Nicolas, après les victoires de Bradley Wiggins et Christopher Froome, voilà que le 101ème Tour de France s’élancera d’Angleterre. C’est forcément déjà une source de motivation ?
Bien sûr, pour Chris comme pour l’équipe. C’est quelque chose de très particulier pour le cyclisme britannique, pour Dave Brailsford, pour tous les Anglais qui sont chez nous. Je le ressens depuis que le Grand Départ en Angleterre a été annoncé. Il y a énormément d’engouement autour de l’équipe. Ce sera très bien car tous les garçons connaissent la route. Ça va être une bonne chose pour nous.

Le tracé du Tour 2014 inclut 15,4 kilomètres de pavés. Comment Chris Froome peut s’y comporter ?
On se le demande parce qu’on ne l’y a jamais vu. Chris n’est pas très stylé sur son vélo, notamment lorsqu’il fait des efforts, mais il est tout de même très technique et rarement au sol. Il vient du VTT, et sans être un pur technicien, il n’est quand même pas mauvais. Je pense qu’il ne faut pas qu’il s’inquiète de trop. Tout le monde devra passer sur les pavés. Nous avons en outre une équipe solide pour l’entourer sur ce terrain avec des garçons comme Edvald Boasson-Hagen, Geraint Thomas, Ian Stannard, Bernhard Eisel… La vraie source d’inquiétude ce jour-là pour les favoris sera l’ennui mécanique, la perte de temps…

La présence de pavés nécessitera-t-elle que Chris Froome se présente au départ de quelques classiques la saison prochaine ?
Pour le moment, je ne peux pas le dire. On en parlera cet hiver avec Dave Brailsford. En même temps, disputer des classiques pavées n’est-il pas prendre des risques pour pas grand-chose ? Je ne veux pas parler pour Chris mais en ce qui me concerne je ne trouve pas qu’un pavé soit énormément technique. Je viens du VTT et j’adorais faire Paris-Roubaix. Plus que le Tour des Flandres qui est davantage physique. Il suffit seulement de prendre les bonnes trajectoires. Mais sur le Tour ça va sûrement se courir différemment qu’un Paris-Roubaix. Il y aura beaucoup plus de tension et davantage de monde à vouloir rentrer devant sur les pavés.

Si l’on fait abstraction de cette étape piégeuse, le parcours du 101ème Tour de France semble bien convenir à Chris Froome ?
J’ai tendance à prendre tout ça avec des pincettes. Il y a une très grosse concurrence, on l’a vu cette année au Tour. Nous nous sommes fait attaquer sur le plat, dans les descentes, dans des bordures… Ce sera encore ça pendant trois semaines. Sur ce parcours il y aura moyen, vraiment, de faire beaucoup de choses. Il n’y a pas de grande étape très dure mais beaucoup d’endroits seront piégeux et propices à l’offensive, en utilisant des faits de course comme cette année. Il y a de la montagne, il y a un chrono, et vu ce qu’on a vu cette année avec beaucoup de tension sur des points-clés, il faudra faire attention partout. Ce sera intéressant si ça bouge.

Ne craignez-vous pas que les Vosges et les Alpes soient escamotées par les favoris dans l’attente des Pyrénées ?
Non, je ne crois pas. Pas par nous en tout cas. On a pour habitude, dès la première étape de montagne, d’y aller plein feux pour gagner du temps. Des garçons comme Quintana auront vraiment besoin de gagner des étapes, de prendre du temps en vue du chrono. Cette année, nous n’avions pas le choix. Nous avons tout fait pour gagner du temps dès la première étape de montagne. Nous y sommes parvenus. La Planche des Belles Filles, Chamrousse, Risoul, ce sera difficile. Et si on commence à y perdre du temps, ce ne sera pas bon pour le moral.

Vous qui le côtoyez, comment Chris Froome a-t-il digéré son après-Tour délicat ?
Psychologiquement, ça a été dur pour lui, après sept mois intenses. Mais ce qui m’a impressionné c’est qu’il a quand même gardé des objectifs, il s’est entraîné pour le Championnat du Monde. Reste que le corps ne réagit pas tout à fait pareil après sept mois aussi soutenus, malgré qu’il ait terminé sa saison en assez bonne forme. A Florence, il a été gêné par la pluie et une douleur dans le dos, peut-être la conséquence de la fin d’une saison extraordinaire. Ce que je relève, c’est que même s’il n’a pas été trop dans la lumière après le Tour, il a continué à s’entraîner. Il n’était pas question qu’il fasse quatre mois à la maison. Il a cette faculté à rester concentré quoi qu’il arrive, même s’il ne performe pas comme il veut.

Avez-vous déjà pensé à la façon dont il approchera le Tour l’année prochaine ?
D’abord, le Tour sera à nouveau son grand objectif, c’est certain. Nous devons encore discuter du programme de courses qui sera le sien. Sensiblement ça devrait être la même chose, maintenant on va voir.

Propos recueillis à Paris le 23 octobre 2013.