En cyclo-cross plus que n’importe quelle autre discipline, une victoire ne tient qu’à peu de choses. Les ennuis mécaniques font partie intégrante de ce sport hivernal et peuvent vous faire retomber alors que la victoire vous est promise. Une crevaison, un mauvais passage de vitesse, une chute, Francis Mourey (FDJ.fr) en a connu tout au long de sa longue carrière. Mais jamais sa frustration ne pourra être aussi grande qu’aujourd’hui sur cette deuxième manche de Coupe de France à Sisteron qui fera date dans le petit monde du cyclo-cross français. Il est vrai que le champion de France n’abordait déjà pas ce deuxième volet du grand trophée national dans les meilleures dispositions. Battu trois fois depuis le début du mois par les représentants de la nouvelle génération, le Franc-Comtois devait profiter de l’événement pour remettre les points sur les « i ».
Autrement dit, rappeler qui était le patron face à des jeunes, Clément Venturini (Cofidis) en tête, qui contestent son hégémonie sur le territoire. Le professionnel de Cofidis n’a d’ailleurs pas tardé à bien encaisser son passage dans la catégorie supérieure. De là à battre le roi de la discipline en France, il y a une marge que l’intéressé n’était pas pressé de franchir. « Étant encore Espoir, mon but cette année en courant avec Francis, c’est de me rapprocher de lui, nous confiait le Rhônalpin après la première manche de Coupe de France. Si j’arrive un jour à le détrôner sur une course, ce sera la cerise sur le gâteau. Mais il ne faut pas oublier qu’il s’appelle Francis Mourey et que c’est un coureur qui fait partie du meilleur niveau mondial. Je n’ai pas la prétention de dire que je vais le battre cette année. »
Les choses ont depuis bien changé, et le champion de France Espoirs a battu son homologue chez les Elites à Marle. Que pouvait-il faire de mieux ? Le battre sur une manche de Coupe de France, alors que Mourey n’y avait enregistré qu’une seule défaite depuis 2005. Qui aurait pu croire que Steve Chainel, dernier crossmen à avoir battu la légende du cross français en 2010, aurait un successeur à l’entame de la dernière ligne droite. Pas grand monde, puisque c’est bel et bien le maillot bleu-blanc-rouge (ou plutôt bleu-boue-rouge au vu des conditions) qui aborde le dernier virage en solitaire. Son chemin n’a pourtant pas été de tout repos. Car avec un Clément Venturini en Elite, le Franc-Comtois a trouvé sur sa route un sérieux adversaire, jouant dans la même cour que lui et qui peut lui poser de sérieux problèmes.
Mais la performance du Rhônalpin, le seul à être en mesure de l’accompagner, n’aura pas été le seul obstacle à se dresser sur sa route. À mi-course, le champion de France semble avoir enfin trouvé la faille, mais au moment où il prend quelques mètres sur son rival, il déjante. Dans un sursaut de lucidité et grâce à son expérience, il parvient à remettre son boyau en place pour changer de machine quelques minutes plus tard au poste. Une fois revenu sur le professionnel de Cofidis, il subit une nouvelle désillusion. À deux tours de la fin, c’est une chute qui le retarde. De retour sur sa monture, Francis Mourey fait parler sa puissance dans la gadoue de Sisteron pour distancer, semble-t-il, définitivement Clément Venturini. Dans la dernière partie du dernier tour, il possède une vingtaine de secondes d’avance. La messe semble dite.
C’est sans compter sur ces détails qui font la beauté de notre sport. La victoire n’est acquise que lorsque la ligne est franchie et Francis Mourey va en faire l’amère expérience. En passant d’un bourbier à une piste pleine de petits cailloux, le champion de France voit sa chaîne se bloquer et son dérailleur se briser. Il n’a alors pas d’autre choix que de mettre pied à terre et de courir jusqu’à l’arrivée. À 10 mètres de la ligne, tout semble encore possible pour Mourey qui commence à y croire. Le poing qu’il serre pour manifester sa joie disparaît rapidement au moment où il sent Clément Venturini revenir en boulet de canon. À la façon d’un sprinteur, le Rhônalpin jette son vélo sur la ligne. Le verdict de la photo-finish est sans appel, la victoire lui revient pour quelques centimètres ! Pour la première fois depuis quatre ans, Francis Mourey est battu.
Il lui reste une manche le 14 décembre à Lanarvily pour régler ses comptes.
Classement :
1. Clément Venturini (Cofidis) en 1h03’00 »
2. Francis Mourey (FDJ.fr) m.t.
3. David Menut (Limousin) à 1’07 »
4. Fabien Canal (Armée de Terre) à 1’13 »
5. Nicolas Bazin (US Domont Cyclisme) à 2’28 »
6. Laurent Colombatto (VCC Morteau-Montbenoit)
7. Clément Lhotellerie (Team Peltrax-CS Dammarie-lès-Lys)
8. Ludovic Renard (VS Chartrain)
9. Damien Mougel (VS Eguisheim)
10. David Derepas (Bourgogne)
Classement Coupe de France # 2 :
1. Francis Mourey (FDJ.fr) 67 pt
2. Clément Venturini (Cofidis) 65 pt
3. Fabien Canal (Armée de Terre) 61 pt
4. Laurent Colombatto (AC Bisontine) 54 pt
5. Damien Mougel (VS Eguisheim) 49 pt
6. Ludovic Renard (VS Chartrain) 44 pt
7. David Derepas (Bourgogne) 40 pt
8. Julien Roussel (Normandie) 39 pt
9. Alexandre Baillet (VCA Saint-Quentin) 36 pt
10. Ludovic Dubau (AC Bazancourt-Reims) 35 pt