Cédric, pourquoi avoir choisi beIn Sport pour revenir dans une cabine commentateur ?
Pour être vraiment clair, je suis consultant depuis 2008 avec la RTBF, pour qui j’ai couvert plusieurs Tours de France. Depuis 2009, de façon ponctuelle, je le suis aussi pour France Télévisions, notamment pour les Championnats du Monde et les Jeux Olympiques l’an dernier. J’ai eu une proposition cet hiver de France Télévisions, de collaborer avec eux sur Paris-Roubaix et sur le Tour de France en tant que consultant moto. Il y a maintenant un mois, j’ai reçu un coup de fil de beIn Sport qui recherchait un consultant vélo. C’est parti comme ça. On s’est appelés et j’ai compris qu’ils étaient intéressés par une collaboration. J’étais la bonne personne au bon moment avec les bonnes disponibilités.
Vous serez donc à la fois sur beIn sport et sur France Télévisions…
Exactement, quand beIn Sport s’est tourné vers moi pour me demander mes engagements contractuels avec la RTBF ou France Télévisions, il était clair que j’étais déjà engagé pour Paris-Roubaix et sur le Tour sur la moto. J’ai soumis le projet beIn Sport à France Télévisions, qui n’a vu aucune objection à ce que je cumule les deux postes. Au contraire. Ils ont jugé que le programme de courses italiennes était complémentaire dans la mesure où ils ne retransmettront aucune course diffusée sur beIn Sport.
Quelles seront les courses que vous commenterez ?
Le package beIn sport comporte les Strade Bianche, la Maxima Roma, Tirreno-Adriatico et peut-être le Giro. Nous n’avons pas encore discuté du Tour de Lombardie, car c’est encore un peu loin dans la saison. Si beIn Sport diffuse la course, ce qui devrait a priori être effectif, je devrais normalement être amené à collaborer avec eux en fin d’année. Dans un premier temps, nous avons parlé de ce qui nous amenait au Giro. Ça tombait bien, car c’était vraiment complémentaire de ce que m’avait proposé France Télévisions dans un premier temps. C’était l’essentiel sinon je n’aurais pas pu répondre favorablement à beIn.
Pour combien de temps êtes-vous lié aux deux chaînes ?
Ce sont des interventions ponctuelles, donc je n’ai pas d’engagement sur la durée. Avec beIn Sport, on a un contrat qui me lie sur les courses italiennes 2013.
Les négociations avec France Télévisions avaient-elles déjà commencé l’an dernier ?
Avec France Télévisions, j’ai des contacts depuis longtemps. Ma première collaboration avec eux date du Dauphiné 2009 où j’avais remplacé Laurent Jalabert le dernier week-end du Dauphiné. Ça s’est poursuivi ensuite pour les Championnats du Monde. Comme Laurent est sélectionneur national, j’étais aux côtés de Thierry Adam à Mendrisio, Geelong, Copenhague et Valkenburg. Après les Jeux, on m’avait fait comprendre qu’il y avait une possibilité de collaborer avec eux sur les deux événements majeurs qu’ils diffuseront en 2013. Pour Paris-Roubaix, le dispositif est un peu plus imposant que sur les autres courses. Et surtout sur le 100ème Tour de France avec de très gros moyens techniques. On a discuté pendant l’hiver, notamment après la présentation du Tour, et le projet s’est finalisé début 2013.
Vous reprenez donc le rôle que tenait Laurent Jalabert auparavant…
Absolument. Je reprends le rôle qu’il a tenu pendant plusieurs années. Je serai sur la moto, au cœur de la course. Mon rôle sera de donner des informations comme si j’étais encore coureur cycliste. Au lieu de pédaler sur le vélo, je serai plus à l’aise sur la moto. Leur volonté était de mettre un ancien coureur qui a déjà disputé le Tour de France, qui a fait partie d’échappées, qui a gagné des étapes, un peu comme moi, pour donner au téléspectateur le côté tactique et technique que seul un ancien coureur peut avoir.
Aimez-vous la moto ?
Honnêtement, cela va être une découverte. Cela fait plusieurs années que je travaille en cabine et je pense avoir acquis une certaine expérience. Être au cœur de l’action, cela va être un retour en arrière. Cela fait cinq ans que je n’ai pas été plongé au cœur d’un peloton. Dans un premier temps, il y aura un peu d’appréhension, car dans toute ma vie, je ne suis monté qu’une seule fois sur une moto ! Il y aura un travail à effectuer, surtout avant Paris-Roubaix, pour être à l’aise. C’est nécessaire pour faire de bons commentaires. Et puis ce sera un œil différent. J’aurai un retour dans l’oreille, mais je n’aurai pas les images que l’on peut avoir en cabine. C’est pour apporter de la pertinence dans les commentaires, car parfois, quand on est en cabine, certaines choses nous échappent. L’idée est d’avoir, en course, enfin un élément de France Télévisions au cœur de l’action.
Cela veut-il dire qu’être coureur vous manque ?
C’est un projet qui m’a séduit. La RTBF voulait prolonger notre aventure, on a vécu de bons moments. Mais depuis 2008, sur les Tours de France que j’ai commentés, je n’ai pas vu beaucoup de coureurs. On vit à côté de la course. La proposition de France Télévisions de retrouver l’ambiance course me permettait de refaire un Tour de France sur la route, avec les coureurs. À la différence près que je vais probablement disposer de plus de chevaux sous le capot que quand j’étais coureur cycliste. C’était vraiment séduisant, qui plus est sur le 100ème Tour de France. S’il fallait en disputer un nouveau, c’est celui-ci que j’aurais choisi. Vous comprenez que je n’ai plus les moyens physiques de le faire sur le vélo et le faire sur la moto, c’est fantastique, c’est presque un cadeau du ciel.
Le duo que vous composiez avec Rodrigo Beenkens ne va-t-il pas vous manquer ?
Bien sûr, avec Rodrigo, nous étions devenus plus que de simples journalistes/consultants. On avait une complicité qui devait s’entendre à l’antenne. On vivait trois semaines ensemble sur le Tour, on faisait également les classiques. Quand on vit de bonnes choses comme celles-là, elles ne peuvent que vous manquer quand vous ne les avez plus. Mais c’est moi qui ai opté pour retrouver le peloton. C’était une opportunité que je ne pouvais pas laisser passer, et encore moins sur la 100ème édition. C’est une expérience qui vaut tous les bons moments que j’ai passés avec Rodrigo. Il sera toujours temps à la fin du Tour de faire le bilan, de voir ce que j’ai apporté au dispositif France Télévisions, de voir les frissons que j’ai pu avoir pendant trois semaines et de voir si ça me convient, ou si ça ne me convient pas. Je voulais quand même tenter l’expérience.
Êtes-vous davantage impatient de monter sur la moto que de commenter votre première course sur beIn Sport demain ?
Pas du tout, j’ai l’impression aujourd’hui que je suis plus à l’aise en tant que consultant télé que comme coureur cycliste. Ça peut paraître surprenant. C’est Rodrigo Beenkens qui m’a dit que je faisais un bien meilleur consultant qu’un ancien coureur cycliste. C’est ma passion d’essayer de faire partager aux gens mon expérience de quatorze ans chez les pros. Puis, c’est utile pour le téléspectateur d’avoir un ancien coureur qui explique pourquoi tel coureur fait telle chose, pourquoi une équipe prend telle décision, etc. J’ai fait des études d’ingénieur et j’ai une certaine déformation, celle de vouloir toujours tout expliquer. Dans une course cycliste, tout s’explique. Que ce soit par une stratégie bien définie ou un programme de course. C’est ce que je pourrai faire sur beIn Sport, mais pas sur la moto où ce sera du ponctuel. Je devrai expliquer en une fraction de seconde ce qu’il s’est passé dans les dix-quinze dernières minutes, où ce qui m’a marqué, comme l’aisance du coup de pédale d’un coureur, le fait de voir que tel coureur ne s’est pas ravitaillé, ces petits détails que je ne peux pas voir en cabine, mais que je vois sur la moto. Ce seront deux rôles distincts, mais qui me plaisent tous les deux. C’est pourquoi quand beIn Sport m’a proposé le poste de consultant aux côtés d’Emmanuel Barth, j’ai considéré cela comme un coup du destin.
Le fait que la chaîne débute en cyclisme ne vous a-t-il pas fait hésiter ?
Je n’ai pas hésité une seule seconde ! Bien sûr, il m’a fallu l’aval de France Télévisions. S’ils n’avaient pas voulu me voir collaborer avec beIn Sport, ça ne se serait pas réalisé. Ça va me permettre d’être plus pertinent sur la moto aussi. Je suis l’actualité du cyclisme, mais rien ne vaut la pratique. Et pour bien reconnaître les coureurs, il faut vraiment baigner dedans. La proposition de beIn Sport de commencer le cyclisme avec moi était séduisante. C’est aussi flatteur parce que cela veut dire que ce que j’ai fait avec Rodrigo sur la RTBF a plu. C’est aussi un beau challenge de convaincre un nouvel audimat. Il y a sûrement des gens sur beIn Sport qui n’avaient pas pour habitude de regarder le cyclisme et qui vont peut-être y prendre goût.
Avez-vous une pression particulière par rapport à cette nouveauté ?
Non, je me mets la pression à moi-même. Quand on exerce ce métier, on essaye d’être presque parfait. On fait forcément des fautes, mais je suis constamment à l’écoute. J’essaye d’anticiper toutes les situations. Je ne me présente pas sans avoir étudié ce qu’il s’est passé les années précédentes, les engagés, la météo… Tous ces petits détails qui peuvent faire la différence et qui rendent aussi un duo intéressant et pertinent. Il n’y a rien de pire pour les téléspectateurs que de s’ennuyer devant des commentaires qui s’y perdent.
Connaissez-vous le dispositif qui sera déployé par la chaîne ?
Pas du tout. On m’a simplement demandé de mettre à profit ma connaissance du milieu du vélo. On commentera certaines courses depuis les studios à Paris. Sur Milan-San Remo, on sera sur place. Les accords avec RCS ont été signés il y a peu. Mon premier contact avec beIn Sport remonte à environ un mois, mais on a finalisé notre accord en début de semaine. Nous n’avons pas discuté des ambitions de la chaîne. Le calendrier était bien ciblé. S’ils s’intéressent au cyclisme, c’est sans doute pour en faire un peu plus. Mais les droits du Tour de France par exemple sont cadenassés. À mon sens, beIn Sport cherche à se diversifier. Et le cyclisme reste un sport populaire qui fait de bonnes audiences sur certaines courses. Il est logique de voir une chaîne sportive s’y intéresser comme Eurosport l’avait fait. C’est entre les deux que la concurrence est la plus forte puisqu’Eurosport a perdu une partie de ses courses.
Vous commencerez un nouveau duo avec Emmanuel Barth demain, vous connaissez-vous déjà ?
On s’est vus plusieurs fois. Par exemple, l’année dernière au Grand Prix de Fourmies (NDLR : la première course cycliste diffusée par beIn Sport), où il m’avait proposé une collaboration. Je n’avais pas pu répondre favorablement, car je m’étais engagé sur Paris-Honfleur pour accompagner un groupe. Mais on était restés en contact assez régulièrement. Bien sûr, je n’ai jamais commenté avec lui, ce sera un baptême samedi. On s’entend bien. C’est plus à moi de m’adapter comme je l’ai fait avec Thierry Adam, ou avec Laurent Bruwier à la RTBF. C’est la règle dans le milieu. C’est au journaliste de mener les débats. J’ai toujours un œil sur l’écran pour repérer un fait de course et distinguer le plus rapidement possible les protagonistes. Je pense qu’au fil des retransmissions, cela va bien se passer. On va essayer d’être brillants et de plaire à tous ceux qui écouteront beIn Sport.
Propos recueillis le 28 février 2013.