Pidcock, Superman
S’il le voulait, Thomas Pidcock pourrait même être champion de BMX Freestyle. Sa jolie figure de style, à 3 minutes d’un premier titre de champion du monde de cyclo-cross, en atteste. Mais elle symbolise surtout la déconcertante facilité avec laquelle le britannique s’est arrogé l’arc-en-ciel. Dans cette course, il s’est effectivement détaché avec autant de légèreté que ce saut fantaisiste. Et il l’a fait si précocement que les Belges en sont même restés un temps incrédules.
Opposé de facto à l’imposante cohorte du « plat pays », Thomas Pidcock s’est d’abord évertué à n’en laisser filer aucun, sous peine de ne jamais le revoir. D’abord mis sous pression par le vif départ de Toon Vandebosch, il avait ensuite dû répondre à la puissante attaque de Michael Vanthourenhout au bout de 4 tours, non sans avoir essuyé entre temps moultes situations piégeuses. Alors, lassé de surveiller ces manigances, il s’est rappelé que la meilleure défense était l’attaque. Et il s’est efforcé d’appliquer méticuleusement ce précepte.C’est avec une combativité exemplaire que Tom Pidcock est allé cherché son premier sacre en CX | © UCI
D’un violent contre suivi d’un pic d’effort, il parvenait à faire céder le valeureux Vanthourenhout, bien incapable de tenir un tel rythme. Appliqué dans les virages, courageux dans les relances, Thomas Pidcock s’est livré à une démonstration de cyclo-cross, profitant d’un circuit extrêmement physique pour affirmer sa forme. Deux tours plus tard, les Belges étaient KO. Relégués à trente secondes du meneur, un gouffre en cyclo-cross, ces derniers revoyaient leurs ambitions à la baisse. Adressant leurs adieux à l’or, ils pensaient désormais à l’argent, médaille pour laquelle aucun d’eux n’aurait vraisemblablement signé au départ. Encore fallait-il résister aux deux intrus glissés dans leurs rangs : le surprenant Clément Venturini et le discret Lars Van der Haar.
Confortablement calé dans les roues de ses adversaires depuis le début de la partie, le néerlandais s’est intelligemment économisé pendant que les Belges s’évertuaient à tenter, en vain, de réduire l’écart. Et quand il l’a jugé opportun, le batave a attaqué. Et quelle estocade ! Parfaitement préparée, venue de l’arrière, l’oranje s’est élancé avec puissance et vitesse dans une bosse pour faire la différence en basculant. Bientôt, seul Eli Iserbyt résistait encore dans sa roue, tandis que Venturini accusait le coup.Tom Pidcock, superman du cyclo-cross | © UCI
Et si le vainqueur de la Coupe du Monde a tout tenté pour surprendre le batave, c’est bien Lars Van der Haar qui a franchi la ligne d’arrivée en « premier des autres », apparemment satisfait de sa performance. Après lui, 7 des 9 coureurs suivant furent belges. De quoi préparer une orgie d’accessits pour le retour. Clément Venturini, lui, franchissait fièrement la ligne en 5e position, égalant ainsi son meilleur résultat de la saison.
Pendant ce temps-là, Thomas Pidcock savourait déjà son sacre, ému aux larmes dans les bras de sa compagne. Mois après mois, la vie du jeune britannique (22 ans) se transforme en merveilleux conte de fée. Champion olympique de VTT en juillet dernier, 6e des mondiaux sur route en septembre, le voilà désormais tutoyer les sommets d’une troisième discipline cycliste. On a beaucoup parlé des phénomènes Van der Poel et Van Aert. Il va falloir commencer à s’intéresser à l’étoile Pidcock.Le podium élite masculin de ces mondiaux de CX 2022 | © UCI
Le top 10 de l’épreuve élites masculine :
- Thomas PIDCOCK (Royaume-Uni), en 1h00min36s
- Lars VAN DEN HAAR (Pays-Bas), à 30s
- Eli ISERBYT (Belgique), à 32s
- Michael VANTHOURENHOUT (Belgique), à 52s
- Clément VENTURINI (France), à 57s
- Toon AERTS (Belgique), à 1min02s
- Jens ADAMS (Belgique), à 1min06s
- Laurens SWEECK (Belgique), à 1min16s
- Kevin KUHN (Suisse), à 1min36s
- Daan SOETE (Belgique), à 1min44s
Vos, Greatest Of All Time
La veille, chez les femmes, l’hégémonie annoncée n’a en revanche pas ratée ! Occupant 8 des 10 premières places du classement final de la Coupe du Monde, les Néerlandaises ont débarqué en bande à Fayetteville pour y arracher le plus de médailles possibles. Mais de cette floppée de prétendantes, encore fallait-il dégager une lauréate. Et à cette fin, ce sont les plus grands noms du cyclisme féminin néerlandais qui ont répondu présent.
Rapidement, la course fut réduite à un duel opposant Marianne Vos à Lucinda Brand, un temps arbitré par leur compatriote Ceylin Alvarado. Les anciennes coéquipières de la grande Rabobank-Liv des années 2013-2016 se sont effectivement livré à un affrontement haletant durant 7 tours, notamment marqué par l’impressionnante attaque de Lucinda Brand dans les longs escaliers, lieu phare du circuit américain. Dans un « mano à mano » digne d’une certaine finale d’Open d’Australie, les deux femmes n’ont cessé de se répondre tour à tour, sans jamais parvenir à faire la différence. Dès lors, seul le sprint pouvait les départager. Alors, Marianne Vos s’en est remise à son impérissable pointe de vitesse pour décrocher sa 101e victoire en cyclo-cross en carrière. Tout simplement GOATesque, de la part d’une femme cumulant désormais 13 maillots arc-en-ciel et deux titres olympiques sur trois disciplines différentes (cyclo-cross, route et piste).Marianne Vos vainqueure de ces mondiaux de CX 2022 devant Lucinda Brand | © UCI
Sur le podium, une autre heureuse figurait à ses côtés. Privant les Pays-Bas d’un triplé oranje, la surprenante italienne Sylvia Persico est effectivement parvenue à rattraper puis à lâcher Ceylin Alvarado pour écrire la plus belle ligne de son palmarès. Quant à la régulière Hélène Clauzel, elle concluait son honorable saison par une valeureuse 8e place, récompensant le travail abattu tout l’hiver dans les sous-bois. Ainsi, s’il aura manqué une médaille aux français, ces mondiaux auront toutefois apporté de belles satisfactions au clan tricolore. De quoi investir davantage sur la discipline pour les saisons à venir ?Le podium élite féminin de ces mondiaux de CX 2022 | © UCI
Le top 10 de l’épreuve élites féminine :
- Marianne VOS (Pays-Bas), en 55min0s
- Lucinda BRAND (Pays-Bas), à 1s
- Silvia PERSICO (Italie), à 51s
- Ceylin ALVARADO (Pays-Bas), à 1min04s
- Yara KASTELIJN (Pays-Bas), à 1min05s
- Manon BAKKER (Pays-Bas), à 1min05s
- Maghalie ROCHETTE (Canada), à 1min39s
- Hélène CLAUZEL (France), à 1min59s
- Inge VAN DER HEIJDEN (Pays-Bas), à 1min59s
- Sanne CANT (Belgique), à 2min12s