Jonathan, en 2013, ce sera difficile de faire mieux qu’en 2012 avec la victoire de Ryder Hesjedal sur le Giro, en avez-vous conscience ?
Le Giro, c’est la plus belle course que nous ayons gagnée dans toute l’histoire de l’équipe Garmin-Sharp. Tous les ans, notre objectif est la confiance. C’est toujours l’esprit de l’équipe d’améliorer les choses chaque année. Mais en y allant pas à pas. Cette année, si nous voulons gagner à nouveau le Giro, il faudra nous améliorer encore un petit peu. Sur le Tour de France, nous irons avec un objectif plus simple. Sur la dernière édition, nous avons voulu faire trop de choses, c’était une erreur. Viser les étapes, les sprints et le classement général, c’était trop. En 2013 nous irons sur le Tour avec un objectif simple. Je ne sais pas encore lequel, peut-être les étapes, peut-être le général ou les sprints. Mais pas les trois.
Il y a eu aussi beaucoup de malchance sur la dernière édition…
Mais la malchance, c’est aussi un peu d’erreur tactique. BMC, Sky, n’ont pas beaucoup de malchance parce qu’ils ont une tactique spécifique. Toute l’équipe BMC protège Cadel Evans par exemple. On évite les chutes comme ça. Si on divise l’équipe entre sprints, échappées, etc., c’est plus difficile d’éviter les chutes.
Cela veut-il dire qu’on verra soit Tyler Farrar soit Ryder Hesjedal sur le Tour ?
On verra la sélection. J’ai déjà les sélections en tête jusqu’au Tour de Suisse. Après, pour le Tour, on verra. Au Giro, c’est clair, on y va avec une sélection dessinée autour de Ryder Hesjedal pour défendre le titre. Le Tour, c’est ouvert. On verra si Ryder récupère bien ou si de nouveaux talents comme Andrew Talansky sont prêts pour le Tour. A voir aussi si Tyler Farrar arrive au plus haut niveau après une année difficile.
Sur la 100ème édition du Tour, il y aura notamment le contre-la-montre par équipes de Nice, vous y prêtez forcément attention…
Le chrono de Nice, ça c’est clair ! C’est toujours quelque chose de très beau que de gagner le contre-la-montre par équipes, que ce soit sur le Giro ou le Tour. On y pense déjà, bien sûr, même si nous n’avons pas encore reconnu le parcours. Nous allons sélectionner une équipe solide pour le contre-la-montre par équipes.
Pensez-vous que vous soyez les grands favoris de cette étape ?
Favoris n°1, je ne sais pas. Sky et Omega Pharma-Quick Step marchent très bien. Mais nous sommes là. L’avantage que j’ai, c’est que tous les coureurs sont spécialistes de cet effort. Tyler Farrar est excellent en chrono par équipes comme Ryder Hesjedal ou Andrew Talansky. Ça rend les choses plus faciles pour moi.
Pensez-vous que Ryder Hesjedal puisse conserver son titre du Tour d’Italie ?
Il le peut. Bien sûr, si Bradley Wiggins vient, il sera compétitif. Ce sera difficile de gagner le Giro en 2013, mais ça a été difficile l’an dernier. Pour Ryder, il faut que la course soit dure. Pas seulement le parcours, mais aussi que toutes les étapes soient rapides, difficiles, et agressives tactiquement. Il faut que tout le monde arrive fatigué en troisième semaine. Parce qu’il aime la bataille dans ces conditions. Si c’est comme cela, il peut gagner. Si c’est plus explosif, ce sera plus difficile pour lui.
Mis à part le Giro et le Tour, quels seront vos autres objectifs ?
Le Giro et le Tour, ce sont nos deux plus grands objectifs. Bien sûr nous avons aussi des objectifs sur les classiques belges avec Nick Nuyens et Johan Vansummeren.
Trois de vos coureurs (Tom Danielson, Christian Vande Velde et David Zabriskie) ont été suspendus jusque mars après leur collaboration avec les enquêteurs américains, comment se passera leur réintégration ?
Ce sont des coureurs qui ont dit la vérité. Mais le règlement est clair, ils doivent être suspendus. Je suis fier de leur décision d’avoir dit la vérité au public, à l’USADA (NDLR : l’agence américaine antidopage) et à l’Agence Mondiale Antidopage. C’est la meilleure chose pour le cyclisme. Ils sont dans l’équipe depuis longtemps, dès 2008 avec moi. Nous les connaissons bien. Quand le mois de mars arrivera, ils seront réintégrés sans problèmes.
Ça ne remet pas en cause votre volonté d’offrir une seconde chance aux coureurs repentis ?
Non, car je pense que c’est l’esprit de cette équipe. Le cyclisme professionnel doit avancer et ne pas ressasser le passé. Il faut qu’arrive le moment où les coureurs comprennent qu’ils doivent dire la vérité et faire une croix sur le passé. C’est la meilleure chose à faire et ne pas mentir. Si le sport vit dans le mensonge, nous ne progressons pas. Il faut que la discipline comprenne qu’il faut donner une deuxième opportunité aux repentis pour retrouver un sport propre et en finir avec le mensonge et le dopage.
Ça vous a valu des problèmes avec Eric Boyer…
Nous avons longtemps discuté. Eric est un bon exemple de l’ancien coureur qui a avoué s’être dopé et qui a présenté ses excuses pour que le cyclisme résolve ce problème. Il est un bon exemple pour tous les managers et les coureurs maintenant. Il a eu la ligne de conduite qu’il fallait.
Regarderez-vous Oprah Winfrey ce soir ?
(Il marque une pause) Je ne sais pas. Pour moi, il est plus important qu’Armstrong parle avec l’AMA qu’avec Oprah. On verra ce soir. Il doit avant tout clarifier les choses avec l’AMA et les agences antidopage. Il faut une progression du sport et de la lutte antidopage. Armstrong peut aider ça s’il fait le choix d’aider l’AMA.
Propos recueillis à Calpe le 16 janvier 2013.