Jean-Yves, le dimanche 28 août 2016, le Grand Prix Ouest-France de Plouay deviendra la Bretagne Classic, une classique en ligne de 240 kilomètres autour de Plouay. Où en êtes-vous dans l’élaboration du nouveau tracé ?
Le parcours est presque finalisé mais il ne sera pas présenté avant mars-avril. Les grandes lignes sont définies. La Bretagne Classic présentera les plus beaux atours de la Bretagne. Nous souhaitions que la prise d’antenne à l’international se fasse dans un lieu signifactif : ce sera les monts d’Arrée, dans lesquels nous inviterons les coureurs à prendre de la hauteur à 90 kilomètres de l’arrivée. C’est un massif très singulier par rapport au reste de la Bretagne, et nous tenons à le mettre en valeur. Nous traverserons au préalable des communes emblématiques du Finistère, la festivalière Carhaix et l’argentée Huelguat, au passé minier.
Qu’en sera-t-il du final de cette nouvelle édition ?
Le final sur Plouay sera plus musclé que par le passé dans les 40 derniers kilomètres avec de belles routes sinueuses et de nouvelles bosses. Du Faouët, on rejoindra le circuit de Plouay par la côte de Marta à 20 kilomètres du but, une bosse emblématique où Warren Barguil avait pour habitude de faire son interval training. Nous rallierons alors Plouay par la côte de Ty-Marrec, avec un premier passage sur la ligne d’arrivée puis un tour du circuit des Championnats du Monde 2000, long de 14 kilomètres avec les côtes du Lézot et de nouveau Ty-Marrec.
Qu’est-ce qui a dicté ce changement radical de formule ?
D’un côté, il y a les exigences télévisuelles. Nous dépendons des images télé et des compensations financières que peuvent nous apporter les télévisions. Nous sommes soumis à l’audience et on sait qu’une course en ligne permet de les améliorer nettement. D’un autre côté, Plouay est une petite commune qui commençait à s’essoufler. Elargir l’épreuve à la région en lui donnant le nom de Bretagne Classic donne une nouvelle valeur symbolique à cette classique, qui devient la classique des Bretons. La Bretagne est une grande terre de vélo qui méritait d’avoir au moins une classique à elle. Ces changements doivent en outre pérenniser l’épreuve. On sent un intérêt politique dans ce projet. Il est ainsi plus aisé de se battre face à des coûts d’organisation de plus en plus élevés.
A combien s’élève le budget d’une épreuve comme la Bretagne Classic Ouest-France, à laquelle il convient d’ajouter la Cyclo Morbihan, le Grand Prix de Lorient Agglo et la Coupe du Monde féminine ?
L’ensemble du week-end s’élève à 800 000 euros hors taxe. Les institutionnels financent l’événement à hauteur de 225 000 euros. Les télévisions et les partenaires privés, qui sont très importants à Plouay, mettent 450 000 euros. Les autres sources de financement sont les inscriptions à la cyclosportive, les recettes des buvettes, etc. C’est un lourd budget qui va encore s’élever avec les augmentations de la taxe WorldTour, des frais des équipes, de la taxe antidopage pour laquelle nous cotisons… Pour se maintenir dans le circuit WorldTour, il faut avoir les reins solides.
Plouay à la télévision l’été dernier, ce fut une heure et demie de direct le samedi sur France 3 pour la Coupe du Monde féminine et le dimanche sur France 3 et Eurosport pour l’épreuve WorldTour. Pour quelles audiences ?
Ça représente environ 10 % de part d’audience. Et la course féminine, qui a trouvé son public à Plouay, réalise même de meilleures audiences que les hommes. Avec la formule en ligne, nous espérons presque doubler notre audience. Nous comptons beaucoup sur les paysages que nous allons montrer avec le savoir-faire de France Télévisions. Même l’Union Cycliste Internationale nous incite à montrer le patrimoine. Et pour le coup en Bretagne nous avons beaucoup de choses à montrer. Nous avons d’ailleurs l’intention de produire un direct intégral sur les six heures de course de la Bretagne Classic, d’abord sur France 3 Ouest le matin, en espérant que la retransmission sur France 3 national commence plus tôt que d’habitude.
Paradoxalement aux audiences, ne craignez-vous pas une désaffection du public eu égard à ce qu’il était autrefois aux abords du circuit de Plouay ?
Je crois plutôt le contraire. Nous allons aller chercher le public. La médiatisation beaucoup plus forte de par notre passage dans tous les pays bretons va toucher un plus large public. Les journaux vont relayer davantage l’information, ce qui devrait intéresser davantage de monde. Maintenant, même si le public devait être moins nombreux, nous ne pouvons pas en tenir compte. D’un point de vue purement économique, on ne trouve pas trace de sa présence dans nos trésoreries. Les recettes des buvettes sont en baisse et un public trop nombreux nous demande un service d’ordre très dense et très coûteux. C’est beaucoup de contraintes pour des retours infimes. Dans ce contexte force est de nous diriger vers de vraies sources de revenus.
Depuis 2005 et la naissance du WorldTour, vous avez toujours mis un point d’honneur à maintenir celle qu’on baptisera demain la Bretagne Classic Ouest-France dans le circuit mondial. Est-ce une condition sine qua non ?
C’est indispensable. Et c’est pourquoi nous nous sommes battus si fort en 2004. Sans obligation pour les meilleures équipes du monde de venir en Bretagne, notre éloignement serait vraiment prohibitif. Dans les années 90, pour faire décoller l’épreuve et obtenir la participation de grands coureurs italiens et belges, nous avons commencé à organiser des vols charters. Aujourd’hui, nous continuons d’affrêter ces vols car faute d’aéroport international en Bretagne, il faudrait deux ou trois vols pour rejoindre Plouay. Pour nous et la Bretagne, il est vital de conserver une place dans le WorldTour. Et donc d’en accepter les exigences.
Propos recueillis le 1er décembre 2015.