Marc, quel bilan tirez-vous du Tour de France ?
C’est un bilan assez bon avec deux victoires d’étapes. Nous faisons partie des neuf équipes sur vingt-deux à avoir gagné au moins une étape. Ça aurait suffi à nous réjouir. Mais en plus nous avons, avec notre coureur français Tony Gallopin, porté le maillot jaune un 14 juillet. Ça nous a fait quelque chose. Maintenant nous n’avons jamais fait d’un maillot distinctif un objectif. Pas même le maillot vert, car sincèrement Peter Sagan est actuellement imbattable dans ce challenge. Il a ramené à Paris son troisième maillot vert, et quand on regarde la différence sur son second Alexander Kristoff, 149 points, c’est énorme. J’ai toujours pensé qu’il valait mieux chercher à gagner de belles étapes. L’important était qu’André Greipel gagne la sienne.
Peter Sagan est en effet invincible au classement par points depuis l’instauration d’un barème de points qui se veut particulièrement déséquilibré entre le sprint intermédiaire et l’arrivée. Ne devrait-on pas corriger ce point ?
Quand cette idée a été lancée il y a deux ans, ça a beaucoup bagarré au début. Mais je trouve en effet désormais que cette règle du jeu donne moins d’intérêt au classement par points. On n’observe plus tellement de mouvements à l’approche des sprints intermédiaires. On ne voit plus les trains se mettre en place en milieu d’étape. Tout le monde semble résigné face à Sagan. Alors c’est vrai que je serais assez favorable à un retour aux règles à l’ancienne.
Vous avez découvert cette année Tony Gallopin. Sur quels points pensez-vous qu’il ait déjà progressé avec l’équipe Lotto-Belisol ?
Je pense déjà qu’il a progressé quant au fait d’appartenir à un collectif. Il ne travaille pas seulement pour lui mais a travaillé pour Jurgen Van Den Broeck, pour André Greipel. C’est quelqu’un qui ne pense pas seulement à lui. Tony, c’est un coureur qu’on a longtemps considéré comme un grand espoir du cyclisme du fait de ses nombreuses qualités. Mais depuis sa victoire il y a un an à la Clasica San Sebastian, et après son succès d’étape à Oyonnax dans le Tour de France, on n’est plus dans le rêve mais dans la réalité. Il est capable de faire des choses auxquelles on ne s’attendait pas. Et je pense que ce n’est qu’un début.
Dans quels domaines souhaiteriez-vous qu’il progresse encore en premier lieu ?
Je pense qu’il rêve avant tout des classiques. Quand il est arrivé dans l’équipe, il m’a dit qu’il rêvait de gagner une fois au moins le Tour des Flandres. Maintenant, il continue de découvrir les courses qu’il aime et qu’il voudra un jour gagner. Tony Gallopin a abordé le Tour avec quelques kilos de moins, et je pense qu’il est capable d’y faire un truc à l’avenir. Tout comme sur une course comme Liège-Bastogne-Liège. Il va vite au sprint, et s’il parvient à suivre les meilleurs… Peut-être allons-nous travailler un peu plus dans cette direction.
Vous attendiez plus en revanche de Jurgen Van Den Broeck. Comment analysez-vous sa modeste 13ème place finale ?
Sans hésiter, après sa 3ème place au Critérium du Dauphiné, nous avons cru un podium possible au Tour de France. Après les abandons de Froome puis de Contador, on a vraiment pensé que c’était jouable. Mais il a été victime de trois chutes d’affilée, a affiché des faiblesses dans les Vosges, avant que les Alpes ne confirment ses limites. Il y avait quelque chose avec sa santé qui n’était pas à 100 %. On ne va pas se cacher : 13ème à Paris, il est à sa place.
Le remettrez-vous comme leader avec des ambitions de podium sur un Grand Tour ?
Oui, nous avons toujours confiance en lui. Il a terminé 3ème du Dauphiné en juin, ce n’est pas rien. Regardez Andrew Talansky : il gagne le Dauphiné, il chute deux fois sur le Tour, et c’en est fini. Je ne veux pas que l’on juge Jurgen sur cette performance au Tour de France. Son truc, ça reste les Grands Tours, et nous allons tenter de l’aligner au départ de la Vuelta. Il va essayer de bien récupérer du Tour, aussi bien physiquement que mentalement, et s’il retrouve les jambes et le moral, je suis convaincu qu’il peut finir dans le Top 5 en Espagne.
Qui l’accompagnera ?
Il sera notamment entouré de Maxime Monfort et du champion de Belgique Jens Debusschere. Pour lui aussi il sera important d’apprendre ce que c’est que trois semaines de course. Greg Henderson sera également au départ. Avec ces coureurs-là, on peut espérer une victoire d’étape.
La période des transferts s’ouvre aujourd’hui. Un an après le recrutement de Tony Gallopin, avez-vous des perspectives françaises ?
Je ne dis pas non. La France possède un très beau vivier de jeunes coureurs talentueux, bons dans tous les domaines. Je crois que le cyclisme français a renoué avec un niveau d’excellence.