Stéphane, on aura vu l’équipe Sojasun aux avant-postes du Tour de France jusqu’au bout…
Samedi, nous avions deux coureurs qui avaient encore un peu de fraîcheur, Alexis Vuillermoz et Julien Simon. Maintenant, à partir du moment où Movistar avait mis en route derrière, il était compliqué d’imaginer une issue favorable. On savait que ça allait être une étape pour les cadors, une nouvelle fois. Mais il reste toujours important de se positionner, d’être aux avant-postes dans ce genre d’étape. Un garçon comme Alexis a le moteur, seule l’expérience pouvait lui faire défaut, mais il a été à la hauteur durant ces trois semaines. Ça lui servira comme ça a servi à Anthony Delaplace.
L’équipe Sojasun a achevé son troisième Tour de France. Et même si la victoire d’étape vous fait encore défaut, bien que vous vous en soyez rapprochés, sur quel sentiment restez-vous ?
Je pense que nous avons vraiment été à la hauteur de nos aspirations. Nous étions venus sur le Tour dans le but d’être offensifs, opportunistes. Nous avons manqué de réussite, plus que de chance à laquelle je crois très peu. A Ajaccio le maillot jaune nous a échappé en raison d’un peu d’inexpérience mais aussi d’un manque de confiance. Nous avions suffisamment de monde pour faire l’effort à la rupture pour aller chercher Bakelants. Nous n’avons pas osé le faire et c’est dommage car ça aurait été fantastique de traverser la Méditerranée avec le maillot jaune.
Ce maillot, il concernait Julien Simon, à qui il n’a pas manqué grand-chose à Lyon pour accrocher une victoire d’étape ?
Oui, mais là nous n’avons aucun regret à avoir. Ce jour-là Julien a fait tout ce qu’il devait faire. S’il avait attaqué un peu moins violemment, peut-être aurait-il pu emmener avec lui Tejay Van Garderen. Et il aurait été plus facile pour lui de gérer le final.
Néanmoins, on voit année après année l’équipe franchir un cap. Le prochain, ce sera forcément la victoire d’étape ?
On l’espère ! L’hiver dernier on nous a souvent reproché de ne pas avoir de leader. Pour moi, un leader, c’est Froome, Quintana, Contador ou Rodriguez… Des coureurs capables de faire un Top 5 sur le Tour de France. Monter une stratégie autour de quelqu’un qui peut faire dans les quinze premiers est bloquante pour le reste du groupe. Avoir une ouverture sur la course comme ce fut le cas nous correspondait bien mieux.
A propos de collectif, ne pensez-vous pas qu’il faudrait mieux valoriser le classement par équipes ?
On ne peut pas courir tous les lièvres à la fois. Le classement par équipes est bien établi. Il reflète une vraie valeur dans le sens où ce sont les trois meilleurs coureurs de l’équipe, chaque jour, qui l’alimentent. En ce qui nous concerne, on a fait avec nos moyens. L’importance c’est surtout de savoir ce qu’on a sous le pied et de ne pas se tromper d’objectif.
Chris Froome a gagné le Tour de France. Pensez-vous que nous soyons partis pour une longue domination de sa part ?
Je ne sais pas. Je vois qu’il y a de la relève derrière, à la fois sur le plan international ou français. Nairo Quintana n’a que 23 ans, Romain Bardet passe des échelons, même si encore une fois n’allons pas trop vite en besogne. On l’a vu avec Thibaut Pinot. Ce sont des équilibres fragiles, des coureurs très jeunes, il ne faut pas leur mettre trop vite une pression démentielle sur les épaules. Les Tours se suivent mais ne se ressemblent pas forcément. Ça reste une course très particulière qui réserve tellement de surprises qu’il faut acquérir une vraie expérience pour pouvoir s’asseoir sur un statut de leader désigné.
Le Tour de France était une étape importante pour l’avenir de l’équipe Sojasun, quelles vont être vos prochaines échéances ?
D’ici la fin du mois de juillet, nous allons essayer de faire évoluer le groupe. J’en ai besoin aussi pour développer la formation au niveau du Sojasun Espoir-ACNC. Ce sont des vœux pieux. Nous avons bien avancé sur ces sujets mais à la fin du mois nous devrions en savoir plus.
D’autant plus que le marché des transferts va s’ouvrir dans une huitaine de jours, le jeudi 1er août. Quelle orientation va prendre l’équipe ?
S’agissant du recrutement nous serons beaucoup plus internationaux l’année prochaine. Nous ne serons pas forcément plus jeunes. Il faudra voir en fonction du marché. Nous rechercherons des athlètes qui correspondent à notre philosophie et qui rentrent dans notre projet, qui est écrit depuis près de dix ans. Il ne s’agit pas non plus de franchir trois marches en même temps. Il faut y aller en marchant !
Un coureur comme le champion de France Cédric Delaplace, qui court chez Sojasun Espoir-ACNC, pourrait passer à l’échelon supérieur l’an prochain ?
Nous avons de très bons jeunes cette année. Cédric évidemment a concrétisé quelque chose de très apparent mais derrière nous avons des talents énormes. Je pense notamment à Maxime Renault, à Guillaume Martin, à Julien Guay qui a fait la démarche de se réinvestir dans le cyclisme amateur pour tenter à nouveau sa chance chez les pros. Le choix va être compliqué mais globalement il va falloir avoir l’œil juste, sachant qu’un temps d’adaptation chez les pros, c’est au moins deux ans. Il ne s’agira pas de déséquilibrer le groupe.
On a vu un Tour 2013 très montagneux après un Tour 2012 à l’avantage des rouleurs, quel équilibre peut-on espérer pour la 101ème édition ?
En tant que passionné de vélo et manager d’équipe je ne me suis pas du tout ennuyé sur ce Tour de France. J’ai vraiment vu de belles choses. Ça a été un plaisir à suivre. Je ne suis pas convaincu que ce soit lié au profil, je pense que ce sont avant tout les coureurs qui font la course. On a vu des gens prendre des initiatives qu’on n’avait plus l’habitude de voir. Et ça c’est très bon pour le spectacle et pour l’intérêt du vélo.
Propos recueillis au Semnoz le 20 juillet 2013.