Jean-Christophe, vous avez abandonné le Giro prématurément quand votre objectif initial était d’accomplir les trois Grands Tours. Cela signifie-t-il que vous pourriez enchaîner sur une année supplémentaire pour avoir le plaisir de finir un Giro ?
Non, je vis une année difficile, deux années difficiles même qui s’enchaînent, donc je pense que je vais arrêter les frais !
Comment vous-êtes vous remis de cette chute à la fois physiquement et moralement ?
Physiquement, ça a mis un petit peu de temps. Les sensations ont commencé à revenir sur le mois de juillet donc on va voir sur la fin de saison si je suis capable d’être performant. J’ai dû quitter le Giro, ça n’a pas été évident parce qu’on misait beaucoup là-dessus. Mentalement, cela a été un petit peu difficile mais je suis de nouveau prêt.
Vous êtes passé par le Tour de Pologne, comment cela s’est-il passé sur cette épreuve un peu tronquée ?
J’avais l’impression que les sensations étaient revenues et que la forme semblait meilleure. J’ai été victime du mauvais temps et j’ai abandonné, mais je pense que je n’ai pas montré mon véritable niveau en Pologne.
Votre présence sur le Tour avait été envisagée, avant finalement de renoncer, c’était une décision personnelle ou plutôt une décision de l’équipe ?
C’était une décision personnelle mais je pense que c’était aussi pour le bien de l’équipe. Cela ne servait à rien que je vienne sur le Tour pour être la moitié d’un équipier de Romain Bardet, surtout quand on voit le Tour qu’il a fait. Il avait besoin de huit coureurs de bon niveau pour l’accompagner le plus loin possible. Cela aurait été un peu lui tirer une balle dans le pied que d’être présent sur le Tour.
Deux ans après, faites-vous toujours un choix entre votre 2ème place sur le Tour 2014 et votre médaille d’argent aux JO de Pékin ?
Pour moi, ces deux performances sont sur un pied d’égalité, ce sont deux faits marquants de ma carrière.
Quels sont les principaux regrets : votre chute sur le Giro, votre absence sur le Tour, aux Jeux ?
Le Tour n’était pas dans ma tête mais effectivement je suis déçu de ne pas avoir été au niveau pour pouvoir représenter la France aux Jeux Olympiques. C’est une fin de carrière, je suis peut-être moins performant que je ne l’ai été.
Il reste la Vuelta que vous allez bientôt attaquer, quel objectif vous fixez-vous ?
Aujourd’hui, vu ces deux dernières années, c’est difficile pour moi de me fixer des objectifs. Reprendre du plaisir sur le vélo et arriver à avoir de bons résultats serait déjà très bien. Je compte un peu sur ma fraîcheur, même si je pense que je suis peu en avance pour la Vuelta du fait de mon manque de repères. Mais je pense que je serai un petit peu plus frais que d’autres coureurs qui auront fait le Tour et les Jeux avant le Tour d’Espagne. C’est devenu, après ma chute sur le Giro, l’objectif majeur de l’année.
Vous allez avoir Pierre Latour à vos côtés, comment allez-vous appréhendez votre collaboration avec lui ?
C’est quelqu’un que j’apprécie tout particulièrement, qui est bourré de talent, donc je suis content de l’accompagner sur son premier Grand Tour. Si d’aventure je ne suis pas au niveau je me ferai un plaisir de l’épauler et d’essayer de lui transmettre mon expérience.
On peut dire que c’est un peu ce que vous avez fait avec Romain Bardet. Si vous deviez les comparer, dans quels domaines doivent-ils progresser ?
Je pense qu’ils sont diamétralement opposés, même s’ils sont très talentueux l’un et l’autre. A mon avis Pierre manque encore de rigueur et a contrario Romain est trop dans le stress, dans la réflexion, et il perd beaucoup d’énergie là-dedans.
Donc cela veut dire que de temps en temps il doit « débrancher » un peu comme sur le Tour et sa victoire à Saint-Gervais Mont Blanc ?
Non, c’est un champion, il veut réussir et gagner mais du coup il se met beaucoup de stress autour de ça. C’est de l’énergie un petit peu dépensée mais les performances jouent pour lui. C’est quelque chose qui le fait avancer aussi.
Avez-vous eu l’occasion d’en discuter avec lui, de cet aspect là de sa personnalité ?
Ce n’est pas forcément mon rôle, je reste un équipier et je ne suis pas un directeur sportif ou un manager d’équipe donc je n’ai pas non plus à lui donner trop de leçons.
Avez-vous déjà pensé à votre reconversion ?
Je me pose des questions mais d’un côté ça me tient à cœur de bien finir ma carrière donc j’essaie de ne pas trop me disperser et de rester coureur au moins jusqu’à la fin de la Vuelta. Le vélo reste ma passion donc effectivement je réfléchis à rester dans le cyclisme mais il n’y a rien de décidé.