Es-tu confiant à la veille de l’étape décisive pour le Maillot à Pois?
Depuis le début du Tour, j’avais une petite idée derrière la tête : le Maillot à Pois. Ce n’est jamais évident de passer en tête d’un col, au bon moment, à la bonne étape. Hier, j’étais au bon endroit et en plus j’ai réussi à passer en tête de deux cols mythiques, qui m’ont permis de glaner beaucoup de points. Charteau a tout de même un avantage de quinze points, ce n’est pas gagné mais au moins ça justifie les sprints que j’ai pu faire en haut des cols depuis le début du Tour. Il faut avoir cette idée à un moment donné, sinon on n’y arrive pas. Hier, c’était vraiment l’étape à ne pas rater pour rester dans la course. Demain, on verra s’il est possible de revenir ou pas.
Cette échappée t’a donc rassuré ?
Oui, faire la course en tête m’a fait beaucoup de bien au moral. C’est fatiguant, c’est dur mais au final ça n’est que du bonus. Aujourd’hui je ne tiens qu’avec le moral. C’est vrai que je suis content de boucler la boucle comme cela. Ca serait merveilleux de partir de cette façon. Demain, je vais me battre de toutes mes forces, les circonstances de courses seront peut-être contre moi. Ca ne sera pas évident.
Y a-t-il déjà une tactique établie au sein de la Caisse d’Epargne pour renverser la vapeur?
Ca sera un travail collectif. Si une échappée de dix coureurs part dès le départ, c’est fini. Il faut surtout que je fasse la dernière ascension à fond, car je n’oublie pas que les points en haut du Tourmalet sont doublés. J’ai les jambes pour le faire, le moral et la niaque. Demain, on verra un bout de la tour Eiffel. J’ai hâte de profiter de la fin du Tour, la famille, un bon petit champagne et la tournée des critériums. Je ne suis pas triste de boucler la boucle. Se faire plaisir avant de partir, c’est tellement important. On a toujours plaisir à être devant. Ne pas finir dans l’amertume ou être victime d’un coup dur, comme une mauvaise chute par exemple. Ca peut arriver demain mais j’aurais sauvegardé l’essentiel.
C’est aussi, d’une certaine manière, une réponse à certaines critiques à propos de votre comportement au sommet des cols?
Justement, je trouve ça triste aujourd’hui de critiquer ma façon de courir. Finalement mes petits sprints que certains ont traités avec ironie et dérision vont peut-être peser dans la balance. J’ai entendu des consultants dire « Mais pourquoi Moreau fait-il des sprints pour deux, trois points? » Demain soir, ces points compteront cher, je resterais peut-être deuxième. Comme quoi tout compte. C’est du début à la fin que se joue le Maillot à Pois et personne ne peut dicter l’avenir d’une course. Personne ne peut dire que je faisais ça pour rien. J’ai laissé passer Pineau toutes les Alpes devant, j’ai passé la Colombière en tête. Alors c’est peut-être juste, cinq points, dix points, quinze points, mais à la fin, tous ces petits points accumulés me permettront peut-être de revêtir le Maillot à Paris.
Propos recueillis par Laurent Galinon à Pau, le 21 juillet 2010