Elle est encore inconnue du grand public mais son accession à la 2ème division cette saison devrait permettre de mieux connaître cette équipe américaine. Dirigé par Phil Southerland, le Team Type 1 possède une particularité : la majeure partie de son effectif souffre de diabète. L’objectif est de sensibiliser le public à cette pathologie tout en portant le groupe le plus haut possible. Ambitieux, les coureurs du Team Type 1 envisagent tout bonnement de gravir un nouvel échelon l’an prochain pour obtenir leur place dans l’élite et participer au Tour de France.
Phil, quand le Team Type 1 a-t-il été créé ?
L’équipe a été créée durant l’été 2004. Son passage chez les professionnels s’est effectué en 2008 mais elle évolue en 2ème division depuis janvier 2011.
D’où est venue l’idée de créer une équipe composée de coureurs diabétiques ?
Je souffre moi-même de diabète depuis que j’ai 7 mois. A l’université, j’ai rencontré un ami qui ne se soignait pas et qui ne prenait pas soin de lui-même. Il allait au-devant de complications, telles que la cécité, l’insuffisance rénale et l’amputation. Je l’ai donc soutenu et lui ai donné la motivation de se battre face à la maladie. Il m’a dit alors : « merci, tu m’as sauvé la vie, grâce à toi je pourrai voir grandir mes petits-enfants un jour. » De ce fait, j’ai pensé que le cyclisme serait une bonne tribune pour montrer aux gens atteints de diabète partout dans le monde qu’avec un bon suivi, tous les rêves sont permis. Nous avons pris le départ d’une course à travers l’Amérique avec huit cyclistes diabétiques et nous avons gagné. J’ai alors pensé que c’était phénoménal et que nous avions sûrement aidé énormément de gens. Mais le meilleur moyen pour convaincre resterait le Tour de France. Aujourd’hui, nous avons au total 101 athlètes dans le Team Type 1, 60 diabétiques de type 1, 20 de type 2, et sur l’Etoile de Bessèges notre équipe professionnelle a rivalisé avec les meilleurs.
Sanofi Aventis vous a-t-il toujours accompagné dans le sponsoring ?
Ils sont devenus notre sponsor en 2007, cela fait donc cinq ans qu’ils nous accompagnent. Ils sont un bon partenaire car ils veulent apporter aux personnes souffrant de diabète tout ce dont ils ont besoin pour un bon suivi et mener une vie normale.
Quels sont vos principaux objectifs pour la saison ?
Cette saison, nous allons essayer de récupérer un maximum de points UCI pour faire figurer notre équipe parmi les meilleures en Europe. Nous avons l’intention de disposer de la licence ProTour à la fin de l’année car notre but est de participer au Tour de France 2012. Faire partie du circuit WorldTour nous le garantirait. Notre objectif est donc de gagner des courses en France et de trouver un coureur français souffrant de diabète de type 1. Nous aimerions aussi remporter le Tour de Californie car il est également très important de gagner à domicile.
Vous avez également une équipe féminine, compte-t-elle aussi des cyclistes diabétiques ?
Bien entendu, nous avons neuf coureuses dans notre équipe féminine, et huit d’entre elles sont atteintes du diabète de type 1. Ce sont les seules héroïnes dans le monde. Pour les femmes de diabète type 1, elles montrent donc que tout est vraiment réalisable.
Comment les cyclistes diabétiques font-il pour s’injecter de l’insuline plusieurs fois par jour alors qu’ils sont sur le vélo ?
Généralement, lorsqu’ils sont sur le vélo, les coureurs n’ont pas à se faire d’injection d’insuline car l’effort diminue le taux de sucre dans le sang. Quand on fait du vélo, il est important, avant tout, de manger afin d’élever le taux de sucre dans le sang à un niveau qui soit assez haut pour ne courir aucun risque. Généralement, nous faisons des injections au petit-déjeuner, après la course et enfin au moment du dîner. Nous avons rarement recours aux injections pendant la course, sauf rares exceptions.
Les cyclistes diabétiques ont-ils le même type d’alimentation que les cyclistes sans problèmes de santé ?
Les coureurs ayant du diabète sont traités de la même façon que les coureurs sans diabète. Sur le vélo, il est important pour tous les cyclistes d’élever leur taux de sucre, de s’alimenter de façon régulière. Tous les coureurs doivent surveiller leur niveau de sucre avant et pendant la course pour s’assurer que tout aille bien.
Etre diabétique est-il un handicap pour les courses de longue durée comme le Tour de France, au niveau de la récupération par exemple ?
Je ne pense pas. Cela peut apporter différents défis que les autres coureurs ne peuvent pas se fixer. Mais au niveau de sa propre gestion, comme le contrôle du taux de sucre dans le sang, et le fait de s’alimenter correctement sur un vélo, vous savez, les coureurs sont tous les mêmes. C’est en revanche parfois plus difficile avant et après la course. Mais de toute façon le cyclisme est un sport difficile et ce n’est pas plus difficile pour mes coureurs diabétiques que cela ne l’est pour mes coureurs sans diabète.
Les cyclistes des autres équipes ont-ils été intéressés par votre projet ?
Oui, il y a des cyclistes que nous avons été en mesure de recruter comme Laszlo Bodrogi, Rubens Bertogliati et Kiel Reijnen, quelques-uns des meilleurs coureurs. Beaucoup de personnes sont intéressées. Désormais, de par notre présence, les gens apprennent que nous avons une très bonne organisation et une bonne gestion de l’équipe. Grâce à cela, nous espérons attirer les meilleurs cyclistes du monde.
Avez-vous le projet de créer une fondation contre le diabète, comme Lance Armstrong contre le cancer ?
Il existe déjà de nombreuses fondations qui œuvrent pour lutter contre cette pathologie et nous ne voulons pas les concurrencer. Cependant, nous avons une fondation qui se consacre à la recherche dans le diabète et le sport. Nous avons donc mis sur pied une plate-forme de recherche cette année. Nous pourrons découvrir, je l’espère, tout ce que nous avons besoin de savoir pour apporter des conseils, lignes de conduite aux enfants diabétiques. De cette façon, ils sauront comment se gérer. D’autre part, nous travaillons également sur un programme au Rwanda afin de distribuer du matériel aux enfants qui décéderaient de ce mal si rien n’était fait. Ainsi l’objectif est de maintenir un programme durable en encourageant le gouvernement à financer du matériel pour les enfants diabétiques. Enfin, nous avons un programme évolutif, un plan de cinq ans au cours duquel je fournis du matériel pour des enfants diabétiques à travers le monde.
Propos recueillis par Kim Caritoux.