Clément, nous vous avons retrouvé sur la Granfondo Pantani Forever (dont vous retrouverez bientôt le commentaire sur Vélo 101). Que vous évoque le nom de Marco Pantani ?
C’est presque toute mon enfance. J’étais un grand fan de lui, car j’étais un grand fan des grimpeurs, et Pantani c’était la référence quand j’ai commencé le vélo. Il a eu le passé qu’il a eu, mais c’est pour sa classe sur le vélo que je l’appréciais. Quand on est gamins, on ne sait pas tout ce qu’il se passe en coulisses. Mais j’ai encore son poster dans ma chambre. C’est pour celà que, lorsque j’ai eu l’occasion de la faire, je l’ai faite.
Existe-t-il un mythe comme lui en France ?
Les Italiens ont plus le culte de la personnalité que les Français. Pantani faisait le spectacle et c’est ce qu’aiment les Italiens. Nous avons nos idoles, les Hinault, les Virenque, etc. On peut même voir des banderoles à leurs noms sur le bord de la route sur le Tour de France. Mais Pantani c’est encore quelque chose au-dessus. Même sur le Giro. Quand Fabio Aru a gagné sur sa montée, au Plan di Montecampione, on l’a tout de suite comparé à lui.
Vous avez franchi l’Atlantique, quel sera votre programme pour les semaines à venir ?
J’ai passé dix jours en famille après un retour difficile. Il fallait récupérer du Tour de Californie et ce n’était pas idéal avec le décalage horaire. Il y a eu la météo qui n’a pas toujours été extra. Le moral n’était pas au top. J’essaye de me remettre dedans. C’est pour cela que j’ai décidé de partir en solitaire en montagne pour m’entraîner. Je vais y repérer les étapes du Tour des Pays de Savoie et finir par le Time Megève-Mont Blanc avant de revenir sur Chambéry pour y retrouver mes routes d’entraînement. Ensuite, j’espère être sélectionné avec l’équipe de France au Tour des Pays de Savoie. C’est un objectif, car l’an dernier j’avais pu y briller. Ensuite, j’aurai la chance de faire le Championnat de France avec les pros. Là encore, ce sera une super découverte, puisque c’est 250 kilomètres. Un truc que je n’ai jamais fait. Je repartirai aux États-Unis le 8 juillet pour disputer la Cascade Classic, cinq jours de course montagneuse en classe 2. Ensuite, je ferai un stage en altitude à Boulder ou dans l’Utah. Puis j’enchaînerai Tour de l’Utah et le Tour du Colorado. C’est un grand objectif pour l’équipe. Je prendrai ensuite la direction du Tour d’Alberta. Une course de sept jours plutôt plate. C’est bien pour progresser et c’est un moyen de rendre la pareille aux coureurs qui me rendent service sur les courses montagneuses.
Comment travaillez-vous vos qualités de grimpeur ?
J’ai la chance qu’à Santa Rosa, on peut trouver du plat et des bosses. Les montées ne font pas plus d’une demi-heure, mais ça permet de conserver le coup de pédale spécifique. J’ai aussi fait un stage à Boulder dans le Colorado. C’est vraiment réputé pour les stages de montagne. J’ai pu y faire de bons entraînements en montagne juste avant le Tour du Gila puis le Tour de Californie. Après cela j’ai passé quatre jours sans vélo. À mon retour, j’ai repris en Picardie sur des routes plates, avec le grand plateau et dans le vent. C’est complètement différent. C’est pour cela que c’était un peu bizarre de remettre le 39, mais ça va revenir.
Vous parliez du Colorado. Comment encaissez-vous les hautes altitudes ?
C’est spécial. Je découvre cela cette année. À Boulder, j’ai dû lever le pied pendant une semaine le temps de m’y adapter. J’ai l’expérience de mes coéquipiers et de l’équipe. Des amis aussi m’ont conseillé. C’est très important de lever le pied. Il ne faut pas rouler aussi fort qu’au niveau de la mer, car les efforts sont complètement différents, car l’organisme brûle beaucoup plus de calories. Il y a beaucoup de choses à prendre en ligne de compte. C’est de l’expérience. Je suis parti là-bas pour apprendre. C’est un apprentissage de plus. Je me cherchais un peu à ce niveau-là. Je n’ai pas la recette miracle, mais j’essaye de m’y faire. On a vu que Bradley Wiggins avait du mal à s’adapter au-dessus de 2000 mètres. Il s’est mis pendant plus d’un an à Tenerife pour remporter le Tour de France. C’est la preuve que l’on peut s’y adapter même si la base on n’est pas forcément faits pour cela. Je pars dans cette optique.
Vous confirmez donc qu’à partir de 2000 mètres la gestion de l’effort est différente ?
Oui, c’est assez flagrant d’ailleurs. Heureusement que mon entraîneur Vincent Terrier analyse bien tout cela avec les capteurs de puissance et les pulsations. Cela fait un peu peur au début parce qu’on a l’impression d’être collés. En fait, c’est dû au fait que nous avons une perte de puissance. Au niveau de la respiration, ça joue aussi. C’est pour cela que je crains un peu le Colorado. On est toujours entre 2000 et 2500 mètres et on peut aller jusqu’à 4000 mètres ! Les coureurs m’ont raconté que certains saignaient du nez. Ce n’est pas évident pour s’adapter.
Combien de temps pensez-vous rester aux États-Unis ?
Pour le moment, un an puisque c’est la durée de mon contrat. Le but est de trouver une équipe continentale pro ou WorldTour, étrangère ou française, je n’ai pas le luxe de choisir. Mais j’avoue que ça ne me déplairait pas de rester à l’étranger. J’aime bien la mentalité. Mais il y a autre chose que du vélo. L’apprentissage de la langue par exemple. On continue de parler anglais et ça me servira toujours dans ma vie. Une carrière de cycliste, ça va jusqu’à 35-40 ans. Après cela il te reste encore 20-25 ans à travailler. Parler anglais, ça peut vraiment servir. Je pars dans cette optique-là. C’est aussi la raison pour laquelle je continue mes études en parallèle.
Propos recueillis à Valloire le 1er juin 2014.