Marc, vous avez découvert le parcours du Tour 2016 lors de sa présentation. À première vue, avec quels objectifs l’aborderez-vous en juillet prochain ?
Je trouve que le parcours est équilibré. Il y a davantage d’opportunités pour les sprinteurs que par le passé. Ça ne veut pas dire que nous gagnerons plus. D’un autre côté, nous devons discuter avec Tony Gallopin à propos de ce que nous voulons faire. Doit-on viser les étapes ou le classement général ? Est-ce que l’on doit rester sur un Gallopin puncheur ou doit-on évoluer vers un profil de coureur de classement général ? C’est une discussion que nous allons tenir. C’est important qu’on le sache avant la fin de l’année.
Cette année, vous aviez fait le pari de ne pas emmener de leader pour le classement général, et cela vous a libéré avec à la clé l’un de vos meilleurs Tours de France…
Oui, nous avions annoncé notre envie de viser les étapes. Mais à la sortie des Pyrénées, Tony était encore 8ème du général. Ça lui a donné des idées. On a voulu essayer de le guider vers le classement général. Mais quand cela devient le but, il faut préparer le Tour autrement. Je pense qu’il a les qualités pour viser le classement général, mais il n’est pas spécialiste comme peut l’être Chris Froome. Je suis également convaincu qu’il peut gagner Liège-Bastogne-Liège et le Tour des Flandres un jour, contrairement à Froome. Il fait tout simplement partie des meilleurs coureurs du monde.
Que lui a-t-il manqué pour atteindre cet objectif cette année ?
Nous avons commis une erreur. Dans les Alpes, nous ne lui avons pas donné de veste au sommet d’un col. Il a pris froid dans la descente. C’était fini pour le classement général. Ce n’était pas de sa faute, mais de la nôtre. Mais s’il en a envie, je veux réessayer d’atteindre cet objectif avec lui. On devra discuter cet hiver des avantages et des inconvénients s’il était amené à se pencher sur le classement général. Il ne faut pas oublier que beaucoup de Français font déjà partie des meilleurs dans ce domaine comme Romain Bardet ou Thibaut Pinot.
Votre Tour 2015 fut réussi grâce aux quatre victoires d’étape d’André Greipel. Appliquerez-vous la même recette l’an prochain pour qu’il atteigne son pic de forme en juillet ?
Nous avions changé son programme en évitant qu’il participe au Tour Down Under. Il n’était pas très content, car en Europe, on ne trouve pas d’endroit où on peut rouler par 35 degrés en janvier. C’est moins agréable, il peut y avoir de la pluie. Mais au final, ça a porté ses fruits. On devrait rester dans le même esprit. Les Jeux Olympiques ne seront pas pour lui d’après le retour que j’ai eu de Tony Gallopin. Mais en ce qui concerne les Championnats du Monde à Doha, c’est autre chose. Ça doit être dans un coin de sa tête.
Quatre étapes, mais pas de maillot vert. Ne faudrait-il pas revoir le règlement ?
Effectivement, c’est dommage de ne pas avoir remporté le maillot vert. Peut-être faut-il inventer un nouveau maillot ? Car sinon, Peter Sagan est assuré de remporter le maillot vert chaque année. Il est si polyvalent ! Il est bien plus qu’un sprinteur. S’il voit que ses concurrents sont proches au classement, il attaque et marque des points sur des étapes vallonnées. Au final, à Paris, son avance est confortable alors qu’il n’a pas gagné d’étape…
Pourtant le barème avait été revu l’an dernier pour favoriser les purs sprinteurs…
Les organisateurs ont fait le choix de placer des étapes piégeuses en première semaine et de ne plus la consacrer uniquement aux sprints massifs. C’est certainement ce qui favorise Peter Sagan pour le maillot vert. Il est toujours là. Si les étapes sont un tant soit peu vallonnées, elles ne sont pas pour Greipel, Kittel ou Cavendish. Elles le sont pour Sagan.
Pendant qu’André Greipel brillait, Jurgen Van Den Broeck a regardé le Tour depuis chez lui et quittera votre équipe l’année prochaine.
Ce sont des choses qui doivent arriver. Il a passé neuf années chez nous. Ça lui fait du bien à lui, ça nous fera du bien à nous. Nous avons bâti un projet autour de lui après le départ de Cadel Evans. Cadel avait gagné le Tour après avoir quitté notre équipe. J’espère qu’il en sera de même avec Jurgen. C’est tout ce que je lui souhaite. Nous nous sommes quittés bons amis. Il m’a par exemple demandé s’il pouvait déjà utiliser le vélo qu’il aura chez Katusha, je lui ai, évidemment, répondu que oui.
Avec le départ de Jurgen Van Den Broeck et avec les jeunes Tim Wellens et Louis Vervaeke, quelles peuvent être vos ambitions sur les autres Grands Tours ?
Nous allons certainement essayer quelque chose. Louis Vervaeke est un bon exemple. Il n’a pas pu montrer toutes ses qualités à cause de plusieurs chutes qu’il a connues. Je crois qu’il peut, à l’avenir, suivre les meilleurs en montagne. Il a participé au Giro cette année, mais sans une bonne préparation à cause des chutes. En tout cas, je suis sûr qu’il peut étonner pas mal de personnes.
Votre équipe s’est montrée peu active sur le marché des transferts, mais a recruté Rafael Valls et Tomasz Marczynski. Est-ce dans le but d’être plus présent sur les courses par étapes d’une semaine ?
Quand on gagne quarante courses et qu’on termine le WorldTour à la 9ème place, on n’a pas trop intérêt à changer les choses. Effectivement, nous avons recruté ces deux coureurs pour être présents sur le terrain des courses par étapes d’une semaine. Il y en a beaucoup et nous n’avons marqué que très peu de points cette année. Le fait qu’ils soient respectivement Espagnol et Polonais a également été pris en compte par nos sponsors.
Que peut-on attendre de votre dernière recrue, Jelle Wallays ?
Il a remporté Paris-Tours, et A Travers la Flandre. Les qualités, il les a. Mais avec le maillot de Lotto-Soudal il sera plus étroitement surveillé.
Propos recueillis à Paris le 20 octobre 2015.