Encore fourbus des efforts de la veille et d’une étape andorrane qui, si elle ne marquera peut-être pas la grande Histoire du vélo, marquera profondément ceux qui y sont venus à bout, les coureurs du Tour d’Espagne tournent aujourd’hui le dos à la principauté, au départ d’Escaldes-Engordany, pour s’en aller visiter le piémont pyrénéen jusqu’à Lérida (173 km), en Catalogne. Courbaturés physiquement, tiraillés mentalement, ils font les comptes. Et ils sont lourds. L’étape-reine a trouvé son roi en Fabio Aru (Astana), nouveau détenteur du maillot rouge de leader, et il faut bien encore la présence de Joaquim Rodriguez (Team Katusha) et du surprenant Tom Dumoulin (Giant-Alpecin) à moins de 30 secondes pour maintenir des enjeux dans la perspective des trois grandes étapes asturiennes samedi, dimanche et lundi.
Derrière Aru, le trou semble fait et on ne trouve déjà presque plus trace des quatre as alignés au départ de la Vuelta dans la foulée d’un somptueux Tour de France qu’ils avaient conclu aux quatre premiers rangs du classement général. Alejandro Valverde (Movistar Team) reste le mieux lotti, encore 6ème à 1’52 » d’Aru au classement général quand son coéquipier Nairo Quintana (Movistar Team), lâché par son organisme dans les rampes pyrénéennes, évolue désormais au 9ème rang à 3’07 ». C’est toujours mieux que le sort qui a été réservé à Chris Froome (Team Sky), dont l’incapacité à appuyer sur les pédales hier (7’19 » concédées à Fabio Aru) était en fait la conséquence d’une fracture de l’os naviculaire, un os du pied qu’il s’est brisé en chutant en début de course, ce qui l’oblige à jeter l’éponge ce matin. Vincenzo Nibali (Astana), lui, a déjà quitté la route depuis douze jours, exclu pour s’être accroché à la portière de son véhicule.
Si la sentence prononcée à l’encontre du Sicilien fait finalement le jeu de Fabio Aru, qui n’aura pas eu à se battre contre son propre camp pour justifier un statut de leader, Vincenzo Nibali a de quoi en vouloir au jury des commissaires. Hier, alors que les mètres de dénivelé se cumulaient de façon terrifiante, neuf coureurs ont été pris en flagrant délit de rétropoussette ou de bidon collé… Tous sont encore au départ aujourd’hui, à commencer par Alexis Gougeard (Ag2r La Mondiale), qui n’a écopé comme les autres que de 10 secondes de pénalité ! Et voilà qui nous amène au coureur normand, que l’on connaît pour de bien meilleures qualités, comme celle d’être un infatigable baroudeur. On l’avait déjà vu à l’œuvre en direction de Malaga, il avait promis de recommencer. Il l’aura fait aujourd’hui sur la route de Lérida.
Danny Van Poppel s’écarte aux 10 kilomètres, une roue à plat !
Cette douzième étape était une énigme. Avec la seule ascension du col de Boixols dans le premier tiers de course, elle se présentait autant comme une invitation aux longs barouds que comme une nouvelle opportunité de sprint massif sans les vedettes du sprint elles aussi écartées des débats. D’ailleurs, cette inconnue quant à l’issue de l’étape aura tenu les aficionados en haleine jusque dans les dernières secondes de course, le peloton n’ayant pas encore rattrapé les échappés sous la flamme rouge du dernier kilomètre. C’est que devant on aura vu cinq gros moteurs se liguer pour faire de l’échappée matinale, lancée au kilomètre 7, une réussite : avec Alexis Gougeard, citons Maxime Bouet (Etixx-Quick Step), Bert-Jan Lindeman (Team LottoNL-Jumbo), Miguel-Angel Rubiano (Colombia) et Jaco Venter (MTN-Qhubeka).
Très vite, le peloton avait laissé filer ce quintet sans opposer plus de résistance que cela. Ensemble, les cinq de tête avaient pris une, puis deux, puis trois minutes, mais on savait qu’on y verrait surtout plus clair en haut du col de Boixols (15,8 km à 5,1 %). Là, l’écart atteignait les cinq minutes. Il monterait encore pour avoisiner les six minutes, avant que le peloton ne décide de se mettre en chasse de Bouet, Gougeard, Lindeman, Rubiano et Venter. Encore fallait-il que des équipes de sprinteurs soient prêtes à travailler derrière les hommes du jour, ce qui fut fait lorsque la formation Trek Factory Racing, déjà récompensée d’une victoire d’étape avec Jasper Stuyven (contraint depuis à l’abandon), se mit à l’ouvrage, cette fois pour Danny Van Poppel. Le beau travail des Trek ramenait le peloton sur les échappés mais on avait craint un moment qu’il ne soit pas couronné de succès lorsque Van Poppel s’écarta aux 10 kilomètres, une roue à plat !
Ce n’en était pas fini pour autant, ni pour le Néerlandais, qui retrouvait sa place in extremis à l’avant du peloton, ni pour le paquet qui poursuivait sa chasse à un rythme élevé pour fondre sur les échappés. Dans le dernier kilomètre, Maxime Bouet était le dernier à insister mais le Français devait se plier à la loi du plus fort, ravalé par des sprinteurs lancés tête la première vers la ligne d’arrivée. Et en dépit de la crevaison qui l’avait affecté quelques kilomètres plus tôt, c’est bien le jeune Danny Van Poppel, 22 ans, fils de Jean-Paul Van Poppel (neuf fois vainqueur d’étapes sur le Tour comme sur la Vuelta), qui se redressait victorieusement au franchissement de la ligne, devant Daryl Impey (Orica-GreenEdge) et Tosh Van Der Sande (Lotto-Soudal). Pour un tout premier succès à ce niveau de compétition !
Demain vendredi, les échappés auront plus de chances d’aller au bout entre Calatayu et Tarazona (178 km), en Aragon.
Classement 12ème étape :
1. Danny Van Poppel (PBS, Trek Factory Racing) les 173 km en 4h02’11 » (42,9 km/h)
2. Daryl Impey (AFS, Orica-GreenEdge) m.t.
3. Tosh Van Der Sande (BEL, Lotto-Soudal) m.t.
4. Nikolas Maes (BEL, Etixx-Quick Step) m.t.
5. John Degenkolb (ALL, Giant-Alpecin) m.t.
6. Jempy Drucker (LUX, BMC Racing Team) m.t.
7. Tom Van Asbroeck (BEL, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
8. Kristian Sbaragli (ITA, MTN-Qhubeka) m.t.
9. José-Joaquin Rojas (ESP, Movistar Team) m.t.
10. Leonardo Duque (COL, Colombia) m.t.
Classement général :
1. Fabio Aru (ITA, Astana) en 47h14’30 »
2. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) à 27 sec.
3. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) à 30 sec.
4. Rafal Majka (POL, Tinkoff-Saxo) à 1’28 »
5. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) à 1’29 »
6. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 1’52 »
7. Daniel Moreno (ESP, Team Katusha) à 1’54 »
8. Mikel Nieve (ESP, Team Sky) à 1’58 »
9. Nairo Quintana (COL, Movistar Team) à 3’07 »
10. Louis Meintjes (AFS, MTN-Qhubeka) à 4’15 »
Classement par points :
1. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) 79 pt
2. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) 74 pt
3. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) 74 pt
4. John Degenkolb (ALL, Giant-Alpecin) 68 pt
5. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) 65 pt
6. Kristian Sbaragli (ITA, MTN-Qhubeka) 65 pt
7. Fabio Aru (ITA, Astana) 61 pt
8. Nicolas Roche (IRL, Team Sky) 56 pt
9. Tosh Van Der Sande (BEL, Lotto-Soudal) 51 pt
10. Rafal Majka (POL, Tinkoff-Saxo) 50 pt
Classement de la montagne :
1. Omar Fraile (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 55 pt
2. Mikel Landa (ESP, Astana) 25 pt
3. Bert-Jan Lindeman (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 16 pt
4. Ruben Plaza (ESP, Movistar Team) 14 pt
5. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) 13 pt
6. Fabio Aru (ITA, Astana) 12 pt
7. Romain Sicard (FRA, Team Europcar) 11 pt
8. Imanol Erviti (ESP, Movistar Team) 10 pt
9. Ian Boswell (USA, Team Sky) 9 pt
10. Darwin Atapuma (COL, BMC Racing Team) 8 pt
Classement du combiné :
1. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) 10 pt
2. Fabio Aru (ITA, Astana) 14 pt
3. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) 21 pt
4. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) 27 pt
5. Rafal Majka (POL, Tinkoff-Saxo) 42 pt
6. Mikel Landa (ESP, Astana) 43 pt
7. Daniel Moreno (ESP, Team Katusha) 47 pt
8. Romain Sicard (FRA, Team Europcar) 64 pt
9. Nicolas Roche (IRL, Team Sky) 66 pt
10. José Gonçalves (POR, Caja Rural-Seguros RGA) 81 pt
Classement par équipes :
1. Team Sky (GBR) en 142h02’40 »
2. Astana (KAZ) à 3’45 »
3. Movistar Team (ESP) à 8’20 »
4. Team Katusha (RUS) à 20’52 »
5. Caja Rural-Seguros RGA (ESP) à 36’03 »
6. Cofidis (FRA) à 36’06 »
7. Team Europcar (FRA) à 38’16 »
8. Lotto-Soudal (BEL) à 38’53 »
9. Tinkoff-Saxo (RUS) à 48’12 »
10. Etixx-Quick-Step (BEL) à 48’28 »