Pierre, vous abordez pour la première fois le Tour de France à bord d’une équipe étrangère. Qu’est-ce que ça change ?
Je le vis très bien. Sur le coup, ça m’a apporté un peu plus de sérénité, un peu plus de relâchement vis-à-vis de l’événement. Dans une équipe française, on a le sentiment de ne penser qu’au Tour. Chez Cannondale-Drapac, nous avons davantage d’objectifs. Il y a eu le Giro avec Rigoberto Uran, ce qui m’a permis d’arriver sur le Tour avec plus de recul que les années précédentes.
Ce qui ne vous rend pas moins ambitieux. Par quoi passera un Tour réussi ?
Un Tour de France réussi, c’est un Tour durant lequel tout se passe bien. Donner un chiffre, une place, ce n’est pas trop mon genre, mais dans un premier temps ça consistera déjà à éviter tous les pépins pour être le plus performant possible en montagne en deuxième et troisième semaines.
Etre cité comme leader d’une équipe comme Cannondale engendre-t-il davantage de pression que de mener une équipe plus familiale comme l’était Europcar ?
Bizarrement, je ressens moins de pression que les autres années. C’est mon ressenti. Maintenant, le message est clair : j’ai huit coureurs qui sont là pour m’aider. Ils vont faire le maximum pour me protéger sur les jours que je crains le plus, les étapes de plat, venteuses. En montagne, ce sera à moi de me débrouiller.
Qu’est-ce qui a changé dans votre préparation et votre approche par rapport à ce que vous réalisiez jusqu’alors dans le groupe de Jean-René Bernaudeau ?
Beaucoup de choses. J’ai pas loin de 90 jours de stage dans les jambes, une cinquantaine de nuits passées à plus de 2000 mètres pour dormir en altitude. Ma préparation a reposé sur l’entraînement plus que par les compétitions, comme j’avais pu le faire par le passé. Je ne reproche rien à mon ancienne équipe, courir beaucoup était mon choix, mais l’équipe Cannondale avait un autre projet pour moi avec beaucoup de changements. J’ai bénéficié d’une préparation d’athlète de haut niveau.
N’appréhendez-vous pas ce changement de préparation à l’aube du départ du Tour de France ?
Avoir moins couru ne peut que m’apporter de la fraîcheur. De l’envie aussi. J’ai fini très bien chacune des courses par étapes auxquelles j’ai participé cette année. Le staff m’a expliqué qu’avec un programme différent, beaucoup d’entraînement et moins de compétition, je devrais en tirer bénéfice en troisième semaine. Tous les coureurs qui visent le classement général courent peu de manière générale. Le but de la saison, c’est le Tour. Ce qu’il y a avant ou après, c’est un peu anecdotique.
Lequel de vos adversaires vous a le plus impressionné ?
Nairo Quintana a été très fort jusque-là en gagnant quasiment toutes les courses auxquelles il a participé. Alberto Contador a toujours son tempérament d’attaquant, il sait saisir des opportunités à des endroits où on ne l’attend pas. Quant à Chris Froome, il frappe un coup puis il défend. C’est comme ça qu’il avait gagné le Tour l’an dernier.
Vous avez notamment gagné à l’Alpe d’Huez, y a-t-il un autre mythe que vous rêveriez de gagner ?
Le rêve, c’est de gagner bien sûr au Mont Ventoux. Mais ce n’est pas une étape qui me convient. Il s’agira d’une montée sèche alors que je me défends mieux sur des enchaînements de cols. Le Mont Ventoux, après 200 kilomètres de plat, c’est autre chose. Toutes les étapes seront bonnes à prendre. Je les ai toutes reconnues et je sais entre autres que l’étape d’Andorre-Arcalis est magnifique.
Diriez-vous qu’il s’agit du Tour de France le plus excitant de votre carrière ?
Sans doute, car c’est un nouveau challenge. Maintenant, on sait tous que beaucoup de choses peuvent arriver sur un Tour de France. Je suis personnellement très content de ma préparation. On a juste hâte que ça parte.
Propos recueillis à Sainte-Mère-Eglise le 30 juin 2016.