Fabian, comment percevez-vous la naissance de l’équipe Trek Factory Racing ?
Les dirigeants de Trek m’ont dit qu’ils voulaient continuer, avancer avec quelque chose de nouveau. Ils m’ont dit qu’ils ne reprenaient pas simplement RadioShack-Leopard et que ce serait une toute nouvelle équipe. Il y avait un intérêt de la part de Trek et de Luca Guercilena. Nous avons beaucoup discuté sur la direction à prendre. J’ai donné mon avis, mais j’ai tout laissé entre leurs mains. En cyclisme, en fonction des situations, tout le monde ne veut pas toujours prendre les mêmes directions. Mais quand vous vous réveillez le matin et que vous êtes contents de ce que vous faites, que vous pouvez voyager avec les gars, vous voulez continuer dans la même voie.
La présentation de l’équipe à Roubaix a montré que cette équipe se construit autour de vous. Ressentez-vous une pression particulière ?
La pression est toujours là. Mais cela ne veut pas dire que Trek me met une pression particulière. Elle est là pour quiconque a des objectifs fixés. Mais ce n’est pas mon équipe. Elle serait là même sans moi. La bonne chose c’est que Trek a maintenant toutes les cartes en main avec Luca pour le côté sportif. Si on jette un œil au passé, avec Frank, Andy, Jens ou moi, je pense que nous sommes plus détendus parce que nous sommes moins impliqués dans certains domaines pour nous concentrer sur l’aspect sportif. Nous sommes là pour être performants, pas pour créer quelque chose. Nous avons assez d’expérience aujourd’hui grâce aux années que nous avons passées ensemble dans différentes équipes. C’est une belle opportunité. Cela nous laisse la possibilité de passer plus de temps sur la route au lieu de passer du temps dans les bureaux à avoir des réunions ou au téléphone. Trek a déjà de tels produits qu’ils sont les meilleurs sur le marché. Nous voulons maintenant être nous aussi les premiers sur la route.
En 2011, vous faisiez partie de l’équipe Leopard-Trek. N’avez-vous pas peur que l’échec se reproduise ?
Bien sûr, quand je regarde les années passées, et le projet avec Leopard, nous entamions aussi quelque chose de nouveau et le projet n’a pas abouti. J’essaie juste d’être un coureur cycliste et je laisse tout cela entre les mains de Trek et de Luca. Nous avons un staff très professionnel, et beaucoup de choses que je ne dois pas changer. C’est un point important. Je ne dois pas changer de vélo et Trek sera présent à 100 %. Je connais bien les vélos et c’est de l’énergie que je garde. J’ai confiance en ces gens pour la saison qui s’annonce.
Comment anticipez-vous les classiques flandriennes où nous pourrions assister à un combat entre générations ?
C’est ma quatorzième année professionnelle. Je ne suis pas vieux comme Jens Voigt (il rit). C’est comme cela qu’est le sport. Il y a toujours des jeunes qui poussent. Ça se passe comme cela dans le football, en tennis, bref, partout. J’essaye de tirer le meilleur de moi même. Bien sûr, c’est une source de motivation supplémentaire. Tu ne veux pas être battu par un coureur plus jeune. Cela me pousse à travailler encore plus. L’expérience est de mon côté et c’est un atout supplémentaire. Un jeune coureur réfléchi peut-être un peu moins alors que nous mesurons davantage nos efforts.
C’est la raison pour laquelle vous avez battu Sep Vanmarcke à Paris-Roubaix ?
Dans les 30 derniers kilomètres, j’ai eu mes propres problèmes. En regardant les images, je ne sais toujours pas comment tout cela a pu se produire. Encore aujourd’hui, je peux dire que je n’ai pas vraiment vu la ligne d’arrivée. L’expérience a beaucoup joué, mais j’aurais également pu perdre.
Qu’en est-il de nouveaux duels avec Tom Boonen ?
J’ai toujours hâte d’arriver à ces grandes courses ! Bien sûr, pour les médias, le public et les gens au bord de la route, ce sont toujours de grands moments. Ce n’est pas seulement une histoire entre Tom et moi ! Il y a des tas de coureurs également. Tout est spécial et rien n’est prévisible. Nous avons vu ce qu’il s’est passé ces deux dernières années. Je n’ai pas aimé le voir comme l’année dernière, au sol au Tour des Flandres. Mais d’un autre côté, j’ai été moi même dans sa situation l’année précédente. Ça fait partie du sport. Tu ne sais jamais ce qu’il peut se passer. C’est la raison pour laquelle je donne le meilleur de moi même chaque année.
Vous aurez aussi un rôle de professeur, notamment avec le jeune Jasper Stuyven.
Les jeunes apportent quelque chose en plus. Ils sont très motivés et pour eux c’est une nouvelle aventure. Les résultats de Jasper chez les Espoirs sont une chose. Mais quand on arrive dans le monde professionnel, on part de zéro. Je l’ai rencontré lors des stages. Il a l’air d’être déjà professionnel dans son approche, concentré, et semble vouloir tout donner pour l’équipe. Mais aussi pour accumuler de l’expérience. C’est normal pour un jeune coureur. Il a la bonne attitude pour devenir un futur grand. Ce n’est pas en un jour que tout se fait, cela prend bien sûr des années. Il doit apprendre, il doit faire des erreurs pour accumuler cette expérience. Mais je pense que c’est un coureur que l’on verra aux avant-postes dans les années à venir.
Vous pourriez tenter le record du monde de l’Heure. Quelle influence cela pourrait-il avoir sur votre programme ?
J’ai un projet, mais rien n’est encore arrêté. Cela ne se décide pas du jour au lendemain. Nous ne savons pas encore si ce sera pour cette année ou pour l’année prochaine. Nous sommes en train d’y travailler. Mais la première étape importante, c’est les classiques. Après cela, nous verrons quelle sera la marche suivante. La saison est toujours longue. J’ai ce record en tête, mais ne grillons pas les étapes ! Voyons cela au jour le jour et comment les choses vont arriver. Mon intention pour le moment est d’être le premier de la classe. L’équipe veut l’être dans différents domaines. C’est une bonne chose de partir comme cela en tant que toute nouvelle équipe.
Le nouveau parcours de Milan-San Remo semble également vous avantager.
Je ne peux pas réellement donner de réponse. On sait qu’il y aura une nouvelle ascension et que les choses vont changer. Il n’y aura plus de sprinteurs au départ, car la course sera très dure. Mais en cyclisme, ces derniers temps, beaucoup de choses ont changé. Le parcours du Tour des Flandres a lui aussi été modifié. J’ai d’abord besoin de reconnaître le nouveau parcours. Mais je ne suis pas réellement favorable aux gros changements sur ces grandes classiques qui ont une histoire.
Propos recueillis à Roubaix le 10 janvier 2014.