C’est toujours un plaisir de croiser Cédric Vasseur, le manager de Cofidis, qui plus est quand il est en modes cycliste et management. Nous l’avons croisé au pied du Ventoux, lors de la présentation de la gamme Michelin Power et avons pu faire le point à un moment charnière pour l’équipe Cofidis. Première bonne nouvelle, l’accord de partenariat avec Michelin est prolongé jusqu’en 2021, reste à trouver les partenaires qui vont avec. Demandez le programme, il est dans les réponses qui suivent.
Interview de Cédric Vasseur au pied du Ventoux | © Vélo 101
Quel va être votre calendrier de décisions par rapport aux choix de vos partenariats ?
Je pense que les semaines et les jours qui arrivent seront déterminants. Les discussions vont bon train et on est très proche d’un accord avec nos potentiels partenaires, on devrait pouvoir annoncer ça prochainement.
Vous avez fait un recrutement haut de gamme, on imagine que des coureurs comme Elia Viviani ont des exigences par rapport à ça, est-ce une petite pression supplémentaire ?
Oui c’est une pression, je crois que les coureurs aujourd’hui recherchent une équipe capable de les faire progresser et ça passe par des partenariats gagnants avec un vélo rigide, des pneumatiques qui ne crèvent pas… C’est l’essentiel de mon travail en ce moment. Il faut des partenaires comme Michelin avec lesquels on expose nos besoins, nos attentes, les soucis rencontrés au cours de la saison… Quand on a un partenaire à l’écoute, qui réajuste très rapidement le tir ça fait vraiment un partenariat gagnant.
C’est une marque Française, vous êtes une équipe Française, le dialogue que vous avez avec les techniciens d’une entreprise comme Michelin est un élément important ?
C’est fondamental, la relation qu’on a avec Michelin depuis début 2018 est formidable. Alain Delcourt est notre interlocuteur, il est toujours à l’écoute et vient régulièrement sur les courses. Avec Michelin on a un partenaire qui est en permanence en train de faire évoluer des produits, sur certaines courses on a testé des prototypes qui aujourd’hui permettent de sortir une gamme qui s’appelle Power. Je peux dire que si Christophe Laporte a gagné le contre-la-montre de Bessèges c’est en partie grâce aux pneumatiques qu’il utilisait. On est à la recherche du dernier produit, du produit de dernier cri, on cherche le petit détail qui fait la différence.
Quel est pour vous l’évolution technique qui vous a le plus marqué ou impressionné en tant que coureur ou maintenant ?
Ce qui m’a marqué moi c’est l’arrivée des pédales automatiques et le fait de ne plus avoir de gaine un peu partout. Aujourd’hui on essaie de gagner sur le freinage avec les freins à disques, sur la rigidité et le poids du vélo, le carbone a révolutionné le cyclisme. J’ai commencé avec un vélo 5 vitesses, maintenant on en est à 12 voir 13 (rire). On a toujours des innovations et pour rester dans la course il faut toujours sortir des produits plus performants et innovants.
Le label World Tour pour 2020 est à l’heure actuelle toujours une interrogation, cela perturbe votre mise en place du calendrier 2020 ?
Je ne pense pas que ça perturbe, on a agi tout au long de l’année dans l’optique d’une licence World Tour 2020 – 2022. C’est pour cela qu’on a été chercher des coureurs comme Guillaume Martin ou Elia Viviani. C’est peut-être plus compliqué pour une équipe avec le statut Continental comme nous, mais il y a ce côté découverte du World Tour qui est passionnant. C’est un projet très ambitieux et séduisant.
Quel va être votre calendrier de stages ?
Il y aura un stage administratif la semaine après Paris-Tours et le Tour de Lombardie. On réunit nos troupes le 15/16/17 Octobre à Lille pour les tests médicaux, les tests d’effort, les essayages, prises de cotes pour les vélos… Ensuite on laisse nos coureurs se reposer au mois de Novembre, partir éventuellement en vacances. Puis on fera un stage d’entraînement du 11 au 18 Décembre, à Calpe et au mois de Janvier il y aura la présentation de l’équipe le vendredi 10 avec un départ immédiat pour l’Australie pour ceux qui iront faire Down Under et Cadel. On ira aussi à la Tropicale et au Tour de San Juan, donc pas de stage en Janvier on sera déjà sur trois fronts.
Michelin prolonge avec la Cofidis | © Michelin
Avec le recrutement haut de gamme comme on le disait d’Elia Viviani et de Guillaume Martin, entre-autres… dans votre tête être présent sur le Tour de France 2020 ça veut dire y être avec deux fronts afin de viser les victoires d’étapes avec Viviani et le général avec Martin ?
Le général je ne sais pas, je pense que pour Guillaume Martin c’est un objectif sur deux années. Il a les possibilités de faire un top 5 à très court terme sur un grand tour, et pourquoi pas sur le Tour de France. Il était 21ème il y a deux ans, 12ème cette année, on voit que sa progression est importante. On ne va pas se cacher, l’objectif est de remporter la première étape du côté de Nice avec Elia Viviani, prendre le maillot jaune, ça pourrait être une belle récompense après presque 12 ans de disette sur les routes du Tour. L’objectif pour Guillaume est d’abord de se focaliser sur les victoires d’étapes, on sait que s’il gagne une étape ce sera une difficile en montagne. Et lorsque l’on gagne une étape de montagne on se positionne pour le classement général, mais ce sera dans un deuxième temps.
Sur les autres grands tours, vous avez déjà en tête vos leaders ? On peut penser à Jesus Herrada sur le Tour d’Espagne.
Oui bien-sûr, il devrait d’ailleurs ne pas être sur le Tour de France l’an prochain, on devrait le réserver pour la Vuelta. Sur le Giro on va plutôt mettre une équipe qui va découvrir un grand-Tour avec probablement un Consonni qui sera plus là en chasseur d’étapes.
Par rapport à toutes les équipes que vous avez croisé en tant que coureur, vous prenez dans cette expérience de manager le plus de quel(s) côté(s) ?
Je pense que c’est toujours difficile, j’essaie de prendre un peu de chaque manager. Roger Legeay m’a beaucoup apporté, entre-autres… Peut-être que celui que j’essaie d’utiliser le plus est Patrick Lefévère car c’est celui qui a le plus de succès aujourd’hui, qui a su faire évoluer son équipe… Je pense qu’il faut s’inspirer de lui, c’est le monstre et on est le petit poucet.
Quand vous étiez coureur il n’y avait pas tous les réseaux sociaux. Pensez-vous que tous ses éléments de « starisation » rendent le métier de manager plus passionnant ? plus difficile ?
Oui je pense que c’est juste. Ça le change car on doit composer avec les réseaux sociaux, on peut créer une star grâce à ça même s’il faut aussi les résultats. Ça fait partie de la vie d’un manager aujourd’hui. Il faut bien les utiliser car ça peut être à double tranchant.
En parlant de double tranchant, d’un côté ça met en valeur les partenaires de l’équipe mais d’un autre côté ça coupe un peu la communication entre les coureurs, comment gérez-vous ces éléments là ?
On fait appel à des spécialistes, on a un community manager, un département de communication performant. On a besoin d’une cellule qui traite cet aspect. On travaille aussi avec un coach mental qui essaie de sensibiliser les coureurs aux besoins de liens, il faut se parler, se regarder dans les yeux… C’est important.
Michelin prolonge avec la Cofidis pour 2020 et 2021 | © Michelin
Selon vous, quel est le coureur de l’année 2019 en général ?
C’est une question difficile, honnêtement je pense qu’on peut citer Alaphilippe. Il est passé au travers sur les Championnats du Monde mais sur le Tour de France il a fait rêver de nombreuses personnes, il a marqué les esprits.
On a vu la révélation des cyclo-cross men avec Mathieu Van der Poel et Wout Van Aert et en ce moment on a l’impression qu’il y a une révélation du jeunisme, des jeunes vainqueurs. Pensez-vous que c’est un phénomène durable ou pas forcément ?
Je crois que le cyclisme aujourd’hui est plus propice à voir éclore de jeunes talents, Evenepoel, Pogacar, Van der Poel… On a un cyclisme différent, plus tonique, plus intense, ce qui fait la part belle aux jeunes. Je pense que dans un effectif il faut compter sur les jeunes.
Quel est pour vous le sprinteur de l’année ?
Je pense Groenewegen même s’il a un peu déçu sur le Tour de France, il s’est imposé comme le sprinteur cette année. Viviani n’est pas uniquement sprinteur, il a un registre un peu plus large, notamment sur les Classiques. Un Groenewegen ne gagnera probablement jamais Milan San Remo et j’espère que Viviani le fera dès l’an prochain.
Et le puncheur de l’année ?
Alaphilippe ou Van der Poel !
Si vous deviez faire un top 3 des équipiers de l’année ?
Alors là c’est compliqué, je pense que celui qui m’a vraiment impressionné est Morkov qui fait un super travail pour Viviani.
Enfin, la coursière de l’année ?
Pauline Ferrand-Prévôt qui revient à un très bon niveau.