n’est pas bien physiquement, que l’on a un ou deux kilos de trop et que l’on n’a pas l’entraînement adéquat, ça ne vaut pas la peine de prendre le départ pour une 45ème place. Ce n’est pas dans mon intérêt et je n’ai pas envie de ça. Je ferai juste la fin de saison avec le Championnat de France en point de mire, mais ce ne sera qu’en préparation pour la route. Ça a toujours été plus ou moins le cas, mais maintenant, je ne me prends plus la tête.
Pourquoi ce choix ?
C’est un pur choix de ma part. Je me sens très bien chez Ag2r La Mondiale. J’espère faire un bon bout de chemin avec eux. Je sais mettre mes ambitions personnelles et ma passion sur le côté pour le bien de l’équipe. J’ai capté leurs envies. Ce n’est pas obtenir une 4ème ou une 6ème place en Coupe du Monde, mais aller chercher une belle place d’honneur sur les classiques. Pour ça, il faut faire un choix et pour moi, ça a été d’arrêter le cyclo-cross. Je n’ai participé qu’à sept ou huit cyclo-cross cette saison, dont deux qui étaient vraiment importants à mes yeux : celui de Plougasnou et celui de Saint-Etienne-les-Remiremont, chez moi, dans la foulée de la route. C’était mon seul objectif de l’hiver, je ne l’ai malheureusement pas rempli puisque je termine 2ème. Maintenant, place au plaisir et à l’entretien physique.
Cette décision est progressive puisque déjà l’an dernier vous sembliez mettre le cyclo-cross entre parenthèses.
Oui, j’ai voulu me concentrer sur les manches de Challenge National, même si j’ai continué à faire les Coupes du Monde. C’est là que ça a été dur à encaisser. Quand on arrive sur ces manches-là, sans être prêt, on se bat pour rentrer dans les 20 premiers alors que l’on se battait pour le Top 10, voire le Top 5 avant. C’était très difficile dans la tête. Cette année, je n’ai plus envie d’être touché quand je rentre d’une Coupe du Monde, et donc je ne les fais pas. Je garde toute mon envie, toute mon énergie et toute ma détermination pour les classiques. Cela ne peut être que bénéfique.
Les arrivées de Sébastien Turgot et Damien Gaudin changent-elles quelque chose à votre rôle ?
Ils ont été recrutés pour les classiques, c’est vrai. Mais sur les vraies Flandriennes comme le Tour des Flandres ou le GP E3, je n’ai rien à leur envier. Je suis quelqu’un de plus léger et je passe donc mieux les monts. J’espère que l’équipe s’en rendra compte, même si Damien et Seb sont très costauds. C’est très bien que l’on soit un groupe homogène, mais je ne compte pas laisser ma place de leader si facilement ! Lloyd Mondory et Sébastien Minard peuvent aussi jouer un rôle important. Ce sera aussi à celui qui aura les meilleures jambes le jour J. Il est évident que sur une course comme Paris-Roubaix où ils ont déjà fait des places (2ème en 2012 pour Sébastien Turgot, 5ème en 2013 pour Damien Gaudin NDLR), je n’hésiterai pas à me mettre à leur service. Mais avec ce que j’ai déjà démontré sur les autres Flandriennes, avec un peu plus de réussite, je peux faire partie des premiers Français, même si ce n’est pas une fin en soi.
Que vous manque-t-il sur ce genre d’épreuves ?
Je manque le Top 20 de justesse aux Flandres, je fais 16ème à Roubaix, et je fais une place aussi à A travers la Flandre. J’ai été constant, mais je n’ai pas eu la petite étincelle. C’est pour 2014. Je vais tout faire pour réussir. Je suis dans une phase où je suis en pleine maturité, puisque j’ai fêté mes 30 ans en septembre. Même si j’ai déjà fait quelques belles courses, il est grand temps d’aller chercher un énorme accessit.
Quelles courses ciblerez-vous ?
Pour moi, il existe sept classiques hyper importantes. Cela commence dès le Het Nieuwsblad. Il y a ensuite Milan-San Remo, A travers la Flandre, le GP E3, Gand-Wevelgem, le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. Ce sont les courses sur lesquelles j’ai vraiment envie de marcher, où je sais que j’ai les capacités de rentrer dans le Top 10, voire mieux. Matthieu Ladagnous (6ème de Gand-Wevelgem et 5ème du Tour des Flandres cette saison NDLR) a montré cette année que c’était possible. Tout en étant bien physiquement, Matthieu a su saisir la chance qu’il avait. Il a su avoir ce petit grain de folie et a pu compter sur une belle pointe de vitesse. Je n’ai rien à lui envier. J’espère au moins faire aussi bien que ce qu’il a fait. J’espère aussi que l’équipe se rend compte que j’ai cette ambition.
Êtes-vous candidat pour épauler vos leaders pour le classement général sur le Tour de France, lors de l’étape d’Arenberg ?
J’espère ! On est pas mal dans l’équipe à prétendre pouvoir apporter notre expérience dans ce domaine. On sait que le Tour de France est une course très importante pour les sponsors et particulièrement pour l’équipe où on vise le classement général. Il faudra être au service de ses leaders et j’espère faire partie de ces équipiers-là. Mais le Tour de France, c’est encore loin. Malheureusement, je n’ai jamais eu la chance ni le physique pour terminer un Grand Tour. J’étais en bonne position pour terminer la Vuelta cette année, et il y a eu cette étape dantesque où j’ai été pris d’hypothermie. Je n’ai pas de garanties sur trois semaines, mais j’espère que l’équipe pourra faire la part des choses. Ce sera une étape assez rapide en première semaine du Tour et je peux apporter mon expérience. C’est clair !
Propos recueillis à Coxyde le 23 novembre 2013.