Au même titre qu’un Tour de France change de parcours chaque année, maintenant les grands ingrédients de son succès au programme, les classiques ne sont pas vouées à l’immobilité. Il est bon, de temps à autre, d’apporter quelques modifications pimentées au parcours des monuments de notre sport, tant que les innovations ne dénaturent pas l’esprit de la course. Ainsi donc, la Flèche Wallonne s’offre cette année un nouveau look. L’épreuve relie toujours Charleroi à Huy sur 198 kilomètres, mais l’ordre dans lequel on va chercher chacune des difficultés a été interverti, si bien que le final passera cette année par les ascensions du Mur de Huy et de la côte d’Ereffe dans les 30 derniers kilomètres, avant l’arrivée traditionnelle au sommet du Mur de Huy et son interminable kilomètre aux pourcentages surélevés.
Qu’apportera ce changement ? Telle est la question qui anime la Flèche Wallonne ce matin au départ de Charleroi, alors que les plus grands spécialistes des courses du genre sont réunis sans exception. Certains d’entre eux ont d’ailleurs estimé que la double ascension du Mur de Huy dans les 30 derniers kilomètres allait considérablement changer la donne, et qu’un peloton groupé au pied de la dernière difficulté, comme on le voyait traditionnellement, ne se reverrait pas. Partant de là, on s’attend à un changement radical de tactique dans la dernière heure. Ce qui précède est somme toute classique avec une échappée lancée au 44ème kilomètre par Stéphane Augé (Cofidis), Dimitri Champion (Ag2r La Mondiale), Benjamin Gourgue (Landbouwkredit), David Loosli (Lampre) et Giuseppe Palumbo (Acqua & Sapone).
Les cinq coureurs qui constituent l’échappée matinale engrangent une bonne poignée de minutes d’avance, jusqu’à 8’30 » au mieux, et négocient côtes après côtes : Huy, Peu d’Eau, Haut-Bois, Groynne, Bohisseau, Bousalle, Ahin… Arrive alors l’ascension du Mur de Huy replacée à 30 kilomètres de l’arrivée, dans laquelle les échappés du matin vont être réabsorbés par le peloton, à l’unique exception de David Loosli, qui se maintient en tête dans un groupe de tête recomposé. Le Mur de Huy a en effet permis de redistribuer les cartes. Son ascension négociée, Frank Schleck (Team Saxo Bank) et Roman Kreuziger (Liquigas-Doimo) profitent d’un peloton morcelé pour prendre la fuite avec Bram Tankink (Rabobank) et donc David Loosli. Il y a danger car le temps que le peloton se réorganise, nos quatre nouveaux hommes de tête ont creusé l’écart.
Or on se dirige rapidement vers la côte d’Ereffe, qui précède l’ultime escalade du Mur de Huy. Le peloton, un moment emmené par les coureurs d’Astana, se rapproche finalement du groupe de tête, rejoint dans un premier temps par Igor Anton (Euskaltel-Euskadi), Alexandr Kolobnev (Team Katusha) et Benoît Vaugrenard (Française des Jeux), puis par le gros du peloton à 3 kilomètres de l’arrivée. Finalement, si le changement de parcours aura apporté quelques incertitudes sur l’issue de l’épreuve, la Flèche Wallonne adopte pour finir une image ordinaire avec un peloton relativement compact lancé à toute vitesse dans les rues de Huy, et devant lequel se dresse soudain une route asphaltée. La flamme rouge du dernier kilomètre symbolise le début de l’ascension finale. Un sprint de longue haleine commence sur les rampes du Mur de Huy, où les meilleurs ne tardent pas à prendre les premières positions.
De retour du Tour de Castille et Leon, où ils se sont déjà affrontés de près, Igor Anton et Alberto Contador (Astana) se lancent roue dans roue dans la terrible montée finale. Les deux hommes se mesurent au coude à coude et Contador semble un moment en mesure d’accrocher pour la première fois de sa carrière une course d’un jour à son palmarès de chasseur de Grands Tours. Mais de l’arrière est sorti le champion du monde Cadel Evans (BMC Racing Team), trop court l’année dernière pour l’emporter ici-même et qui a retenu des leçons de cet échec. Parti plus prudemment cette fois-ci, il laisse Contador et Anton s’épuiser dans les derniers lacets vertigineux du Mur de Huy pour les dépasser à quelques décamètres de la ligne et remporter un monument en arc-en-ciel, devant Joaquin Rodriguez (Team Katusha) et un Contador à l’état d’apprenti.
Consultez la galerie photos des classiques.
Classement :
1. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) les 198 km en 4h39’24 »
2. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) m.t.
3. Alberto Contador (ESP, Astana) m.t.
4. Igor Anton (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 6 sec.
5. Damiano Cunego (ITA, Lampre-Farnese Vini) à 9 sec.
6. Philippe Gilbert (BEL, Omega Pharma-Lotto) à 11 sec.
7. Chris Horner (USA, Radioshack) m.t.
8. Alejandro Valverde (ESP, Caisse d’Epargne) m.t.
9. Andy Schleck (LUX, Team Saxo Bank) m.t.
10. Ryder Hesjedal (CAN, Garmin-Transitions) m.t.
Classement complet