Alain, vous avez connu des arrivées du Tour de France plus glorieuses, dans quel état d’esprit avez-vous conclu le Tour 2011 ?
C’est la fatalité. Nous avons eu trois fois plus de malchance que la plus malchanceuse des équipes. Nous sommes venus avec quatre leaders, nous terminons seulement avec Levi Leipheimer, qui lui aussi a été bien abîmé en cours de route. Les trois autres, Janez Brajkovic, Chris Horner et Andreas Klöden, sont à la maison. On ne pouvait pas espérer grand-chose. Sans se prendre la tête, on a continué à travailler, mais c’est devenu moins agréable. Le sponsor continue pour deux années de plus. L’objectif de l’année était le Tour de Californie. Le Tour de France passait après donc il y a moindre mal, même si ça ne fait jamais plaisir de ne rien faire sur un Tour dont nous prenions le départ avec quatre leaders.
Quatre leaders nécessitait automatiquement moins d’équipiers pour les protéger, n’est-ce pas là une erreur de stratégie ?
Peut-être mais nous n’avions pas un leader comme Cadel Evans. Même si un type comme Andreas Klöden pouvait créer la surprise, nous misions sur une tactique audacieuse. On a joué en prenant des risques, mais nous n’avons de toute façon pas 50000 coureurs de classiques. Tout le monde ne peut pas se payer des Hincapie ou des Cancellara pour gregarii. Ce qui nous a vraiment manqué, c’est la chance. On peut penser que Brajkovic et Horner n’ont pas été suffisamment protégés, mais Klöden c’est de la malchance pure. Il tombe dans la descente du Pas de Peyrol, c’est la faute à « pas de chance ». Même si nous avions beaucoup de leaders sur le papier, nous savions que notre meilleure cartouche était Klöden. Tant qu’on l’avait, ce n’était pas catastrophique.
Au chapitre des satisfactions, malgré le contexte, que relèveriez-vous ?
Nous n’avons pas grand-chose, disons-le. Je dirais même que nous n’en avons aucune. Nous avons perdu nos leaders et nous arrivons à Paris avec des équipiers. On a essayé d’aller un peu dans les échappées, mais nous n’avions pas grand-monde. Haimar Zubeldia semblait bien parti pour faire un Top 10, mais il a eu une journée sans entre Modane et l’Alpe d’Huez. Ça l’a condamné. Il nous rattrapait bien le coup jusque-là.
Une dernière semaine, quand il n’y a plus d’enjeux, c’est long ?
On ne peut pas dire que c’est long, nous avons quand même l’habitude. Ça a été un peu plus long pour Johan Bruyneel que pour moi parce que j’ai eu l’habitude de faire des Tours de France qui n’étaient pas au top. Ces dernières années, c’est vrai que nous avions toujours quelqu’un de très bien placé, mais nous avons suffisamment de recul pour se faire plaisir et continuer à rigoler. C’est d’ailleurs ce qu’on a fait la dernière semaine parce qu’on ne pouvait pas faire autre chose.
Qu’est-ce que cela préfigure pour la fin de saison ?
Nous avons des objectifs aux Etats-Unis. Je pars début août pour faire les Tours de l’Utah et du Colorado avec une bonne équipe axée autour de Chris Horner et Levi Leipheimer. La Vuelta sera aussi un objectif pour lequel nous allons mettre Andreas Klöden, Janez Brajkovic, Tiago Machado et Haimar Zubeldia. On pense qu’on y aura plus de réussite que sur le Tour, l’objectif sera très élevé.
Propos recueillis à Paris le 24 juillet 2011.