Nicolas, après l’abandon ce matin d’Edvald Boasson-Hagen, Chris Froome ne dispose plus que de six équipiers autour de lui. Qu’est-ce que cela change ?
C’est évidemment dommage. Nous étions huit après l’élimination de Vasil Kiryienka, nous voilà à sept. Ça ne change pas foncièrement les choses mais il va falloir davantage répartir le travail. L’équipe a été construite autour de Chris mais beaucoup de gars peuvent faillir durant les trois semaines, sur blessure, pépin de santé ou tout simplement sur un jour sans. D’autres sont alors là pour se substituer à eux. Mis à part le fait que chacun va devoir additionner un peu plus de tâches, ça ne change pas grand-chose. En fait ça nous touche plus sur le plan affectif car on perd un ami, un coéquipier capable de faire beaucoup de choses.
En 2012 à ce stade de la course, vous aviez deux leaders mais moins d’avance sur vos poursuivants. Que choisissez-vous entre la situation de l’an passé et la présente ?
Il ne faut pas comparer le Tour 2012 avec le Tour 2013. Nous ne sommes ni sur la même configuration, ni sur le même profil, ni sur la même concurrence. Certains ont aussi voulu comparer notre équipe avec celle de l’an dernier, or les paramètres changent totalement. On peut prendre l’exemple de Michael Rogers, maintenant chez Saxo. Est-il aussi performant chez eux qu’avec nous ? Dimanche Vasil Kiryienka est passé par la fenêtre en dépit de ses énormes qualités. Nous avons une équipe forte, nous l’avons démontré toute l’année, l’écart est fait mais il faut rester prudent, concentré sur tout ce qui se passe en course. Il ne faut pas s’endormir sur ses lauriers.
Après l’avertissement sans frais que vous avez eu dimanche dans les Pyrénées, comment avez-vous remobilisé les gars ?
Pour être honnête on ne s’attendait pas à ce qui est arrivé dimanche. Nous en avions discuté, et je m’attendais à ce que la course soit agressive, j’en avais parlé individuellement avec les gars après m’en être rendu compte l’an dernier sur la Vuelta. Ça a été la même chose au Tour d’Oman, encore plus agressif au Critérium International… J’étais prêt pour une étape comme ça, je ne pensais pas cependant que ce serait pour dimanche dernier. Richie Porte a clairement eu un jour sans mais en aucun cas nous n’avons douté.
Chris Froome est à présent exposé à trois binômes chez Movistar, Belkin et Saxo-Tinkoff, le voyez-vous comme un gros danger ou un moindre danger ?
C’est mon boulot d’analyser ce type de situation et vous comprendrez que je ne peux pas tout vous révéler quant à notre stratégie. J’y ai réfléchi et, ensemble, nous avons déjà une idée de comment vont évoluer les équipes adverses, ce qu’ils vont chercher à faire ou non, ce qu’ils sont en capacité de faire ou non. L’équipe Movistar m’inquiète moins. Elle a clairement prouvé dimanche qu’elle courait pour la 2ème place, sans quoi elle aurait saisi l’occasion. A voir maintenant si Belkin va vouloir saisir une opportunité au risque de tout perdre. C’est compliqué de prévoir ces situations, à nous de prendre les bonnes décisions en course.
L’Alpe d’Huez, c’est la montagne des Hollandais. Jeudi prochain, ce sera spécial pour eux. Ils se devront de bouger, non ?
A ce niveau-là, franchement, je ne crois pas. Nous sommes tous professionnels, ce n’est pas parce que l’histoire dit ceci ou cela, que l’on dit que l’Alpe est leur montagne, qu’ils vont passer à l’attaque. Maintenant ce sera spécial émotionnellement et s’ils se sentent bien ça leur donnera une motivation supplémentaire. C’est évident qu’à un moment donné quelqu’un va passer à l’attaque. Maintenant, qui ?
Quelle étape redoutez-vous le plus ?
Peut-être celle du Grand-Bornand vendredi prochain, qui ressemble un peu à celle de dimanche dernier dans les Pyrénées. Mais encore une fois ce qui est arrivé dimanche dernier n’est pas sûr de se reproduire dans les Alpes. Mais il faut se méfier de chaque étape, rien qu’aujourd’hui avec le vent que certains vont peut-être chercher à exploiter. Il faut être toujours vigilant.
Propos recueillis à Tours le 12 juillet 2013.