Depuis quelques années, je constate qu’il y a de moins en moins de cyclistes pros sur nos cyclo-cross. Les équipes Pros freinent leurs coureurs à pratiquer le cyclo-cross, ils préfèrent leur imposer des stages au soleil et « bouffer des bornes », que d’aller « s’amuser » dans la nature. C’est vrai que la saison route finit tard et qu’il faut laisser une période pour se reposer, mais il reste tout de même un mois ou deux pour s’adonner au cyclo-cross. J’ai souvent été confronté aux dirigeants de mes équipes qui me freinaient sur ma pratique du cyclo-cross pensant que ça me « cramait » alors que je m’y ressourçais. Ces dernières années, la tendance des teams est de copier la « méthode SKY », qui a pour principe de faire faire à ses coureurs, peu de jours de courses, et un maximum de stages. D’ailleurs, je n’ai jamais vu un coureur de chez Sky sur un cyclo-cross, dommage, ça pourrait être attractif pour la discipline !
Malheureusement, sur notre prochain championnat de France, il nous restera un seul pro au départ : Clément Venturini, c’est trop peu ! Déjà qu’il a mis un sacré coup de frein sur les cyclo-cross cette année en ne participant qu’à la moitié de la saison, sans faire les Coupes du monde alors que c’est notre champion de France ! Comment faire rêver nos jeunes ? Ils sont nombreux à pratiquer cette discipline qui est une très bonne école pour eux. On ne compte plus les bons et excellents routiers venant du cyclo-cross. Les exemples ne manquent pas.
D’ailleurs les équipes Pros savent repérer et recruter les jeunes crossmans, mais malheureusement nos pépites sont rapidement orientées sur la route en délaissant le cross. Un bon exemple pour moi, c’est Julian Alaphilippe : il est plusieurs fois champion de France espoir et, du jour au lendemain, il passe dans une pro Tour et ne touche plus au cyclo-cross. Je pense que c’est dommage, il aurait pu se faire plaisir quelques années de plus en cross comme Stybar ou Boom. Ils ont été champions du monde Élites tout en faisant d’excellentes saisons sur route. Julian a le potentiel d’aller cueillir un titre mondial.
Bien sûr, il faut aussi se mettre à la place des équipes Pros. Pourquoi ne s’intéressent-elles pas ou plus au cyclo-cross? Les saisons sont très longues, avec un calendrier trop chargé, qui commence en janvier et se termine en d’octobre, il ne reste plus beaucoup de place pour le cyclo-cross … Et la récupération. De plus, médiatiquement, les courses sont peu diffusées à la TV, à part en Belgique où le cyclo-cross est le sport national. Donc, en France, à moins d’évoluer au plus haut niveau mondial, il est difficile de valoriser les sponsors. Il faut savoir que l’investissement financier est important pour équiper un cyclo-crossman pro, il faut un camion avec deux mécaniciens et un camping-car avec un kiné, et pourquoi pas un directeur sportif, ça fait du monde et donc de la masse salariale. Sans oublier le matériel car il faut au minimum trois vélos et des paires de roues supplémentaires. C’est pourquoi certaines équipes ont laissé tomber le cyclo-cross.
Quelles solutions pouvons-nous trouver pour relancer les pros sur nos cyclo-cross français? Le meilleur exemple est le cyclo-cross belge, il se porte bien, c’est leur culture ! Sans parler de les égaler, nous pourrions calquer nos organisations sur les leurs ! Ils savent attirer le public, les courses sont retransmises à la TV en direct et, ils ont des équipes de cyclo-cross Pros, c’est peut-être une des solutions ?
Nous progressons de ce côté-là, avec le Team Chazal Canyon et le Team Peltrax Braquet Libre qui sont précurseurs. D’autres projets sont en train de voir le jour. Si ces structures progressent et se multiplient chez nous, ça va aller dans le bon sens, et, nous permettre de garder nos jeunes talents dans la discipline en pouvant leur proposer un statut « pro cyclo-cross » et de pouvoir, dans le futur, rivaliser avec les meilleurs mondiaux… C’est mon souhait.