Lucie, comment jugez-vous votre prestation à Coxyde où vous avez pris la 12ème place ?
J’ai eu un petit souci mécanique au départ qui m’oblige à changer deux fois de vélo. Du coup, je perds le contact directement. C’est un circuit très physique et je ne me suis pas affolée en me disant que j’allais pouvoir remonter. Mais, me faire mal pour une 8ème ou 10ème place ne m’intéressait pas. J’étais partie pour faire une plus belle performance. C’est un circuit que j’aime beaucoup où je sais que je peux tout passer en vélo. Je n’étais plus trop concentrée, je passais à pied, j’ai perdu beaucoup de temps et la place s’en fait ressentir directement.
Vous semblez très déçue.
Oui, c’est vrai. C’est moi qui me suis mis la pression. Je voulais vraiment marcher à Coxyde. Physiquement, je ne me sens pas encore totalement prête. Avec un petit souci mécanique, je me retrouve directement derrière. Il fallait vraiment que tout se passe nickel pour pouvoir jouer les premiers rôles. Ce sera pour la prochaine fois.
N’êtes-vous pas perturbée par le sable et les dunes ?
Soit on est assez technique et on passe en vélo, et c’est ce que j’arrive à faire. En vélo, on gagne beaucoup de temps, mais il faut savoir se faire mal et être bien concentrée. La plupart des filles passent à pied, en courant. Mais ce n’est pas ma spécialité.
Quel est votre objectif au départ d’une manche de Coupe du Monde ?
En général, je n’en ai pas. Ce sont des courses de préparation pour le Championnat de France et le Championnat du Monde. Je prends toutes les courses comme un entraînement. Même si à Coxyde j’avais envie de faire une petite perf sur un circuit que j’aimais bien. C’est raté, mais je suis à ma place avec l’entraînement que j’ai actuellement. J’ai repris tranquillement pour pouvoir profiter de mes enfants. Le vélo n’est pas ma priorité numéro un. Mon rôle de maman est très important. Je reprends donc en douceur après une saison VTT très dure. Je m’entraîne progressivement pour retrouver le plaisir de pédaler. De toute façon, les objectifs sont encore loin. Il faut être prête au mois de janvier et j’ai encore un peu de boulot.
La transition était-elle facile une semaine après la manche de Challenge National de Quelneuc que vous avez dominée ?
Il n’y a pas grand-chose à gérer. Je sais où je vais. Je savais qu’au Challenge, il était fort possible que je gagne. Je ne me suis pas pris la tête et j’étais zen. Sur une Coupe du Monde, je sais qu’il y a beaucoup de filles qui marchent. C’est vrai qu’il faut changer d’état d’esprit, se dire qu’il faudra se battre du départ à l’arrivée pour jouer les premiers rôles.
Christel Ferrier-Bruneau a pris sa retraite, Pauline Ferrand-Prévot est blessée, Caroline Mani est aux États-Unis. Ne vous sentez-vous pas orpheline au niveau national ?
Chez les Élites hommes et femmes, il y a un petit passage à vide. Avant, il y avait beaucoup de monde sur les manches de Challenge, un gros niveau. On se battait pour notre qualification pour les Championnats du Monde. Aujourd’hui, il y a beaucoup de jeunes derrière. Les catégories cadettes et juniors sont très ouvertes. Mais devant, c’est vrai qu’il y a un petit trou. Depuis que les Championnats Elites Dames ont été mis en place, il y a toujours eu de la bagarre. Mais je sais que mes concurrentes comme Pauline et Caroline seront là au Championnat de France. En attendant, il n’y a pas grand-monde. Chacune fait comme elle veut. Christel a pris sa retraite, car elle a envie de passer à autre chose. Elle a raison, il n’y a pas que le vélo. Je fais du vélo pour moi, et s’il n’y a personne derrière, tant pis. Il y a beaucoup de jeunes filles qui vont arriver. L’avenir féminin en cyclo-cross va être assuré. Les manches de Challenge sont ouvertes aux jeunes. Il y aura du monde, il faut juste être patient.
Comment gérez-vous vos déplacements en Coupe du Monde ?
Tout est à ma charge. Même avec la prime à l’arrivée, je ne rentre pas dans mes frais. On le sait. Le sport féminin est purement un sport plaisir et c’est dommage. Encore que dans le cyclo-cross, il y a un peu de financement, mais ça ne reste que du plaisir. En revanche, c’est dommage pour les Juniors et Espoirs que la fédération n’ait pas fait le déplacement. Toutes les manches de Coupe du Monde sont ouvertes à toutes les catégories et il est vrai que cela fait beaucoup de déplacements. Ce sont des gros budgets. C’est dommage que la fédé n’investisse pas plus dans le cyclo-cross. On sait que la route et la piste ont les moyens. Ce sont les jeunes qui trinquent. Ils ne sont pas à Coxyde pour le général de la Coupe du Monde, pour l’entraînement et pour faire de belles courses. C’est vraiment dommage.
Cette situation ne vous donne-t-elle pas envie de rentrer dans une structure belge ?
Mon rôle de maman m’en empêche. Je n’ai pas envie de passer mon temps à faire du vélo. Même si j’en avais envie, il n’existe pas de structure qui existe et qui puisse me permettre de rentrer dans mes frais. Y compris dans des équipes comme Telenet-Fidea ou Enertherm-BKCP. Si ce sont des Belges, oui, car elles ont moins de déplacements, puisqu’elles sont sur place. Mais il n’existe pas de structure qui aide les filles à 100 % et qui les pousse à faire du cyclo-cross. Je préfère être avec mon camping-car, être tranquille, ne pas me prendre la tête, ne pas avoir de pression et faire tout à ma sauce. Heureusement que mon mari est cycliste professionnel, car certaines filles doivent travailler à côté. Il y en a beaucoup, et ce n’est pas évident pour elles.
Propos recueillis à Coxyde le 23 novembre 2013.